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Ariane Web: Conseil d'État 431500, lecture du 8 juillet 2019, ECLI:FR:CEORD:2019:431500.20190708

Décision n° 431500
8 juillet 2019
Conseil d'État

N° 431500
ECLI:FR:CEORD:2019:431500.20190708
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
GOLDMAN ; SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats


Lecture du lundi 8 juillet 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...A...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de la décision du 25 avril 2019 par laquelle la présidente de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) a prononcé à son encontre une mesure de suspension provisoire, en premier lieu, de la participation directe ou indirecte à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à la remise de prix en argent ou en nature, et à des manifestations sportives autorisées par une fédération professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci, en deuxième lieu, de l'exercice des fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport, en troisième lieu, de l'exercice des fonctions de personnel d'encadrement ou de toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle, ou de l'un des membres de celles-ci et, en dernier lieu, de la participation à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leur membre, ou le comité olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage ;

2°) de mettre à la charge de l'AFLD la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que la décision contestée, en premier lieu, l'empêche d'exercer à très brève échéance son activité de sportive de haut niveau, dans l'attente de la décision de la commission des sanctions de l'AFLD, alors même que les qualifications pour les championnats du monde se déroulent actuellement et qu'elle doit participer à des courses en vue de sa participation aux Jeux olympiques de 2020 pour lesquels elle a été qualifiée, en deuxième lieu, porte atteinte à ses intérêts financiers et, en dernier lieu, porte atteinte à son image et à sa réputation ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- l'article L. 232-23-4 du code du sport, sur le fondement duquel a été pris la décision contestée, méconnaît, d'une part, le principe du respect des droits de la défense car la procédure contradictoire n'intervient qu'après l'édiction de la mesure et, d'autre part, le principe de séparation des pouvoirs, dès lors qu'il fait du président de l'AFLD à la fois un organe de poursuite et de sanction ;
- la décision litigieuse est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- il ressort de la décision litigieuse que la situation particulière de Mme A...n'a pas été sérieusement examinée ;
- la décision litigieuse repose sur une erreur de fait et sur une procédure de contrôle irrégulière, dès lors que les rapports des agents contrôleurs sont contradictoires, que ces derniers n'ont pas décliné leur identité et qualité, et qu'ils n'ont pas procédé à la notification du contrôle ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits, dès lors qu'il ne saurait être reproché à Mme A...de s'être soustraite au prélèvement d'un échantillon ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur de droit, dès lors que la présidente de l'AFLD s'est crue à tort en situation de compétence liée pour prononcer cette suspension, alors qu'elle disposait d'un pouvoir discrétionnaire ;
- le secret professionnel a été méconnu, les éléments du dossier ayant été exposés dans la presse avant l'intervention de la première décision ;
- la décision litigieuse est entachée d'un détournement de procédure et méconnaît le droit à un procès équitable et à un tribunal impartial ;
- la sanction est manifestement disproportionnée dès lors que, d'une part, Mme A... s'est conformée à 27 contrôles antidopage en moins d'un an et demi et n'a jamais été contrôlée positive, d'autre part, les procédés utilisés démontrent une certaine forme d'acharnement, enfin, la décision l'empêche d'exercer son activité professionnelle et la prive de ses revenus patrimoniaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2019, l'Agence française de lutte contre le dopage conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.


Après avoir convoqué à une audience publique d'une part, Mme A...et, d'autre part, l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 2 juillet 2019 à 16 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Goldman, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A...;

- MmeA... ;

- les représentants de MmeA... ;

- Me Poupot, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

- les représentants de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;

Vu la mesure d'instruction supplémentaire du 3 juillet 2019 par laquelle le juge des référés, rouvrant l'instruction jusqu'au jeudi 3 juillet à 19 heures puis jusqu'au lundi 8 juillet à 13 heures, a demandé aux parties de répondre à la question de savoir si Mme A...doit être regardée comme une sportive " de niveau international " au sens des dispositions du 16° du I de l'article L. 232-5 du code du sport ;

Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 3 et 8 juillet 2019, par lesquels Mme A...maintient ses conclusions et ses moyens. Elle soutient, en outre, qu'elle entre dans le champ d'application du 16° du I de l'article L. 232-5 du code du sport et que, par suite, la présidente de l'AFLD ne pouvait légalement prendre aucune mesure à son égard sur le fondement du code du sport ;

Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 3 et 8 juillet 2019, par lesquels l'AFLD maintient ses conclusions et ses moyens. Elle soutient, en outre, que Mme A...n'est pas une sportive de niveau international au sens et pour l'application du 16° du I de l'article L. 232-5 du code du sport ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code du sport ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'ordonnance n° 2018-1178 du 19 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Aux termes de l'article L. 232-23-4 du code du sport : " Lorsqu'un résultat d'analyse implique une substance interdite ou une méthode interdite, à l'exception d'une substance spécifiée au sens de l'annexe I à la convention internationale mentionnée à l'article L. 230-2, le président de l'Agence française de lutte contre le dopage ordonne à l'encontre du sportif, à titre conservatoire et dans l'attente de la décision de la commission des sanctions, une suspension provisoire : / 1° De la participation directe ou indirecte à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et à des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue sportive professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci ; / 2° De l'exercice des fonctions définies à l'article L. 212-1 ; / 3° De l'exercice des fonctions de personnel d'encadrement ou de toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle, ou de l'un des membres de celles-ci ; / 4° De la participation à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage. / Lorsque le résultat d'analyse implique une substance spécifiée au sens de l'annexe I à la convention internationale mentionnée à l'article L. 230-2, ou lorsqu'une autre infraction aux dispositions du présent titre est en cause, d'une part, l'intéressé peut accepter la suspension provisoire décrite à l'alinéa précédent dans l'attente de la décision de la commission des sanctions, d'autre part, le président de l'Agence française de lutte contre le dopage peut, de sa propre initiative, ordonner une telle suspension provisoire à l'égard de l'intéressé. / La décision de suspension provisoire est motivée. L'intéressé est convoqué par le président de l'agence, dans les meilleurs délais, pour faire valoir ses observations sur cette mesure./ La durée de la suspension provisoire est déduite de la durée de l'interdiction de participer aux manifestations sportives que la commission des sanctions peut ultérieurement prononcer ". Aux termes de l'article L. 232-9-2 du même code : " A l'occasion des opérations de contrôle prévues aux articles L. 232-12 à L. 232-16, il est interdit : / 1° De se soustraire au prélèvement d'un échantillon ; / 2° De refuser sans justification valable, après s'être vu notifier le contrôle, de se soumettre au prélèvement d'un échantillon ; / 3° De ne pas se soumettre, intentionnellement ou par négligence, sans justification valable après s'être vu notifier le contrôle, au prélèvement d'un échantillon ".

3. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 9 avril 2019, la présidente de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), se fondant sur la circonstance que Mme A..., à l'occasion d'un contrôle antidopage diligenté par ses services à Marrakech le 27 mars, s'était enfuie lorsque les personnes chargées du contrôle s'étaient présentés à elle, et que ce fait était susceptible de constituer une violation des dispositions du 1° de l'article L. 232-9-2 du code du sport, a prononcé à son encontre une mesure de suspension provisoire applicable à l'ensemble des activités mentionnées du 1° au 4° de l'article L. 232-23-4. Saisi par MmeA..., le juge des référés du Conseil d'Etat a suspendu l'exécution de cette décision, par une ordonnance n° 429645 du 12 avril 2019, au motif que la condition d'urgence était remplie et que le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire était de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée. La présidente de l'AFLD, après avoir abrogé sa première décision, a prononcé, par une décision du 25 avril 2019, une nouvelle mesure de suspension provisoire ayant le même champ d'application. Mme A...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de son exécution.

Sur le cadre juridique du litige :

4. Aux termes de l'article L. 232-24 du code du sport : " Les parties intéressées (...) peuvent former un recours de pleine juridiction contre les décisions du collège et de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage prises en application des articles L. 232-21-1 à L. 232-23-6 à l'exclusion des actes pris en application du 16° du I de l'article L. 232-5 ". Aux termes du 16° du I de l'article L. 232-5 du même code : " Lorsque ont été commises des infractions par des sportifs de niveau international ou à l'occasion d'une manifestation sportive internationale au sens du présent titre, (l'Agence) prend, en sa seule qualité d'organisation nationale signataire du code mondial antidopage, les mesures prévues par ce code, sans disposer des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 232-21-1 à L. 232-23-6, dans des conditions qu'elle définit dans le respect des principes généraux du droit, notamment des droits de la défense en matière de sanctions ". Il résulte des dispositions combinées des articles L. 230-2 et L. 230-3 du même code qu'est un sportif de niveau international, pour l'application du titre III du livre II du code du sport, toute personne concourant dans un sport au niveau international, selon la définition qu'en donne, pour la discipline concernée, la fédération sportive internationale signataire du code mondial antidopage.

5. Il résulte de l'instruction que, s'agissant de l'athlétisme, un sportif de niveau international est défini à l'article 1-8 des règles antidopage de l'IAAF (Association internationale des fédérations d'athlétisme), comme : " (a) un athlète figurant dans le groupe-cible international d'athlètes soumis aux contrôles ; / (b) un athlète prenant part à ou disputant l'une quelconque des compétitions internationales suivantes (...) ;/ (c) un quelconque athlète dont la violation invoquée des règle antidopage résulte (i) de contrôles effectués sous l'autorité de contrôle de l'IAAF ; (ii) d'une enquête réalisée par l'IAAF ou (iii) d'une quelconque parmi les autres circonstances dans lesquelles l'IAAF jouit de l'autorité de gestion des résultats conformément à l'article 7. "

6. Il n'est pas contesté que Mme A...n'entre pas dans les prévisions du (a) ou du (c) de l'article 1-8 des règles antidopage de l'IAAF. Par ailleurs, s'il n'est pas davantage contesté que le Marathon de Paris, auquel a participé Mme A...le 14 avril 2019, figure sur la liste des compétitions internationales arrêtée par l'IAAF, il résulte de l'instruction, et notamment d'un courrier adressé à l'Agence par un directeur de l'" Athletics integrity unit ", organisme créé par l'IAAF pour lutter contre le dopage, qu'un sportif n'est considéré comme un sportif international au sens du (b) que lorsqu'il prend part à une compétition internationale au moment de l'infraction. Tel n'est pas le cas en l'espèce, le contrôle auquel il est reproché à Mme A...de s'être soustrait ayant eu lieu, ainsi qu'il est dit au point 2, le 27 mars 2019, hors compétition.

7. Il résulte de ce qui précède que le juge des référés du Conseil d'Etat n'est pas manifestement incompétent pour connaître de la présente requête.

Sur les moyens de la requête :

8. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, le moyen tiré de ce qu'aurait été applicable le 16° du I de l'article L. 232-5 et de ce que la présidente de l'AFLD ne pouvait prendre la décision contestée en se fondant sur les dispositions du code du sport qui l'investissent d'un pouvoir de contrôle et de sanction n'est pas de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité.

9. Mme A...soutient, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article L. 232-23-4 du code du sport, issues d'une ordonnance du 19 décembre 2018 non encore ratifiée, méconnaissent le principe du respect des droits de la défense en prévoyant que l'intéressé n'est mis à même de produire des observations qu'après qu'a été prononcée la mesure de suspension provisoire, ainsi que le principe de séparation des pouvoirs, dès lors que le président de l'AFLD doit être regardé comme étant à la fois un organe de poursuite et de sanction.

10. D'une part, il résulte de l'instruction que Mme A...et son conseil ont été reçus par la présidente de l'AFLD le 23 avril 2019, préalablement à l'intervention de la décision contestée, et ont pu ainsi présenter leurs observations sur la mesure envisagée. Par suite, Mme A... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que l'article L. 232-23-4 méconnaîtrait les droits de la défense.

11. D'autre part, il résulte des termes mêmes de l'article L. 232-23-4 que la mesure de suspension prononcée sur le fondement de cet article n'a qu'un caractère conservatoire, dans l'attente de la décision de la commission des sanctions. Eu égard à l'objet et à la portée d'une telle mesure, le moyen tiré de ce que la compétence donnée au président de l'AFLD pour la prononcer porterait atteinte au principe de la séparation des fonctions de poursuite et de jugement n'est pas, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux sur sa légalité.

12. En troisième lieu, ne sont pas davantage de nature à créer un tel doute, en l'état de l'instruction, et compte tenu notamment de la rédaction de la décision attaquée, les moyens tirés de ce que celle-ci ne serait pas suffisamment motivée, de ce que la présidente de l'AFLD n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de MmeA..., et de ce qu'elle aurait commis une erreur de droit en s'estimant, à tort, en situation de compétence liée.

13. En quatrième lieu, la circonstance que la publication dans certains médias d'articles consacrés à cette affaire révélerait une méconnaissance, par les services de l'AFLD, du secret professionnel est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision contestée.

14. En cinquième lieu, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que le traitement par l'AFLD du cas de Mme A...révélerait un manquement au principe d'impartialité ou un détournement de procédure.

15. En sixième lieu, s'agissant des faits qui se sont déroulés le 27 mars 2019, il résulte de l'instruction que deux agents de l'AFLD ont reçu des ordres de mission de procéder ce jour-là au Maroc à des prélèvements sanguins et urinaires sur MmeA..., l'un en tout lieu entre 16 heures et 23 heures, l'autre entre 20 heures et 21 heures au domicile que celle-ci, faisant partie du " groupe cible " des sportifs assujettis à l'obligation de transmettre leur localisation, avait préalablement indiqué. Ces deux agents étaient accompagnés du directeur du département des contrôles de l'AFLD. Les rapports établis par ces agents assermentés indiquent qu'ils ont abordé dans la rue MmeA..., le 27 mars à 17 h 55, ont décliné leur identité et la raison de leur présence, mais que celle-ci, après avoir dans un premier temps paru disposée à se prêter au contrôle, a gagné une salle de sport où se trouvait son compagnon, puis a pris la fuite en courant, avec le concours de celui-ci, et n'a pas réapparu le soir à son domicile entre 20 heures et 21 heures. Mme A...soutient, pour sa part, qu'elle a été abordée dans la rue par des personnes qui ne se sont pas prévalues de la qualité d'agents de l'AFLD, mais de celle d'agents de la police française à la recherche de son compagnon, et qui ne lui ont pas notifié leur intention d'effectuer des prélèvements. Elle indique avoir quitté les lieux car l'un de ces agents a occasionné la chute de son enfant, qu'elle a dû conduire en taxi dans une pharmacie. Elle produit des témoignages qui, selon elle, corroborent sa version des faits et souligne les incohérences dont seraient affectés les rapports établis par les agents de l'Agence française de lutte contre le dopage

16. En l'état de l'instruction, et au regard de l'ensemble des échanges écrits et oraux entre les deux parties, le moyen tiré de ce que la décision contestée reposerait sur des faits matériellement inexacts n'est pas de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité. Il en est de même du moyen tiré de ce que les faits ne pourraient être qualifiés de soustraction au prélèvement d'un échantillon, au sens et pour l'application du 1° de l'article L. 333-9-2 du code du sport.

17. En dernier lieu, Mme A...soutient que la suspension provisoire dont elle fait l'objet constituerait une sanction manifestement disproportionnée, compte tenu de ses effets tant sur sa carrière sportive que sur les contrats de sponsoring dont elle bénéficie, alors même qu'elle n'a jamais subi de contrôle positif.

18. Ainsi qu'il a été dit au point 11, la suspension est une mesure conservatoire, dans l'attente de la décision de la commission des sanctions, et ne saurait, en principe, être regardée comme une sanction. Le fait de se soustraire à des prélèvements constitue un manquement d'une particulière gravité. La participation du sportif auquel est imputé un tel manquement à des manifestations sportives ou aux autres activités mentionnées à l'article L. 232-23-4 est susceptible, en particulier si elle survient dans un bref délai, de jeter un discrédit sur celles-ci, ou, à tout le moins, de compromettre leur bonne tenue. Dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été, dès sa date d'édiction, disproportionnée, n'est pas propre, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur sa légalité.

19. En revanche, en l'absence de durée prédéterminée fixée par le législateur à la suspension provisoire, il revient au président de l'AFLD, sous le contrôle du juge administratif, de mettre un terme à la suspension, hors le cas où la loi rend celle-ci obligatoire, à compter du moment où son maintien n'apparaît plus nécessaire à la préservation des intérêts qui la justifie, le cas échéant au vu d'éléments nouveaux produits par le sportif concerné. Dans les circonstances de l'espèce, à la date de la présente ordonnance, le moyen tiré de ce que le maintien de la suspension serait disproportionné n'est toutefois pas propre, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur sa légalité.

20. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la condition d'urgence, que la requête de Mme A...doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par l'Agence française de lutte contre le dopage.




O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Agence française de lutte contre le dopage tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B...A...et à l'Agence française de lutte contre le dopage.