Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 443993, lecture du 18 septembre 2020, ECLI:FR:CEORD:2020:443993.20200918

Décision n° 443993
18 septembre 2020
Conseil d'État

N° 443993
ECLI:FR:CEORD:2020:443993.20200918
Inédit au recueil Lebon



Lecture du vendredi 18 septembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision de la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône du 2 juillet 2020 ordonnant la suspension de son agrément d'assistante maternelle pour une période de quatre mois. Par une ordonnance n° 2006308 du 25 août 2020, le juge des référés a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 20MA03396 du 10 septembre 2020, enregistrée au secrétariat du contentieux le 11 septembre 2020, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête par laquelle Mme A... demande au juge des référés, sur le fondement de l'article L. 521-2 du même code :

1°) d'annuler l'ordonnance du 25 août 2020 ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Elle soutient que :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que la décision litigieuse, qui aura pour conséquence pratique de suspendre son activité pour une année entière, lui porte un préjudice professionnel, matériel et financier ;
- la décision litigieuse porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l'industrie ainsi qu'à la liberté d'entreprendre ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation en ce qu'elle se fonde sur des affirmations qui, d'une part, sont insuffisamment précises pour justifier la suspension d'agrément et, d'autre part, ne permettent pas de prendre connaissance des faits reprochés ;
- le principe du secret de l'enquête n'est pas de nature à faire obstacle au principe du contradictoire et à ce qu'elle soit informée des faits qui lui sont reprochés ;
- il n'existe pas d'enquête ou d'instruction pénale diligentée à son encontre qui justifierait la décision litigieuse ;
- la décision litigieuse est, compte tenu de ses conséquences, injustifiée et disproportionnée.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative ;



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Il résulte de l'instruction menée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille que, par une décision du 2 juillet 2020, la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a ordonné la suspension de l'agrément d'assistante maternelle de Mme B... A... pour une période de quatre mois. Mme A... relève appel de l'ordonnance du 25 août 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de la décision du 2 juillet 2020.

3. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant maternel est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon non permanente des mineurs à son domicile. L'assistant maternel accueille des mineurs confiés par leurs parents, directement ou par l'intermédiaire d'un service d'accueil mentionné à l'article L. 2324-1 du code de la santé publique. Il exerce sa profession comme salarié de particuliers employeurs ou de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues au chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet. " Il résulte de ces dispositions législatives que l'activité d'assistant maternel ne peut être exercée que sous réserve de l'obtention d'un agrément délivré par l'autorité administrative. Les restrictions apportées en ce domaine à la liberté d'entreprendre, à la liberté du commerce et de l'industrie ou au libre exercice d'une activité professionnelle résultent de la loi elle-même. Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative fait usage, dans les conditions et pour les motifs prévus par les textes législatifs et réglementaires applicables, dont il n'est pas allégué par
Mme A... qu'ils seraient manifestement incompatibles avec les engagements européens ou internationaux de la France, ou que leur mise en oeuvre entraînerait des conséquences manifestement contraires aux exigences nées de ces engagements, de son pouvoir de retirer, suspendre ou ne pas renouveler l'agrément accordé à un assistant maternel, elle ne peut être regardée comme portant atteinte à une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative citées au 1. ci-dessus. Il suit de là que la demande présentée par Mme A... sur le fondement de ces dernières dispositions ne pouvait qu'être rejetée et que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du département des Bouches-du-Rhône qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A....
Copie en sera adressée au département des Bouches-du-Rhône.