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Ariane Web: Conseil d'État 464946, lecture du 24 octobre 2023, ECLI:FR:CECHR:2023:464946.20231024

Décision n° 464946
24 octobre 2023
Conseil d'État

N° 464946
ECLI:FR:CECHR:2023:464946.20231024
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Rémy Schwartz, président
M. Alexandre Trémolière, rapporteur
Mme Dorothée Pradines, rapporteur public
SARL LE PRADO - GILBERT, avocats


Lecture du mardi 24 octobre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

L'association " Pour une mobilité sereine et durable " (PUMSD), la fédération française des motards en colère, antenne du Var, Mme D... C..., M. H... N..., M. M... L..., M. B... J..., M. A... G..., M. E... F... et M. K... I... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'enjoindre au département du Var de supprimer ou de mettre en conformité les ralentisseurs non conformes implantés sur la voirie départementale.

Par un jugement n° 1803284 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 20MA03261 du 11 avril 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de l'association PUMSD et des autres demandeurs, annulé le jugement attaqué et rejeté les demandes présentées devant elle.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 juin 2022, 13 septembre 2022 et 29 septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Pour une mobilité sereine et durable " demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge du département du Var la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de la voirie routière ;
- le décret n° 94-447 du 27 mai 1994 ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Occhipinti, avocat de l'association " Pour une mobilité sereine et durable ", et à la SARL Le Prado-Gilbert, avocat du département du Var ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association " Pour une mobilité sereine et durable " (PUMSD), la fédération française des motards en colère, antenne du Var, Mme D... C..., M. H... N..., M. M... L..., M. B... J..., M. A... G..., M. E... F... et M. K... I... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'enjoindre au département du Var de supprimer ou de mettre en conformité les ralentisseurs non conformes implantés sur la voirie départementale. Par un jugement n° 1803284 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande. Par un arrêt du 11 avril 2022, contre lequel l'association PUMSD se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel formé par les demandeurs de première instance, annulé ce jugement et rejeté les demandes présentées devant elle.

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 mai 1994 relatif aux caractéristiques et aux conditions de réalisation des ralentisseurs de type dos d'âne ou de type trapézoïdal : " Les ralentisseurs de type dos d'âne ou de type trapézoïdal sont conformes aux normes en vigueur. / Les modalités techniques d'implantation et de signalisation des ralentisseurs de type dos d'âne ou de type trapézoïdal doivent être conformes aux règles édictées en annexe du présent décret. ". Selon l'article 2 du même décret : " A compter d'un délai de cinq ans à partir de la date de publication du présent décret, tous les ralentisseurs devront être conformes aux règles fixées ci-dessus. / Toutefois, ce délai est ramené à un an pour les ralentisseurs soit dont la hauteur est supérieure à treize centimètres, soit dont la saillie d'attaque est supérieure à deux centimètres, soit dont le rapport de la hauteur sur la longueur du profil en long est supérieur à 1/30 ".

3. Pour écarter le moyen tiré de ce que la qualification par le département du Var comme des " plateaux traversants " de la plupart des ouvrages visés par la demande de l'association requérante ne permettait pas de les exclure du champ d'application du décret du 27 mars 1994, dès lors que, quelle que soit la longueur du plateau du ralentisseur, leur profil présente la forme d'un trapèze, la cour administrative d'appel de Marseille s'est bornée à énoncer qu'il résultait de ce décret pris dans son ensemble que ses auteurs n'avaient pas entendu désigner tous les ouvrages présentant cette forme comme étant de " type trapézoïdal ", mais uniquement ceux caractérisés comme tels dans " la typologie technique propre à ces aménagements routiers ", et en a déduit que les ouvrages caractérisés comme " plateaux traversants " selon la " typologie technique usuelle " ne pouvaient par définition être qualifiés de ralentisseurs de type trapézoïdal pour l'application de ce décret. En statuant ainsi, sans se référer ni aux dispositions du décret ni à la typologie dont elle déduisait une telle exclusion, la cour administrative d'appel n'a pas mis le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a, ainsi, insuffisamment motivé son arrêt.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'association requérante est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'association requérante qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du département du Var la somme de 3 000 euros à verser à l'association requérante au titre des mêmes dispositions.


D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 11 avril 2022 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Le département du Var versera une somme de 3 000 euros à l'association " Pour une mobilité sereine et durable " au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le département du Var au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'association " Pour une mobilité sereine et durable " et au département du Var.
Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 4 octobre 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Olivier Rousselle, M. Benoît Bohnert, Mme Anne Courrèges, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 24 octobre 2023.


Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Alexandre Trémolière
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard


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