Conseil d'État
N° 494622
ECLI:FR:CECHR:2025:494622.20250703
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteure
Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique
SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS, avocats
Lecture du jeudi 3 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du maire de Saint-Forget (Yvelines) du 27 septembre 2019 leur demandant de libérer l'accès à leur propriété aux fins d'exécution d'office des travaux prescrits par son arrêté de péril du 24 juin 2016, d'ordonner le sursis à exécution des titres de recettes n° 69 du 27 septembre 2019 d'un montant de 5 621,76 euros, n° 70 du 27 septembre 2019 d'un montant de 1 013,76 euros, n° 71 du 30 septembre 2019 d'un montant de 37 756,80 euros et n° 93 du 21 octobre 2020 d'un montant de 292 681,20 euros ou, subsidiairement, de les annuler.
Par un jugement n° 1908041, 1909370 et 2008657 du 29 mars 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision et ces quatre titres exécutoires.
Par un arrêt n° 22VE01320, du 28 mars 2024, la cour administrative de Versailles a, sur appel de la commune de Saint-Forget, annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles, dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. et Mme C... tendant à la suspension des quatre titres de recettes et rejeté leurs autres demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 mai et 15 juillet 2024 et le 10 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Forget la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. C... et de Mme B... épouse C..., et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Saint-Forget ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme C... sont propriétaires d'un ensemble de parcelles sur le territoire de la commune de Saint-Forget (Yvelines), situées en contrebas d'une voie communale et séparées d'elle par un mur édifié au début du XXème siècle. A la suite de l'effondrement d'une partie du mur et de l'affaissement de la voie, le maire de Saint-Forget a, par un arrêté du 23 juin 2016, mis en demeure M. et Mme C... de remédier à la menace d'effondrement du mur en réalisant les travaux nécessaires à son confortement. Constatant l'inexécution de son arrêté, le maire a, par une lettre du 7 avril 2017, mis en demeure M. et Mme C... de réaliser les travaux prescrits sous un mois. Par une lettre du 27 septembre 2019, le maire de Saint-Forget leur a demandé de permettre sans délai l'accès à leur propriété afin de réaliser, à leurs frais, les travaux commandés par la commune pour conforter la partie non effondrée du mur et mis à leur charge ces frais par quatre titres de recettes émis les 27 et 30 septembre 2019 et 21 octobre 2020. M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 27 septembre 2019 et d'annuler les titres de recettes. Par un jugement du 29 mars 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision et ces quatre titres exécutoires. Par un arrêt du 28 mars 2024, la cour administrative de Versailles, sur appel de la commune de Saint-Forget, a annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles et rejeté les conclusions à fin d'annulation qui avaient été présentées par M. et Mme C... devant le tribunal administratif. Ces derniers se pourvoient en cassation contre cet arrêt.
2. La circonstance qu'un ouvrage n'appartienne pas à une personne publique ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse être regardé comme un ouvrage public s'il présente, avec un ouvrage public, un lien physique ou fonctionnel tel qu'il doive être regardé comme un accessoire indispensable de celui-ci.
3. Pour annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles et rejeter les conclusions de M. et Mme C... tendant à l'annulation de la décision du maire d'exécuter d'office les travaux prescrits par arrêté de péril sur leur propriété ainsi que leurs conclusions tendant à l'annulation des titres exécutoires mettant ces travaux entièrement à leur charge, la cour administrative d'appel de Versailles, qui a souverainement constaté que le mur leur appartenait, a déduit de cette circonstance que le mur ne saurait être regardé comme un ouvrage public. En statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. et Mme C... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Forget la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 28 mars 2024 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : La commune de Saint-Forget versera à M. et Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et Mme D... B..., épouse C..., ainsi qu'à la commune de Saint-Forget.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 mai 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseillers d'Etat et Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 3 juillet 2025.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Amélie Fort-Besnard
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard
N° 494622
ECLI:FR:CECHR:2025:494622.20250703
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteure
Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique
SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS, avocats
Lecture du jeudi 3 juillet 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A... C... et Mme D... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du maire de Saint-Forget (Yvelines) du 27 septembre 2019 leur demandant de libérer l'accès à leur propriété aux fins d'exécution d'office des travaux prescrits par son arrêté de péril du 24 juin 2016, d'ordonner le sursis à exécution des titres de recettes n° 69 du 27 septembre 2019 d'un montant de 5 621,76 euros, n° 70 du 27 septembre 2019 d'un montant de 1 013,76 euros, n° 71 du 30 septembre 2019 d'un montant de 37 756,80 euros et n° 93 du 21 octobre 2020 d'un montant de 292 681,20 euros ou, subsidiairement, de les annuler.
Par un jugement n° 1908041, 1909370 et 2008657 du 29 mars 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision et ces quatre titres exécutoires.
Par un arrêt n° 22VE01320, du 28 mars 2024, la cour administrative de Versailles a, sur appel de la commune de Saint-Forget, annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles, dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. et Mme C... tendant à la suspension des quatre titres de recettes et rejeté leurs autres demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 mai et 15 juillet 2024 et le 10 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Forget la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. C... et de Mme B... épouse C..., et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Saint-Forget ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme C... sont propriétaires d'un ensemble de parcelles sur le territoire de la commune de Saint-Forget (Yvelines), situées en contrebas d'une voie communale et séparées d'elle par un mur édifié au début du XXème siècle. A la suite de l'effondrement d'une partie du mur et de l'affaissement de la voie, le maire de Saint-Forget a, par un arrêté du 23 juin 2016, mis en demeure M. et Mme C... de remédier à la menace d'effondrement du mur en réalisant les travaux nécessaires à son confortement. Constatant l'inexécution de son arrêté, le maire a, par une lettre du 7 avril 2017, mis en demeure M. et Mme C... de réaliser les travaux prescrits sous un mois. Par une lettre du 27 septembre 2019, le maire de Saint-Forget leur a demandé de permettre sans délai l'accès à leur propriété afin de réaliser, à leurs frais, les travaux commandés par la commune pour conforter la partie non effondrée du mur et mis à leur charge ces frais par quatre titres de recettes émis les 27 et 30 septembre 2019 et 21 octobre 2020. M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 27 septembre 2019 et d'annuler les titres de recettes. Par un jugement du 29 mars 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision et ces quatre titres exécutoires. Par un arrêt du 28 mars 2024, la cour administrative de Versailles, sur appel de la commune de Saint-Forget, a annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles et rejeté les conclusions à fin d'annulation qui avaient été présentées par M. et Mme C... devant le tribunal administratif. Ces derniers se pourvoient en cassation contre cet arrêt.
2. La circonstance qu'un ouvrage n'appartienne pas à une personne publique ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse être regardé comme un ouvrage public s'il présente, avec un ouvrage public, un lien physique ou fonctionnel tel qu'il doive être regardé comme un accessoire indispensable de celui-ci.
3. Pour annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles et rejeter les conclusions de M. et Mme C... tendant à l'annulation de la décision du maire d'exécuter d'office les travaux prescrits par arrêté de péril sur leur propriété ainsi que leurs conclusions tendant à l'annulation des titres exécutoires mettant ces travaux entièrement à leur charge, la cour administrative d'appel de Versailles, qui a souverainement constaté que le mur leur appartenait, a déduit de cette circonstance que le mur ne saurait être regardé comme un ouvrage public. En statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. et Mme C... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Forget la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 28 mars 2024 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : La commune de Saint-Forget versera à M. et Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et Mme D... B..., épouse C..., ainsi qu'à la commune de Saint-Forget.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 mai 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseillers d'Etat et Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 3 juillet 2025.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Amélie Fort-Besnard
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard