Conseil d'État
N° 495140
ECLI:FR:CECHS:2025:495140.20250711
Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
M. Thomas Andrieu, président
M. Alexandre Lapierre , rapporteur
Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique
SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH, avocats
Lecture du vendredi 11 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) Pizz'Mania, devenue la SAS O'Pti Délices, et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 février et du 15 juin 2020 par lesquelles le maire de Villeurbanne a refusé d'autoriser cette société à installer une terrasse et une contre-terrasse sur le domaine public pour les périodes, respectivement, du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020, et d'enjoindre au maire de Villeurbanne de délivrer les autorisations sollicitées. Par un jugement n° 2006116 du 31 mai 2022, ce tribunal a annulé les décisions attaquées et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.
Par un arrêt n° 22LY02390 du 18 avril 2024, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la commune de Villeurbanne contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 26 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Villeurbanne demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la société O'Pti Délices et de M. A... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la commune de Villeurbanne et à la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société O'pti Délices (anciennenemt SAS pizza mania) et de la société Pizz'mania ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 7 mai 2019, le maire de Villeurbanne (Rhône) a accordé à la société aujourd'hui dénommée O'Pti Délices, qui exploite depuis 2009 un kiosque de restauration rapide au 57 bis place Grandclément, une autorisation temporaire d'installer au droit de ce kiosque, sur le trottoir, une terrasse de seize mètres carrés pour la période du 1er mars au 1er novembre 2019. Par un jugement du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon, sur la demande de la société O'Pti Délices et de M. A..., a annulé les décisions des 18 février et 15 juin 2020 par lesquelles le maire a refusé le renouvellement de cette autorisation pour les périodes allant respectivement du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020. La commune de Villeurbanne se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 avril 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. S'il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d'autorisations ou de conventions d'occupation temporaire du domaine public n'ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre, il appartient au gestionnaire du domaine d'examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu'elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Il peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d'intérêt général suffisant.
3. En jugeant que la commune ne justifiait pas du bien-fondé des décisions de refus litigieuses en se prévalant des diverses irrégularités commises par la société O'Pti Délices tant s'agissant de l'exploitation du kiosque lui-même, la société s'étant notamment livrée à une activité de réparation d'appareils électroniques non prévue par l'autorisation d'occupation du domaine public dont elle était titulaire, que pendant les périodes d'instruction des demandes, lors desquelles cette société a notamment installé sans autorisation une terrasse sur le domaine public, au surplus en méconnaissance des règles sanitaires en vigueur lors de l'épidémie de Covid-19, alors que le maire avait pu estimer dans ces conditions que la société ne présentait pas les garanties requises pour la meilleure utilisation possible du domaine, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce. Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit donc être annulé.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui précède, et alors en outre que la commune a produit des photographies dont il ressort que les aménagements effectués par la société O'Pti Délices ne permettaient pas la circulation normale des piétons sur le trottoir, que le maire de Villeurbanne a pu légalement refuser à la société O'Pti Délices le renouvellement de l'autorisation en litige.
6. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon s'est fondé, pour annuler ces décisions, sur ce que les motifs invoqués par le maire de Villeurbanne ne permettaient pas de justifier les refus litigieux.
7.Toutefois, il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la société O'Pti Délices et par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon.
8. Le moyen tiré par la société O'Pti Délices et par M. A... de ce que les décisions attaquées porteraient atteinte à la libre concurrence et entraîneraient une rupture d'égalité entre les commerçants n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de sa requête, que la commune de Villeurbanne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 18 février et du 15 juin 2020 par lesquelles son maire a refusé de renouveler l'autorisation sollicitée pour les périodes du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020.
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société O'Pti Délices et de M. A... la somme de 4 000 euros, à verser à la commune de Villeurbanne en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Villeurbanne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 18 avril 2024 de la cour administrative d'appel de Lyon ainsi que les articles 2 et 3 du jugement du 31 mai 2022 du tribunal administratif de Lyon sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la société O'Pti Délices et de M. A... devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation des décisions du 18 février et du 15 juin 2020 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Villeurbanne présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de la société O'Pti Délices et de M. A... présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Villeurbanne, à la société par actions simplifiée O'Pti Délices et à M. A....
N° 495140
ECLI:FR:CECHS:2025:495140.20250711
Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
M. Thomas Andrieu, président
M. Alexandre Lapierre , rapporteur
Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique
SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH, avocats
Lecture du vendredi 11 juillet 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) Pizz'Mania, devenue la SAS O'Pti Délices, et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 février et du 15 juin 2020 par lesquelles le maire de Villeurbanne a refusé d'autoriser cette société à installer une terrasse et une contre-terrasse sur le domaine public pour les périodes, respectivement, du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020, et d'enjoindre au maire de Villeurbanne de délivrer les autorisations sollicitées. Par un jugement n° 2006116 du 31 mai 2022, ce tribunal a annulé les décisions attaquées et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.
Par un arrêt n° 22LY02390 du 18 avril 2024, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la commune de Villeurbanne contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 26 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Villeurbanne demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la société O'Pti Délices et de M. A... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la commune de Villeurbanne et à la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société O'pti Délices (anciennenemt SAS pizza mania) et de la société Pizz'mania ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 7 mai 2019, le maire de Villeurbanne (Rhône) a accordé à la société aujourd'hui dénommée O'Pti Délices, qui exploite depuis 2009 un kiosque de restauration rapide au 57 bis place Grandclément, une autorisation temporaire d'installer au droit de ce kiosque, sur le trottoir, une terrasse de seize mètres carrés pour la période du 1er mars au 1er novembre 2019. Par un jugement du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon, sur la demande de la société O'Pti Délices et de M. A..., a annulé les décisions des 18 février et 15 juin 2020 par lesquelles le maire a refusé le renouvellement de cette autorisation pour les périodes allant respectivement du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020. La commune de Villeurbanne se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 avril 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. S'il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d'autorisations ou de conventions d'occupation temporaire du domaine public n'ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre, il appartient au gestionnaire du domaine d'examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu'elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Il peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d'intérêt général suffisant.
3. En jugeant que la commune ne justifiait pas du bien-fondé des décisions de refus litigieuses en se prévalant des diverses irrégularités commises par la société O'Pti Délices tant s'agissant de l'exploitation du kiosque lui-même, la société s'étant notamment livrée à une activité de réparation d'appareils électroniques non prévue par l'autorisation d'occupation du domaine public dont elle était titulaire, que pendant les périodes d'instruction des demandes, lors desquelles cette société a notamment installé sans autorisation une terrasse sur le domaine public, au surplus en méconnaissance des règles sanitaires en vigueur lors de l'épidémie de Covid-19, alors que le maire avait pu estimer dans ces conditions que la société ne présentait pas les garanties requises pour la meilleure utilisation possible du domaine, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce. Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit donc être annulé.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui précède, et alors en outre que la commune a produit des photographies dont il ressort que les aménagements effectués par la société O'Pti Délices ne permettaient pas la circulation normale des piétons sur le trottoir, que le maire de Villeurbanne a pu légalement refuser à la société O'Pti Délices le renouvellement de l'autorisation en litige.
6. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon s'est fondé, pour annuler ces décisions, sur ce que les motifs invoqués par le maire de Villeurbanne ne permettaient pas de justifier les refus litigieux.
7.Toutefois, il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la société O'Pti Délices et par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon.
8. Le moyen tiré par la société O'Pti Délices et par M. A... de ce que les décisions attaquées porteraient atteinte à la libre concurrence et entraîneraient une rupture d'égalité entre les commerçants n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de sa requête, que la commune de Villeurbanne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 18 février et du 15 juin 2020 par lesquelles son maire a refusé de renouveler l'autorisation sollicitée pour les périodes du 2 novembre 2019 au 28 février 2020 et du 1er mars au 1er novembre 2020.
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société O'Pti Délices et de M. A... la somme de 4 000 euros, à verser à la commune de Villeurbanne en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Villeurbanne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 18 avril 2024 de la cour administrative d'appel de Lyon ainsi que les articles 2 et 3 du jugement du 31 mai 2022 du tribunal administratif de Lyon sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la société O'Pti Délices et de M. A... devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation des décisions du 18 février et du 15 juin 2020 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Villeurbanne présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de la société O'Pti Délices et de M. A... présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Villeurbanne, à la société par actions simplifiée O'Pti Délices et à M. A....