Conseil d'État
N° 476209
ECLI:FR:CECHS:2025:476209.20250806
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre
Mme Yacine Seck, rapporteure
SCP GASCHIGNARD, LOISEAU, MASSIGNON, avocats
Lecture du mercredi 6 août 2025
Vu la procédure suivante :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 195 536,50 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis lors du déroulement de sa carrière et à raison de la maladie qu'il a contractée en service, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2012 pour les sommes correspondant à l'indemnisation de son préjudice de perte de revenus pour la période du 22 août 2006 au 21 août 2011 et à compter du 30 septembre 2015 pour les autres sommes, et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1606924/5-2 du 14 mars 2019, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser la somme de 31 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015, avec capitalisation des intérêts échus au 30 décembre 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Par une ordonnance n° 19PA01635 du 19 décembre 2019, le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat l'appel formé par M. C... contre ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande et l'appel incident formé par le garde des sceaux, ministre de la justice, contre ce même jugement en tant qu'il a condamné l'Etat à indemniser M. B... à hauteur de 31 000 euros.
Par une ordonnance n° 437246 du 24 janvier 2020, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application des dispositions de l'article R. 322-3 du code de justice administrative, attribué à la cour administrative d'appel de Versailles la requête de M. C....
Par un arrêt n° 20VE00367 du 12 mai 2023, la cour administrative d'appel de Versailles a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 26 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il a de contraire à son arrêt, et rejeté le surplus des conclusions de M. C... et de l'appel incident du garde des sceaux, ministre de la justice.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 juillet et 23 octobre 2023 et les 16 février et 24 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de rejeter le pourvoi incident présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code du travail ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;
- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2007-1762 du 14 décembre 2007 ;
- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Yacine Seck, auditrice,
- les conclusions de M. Cyrille Beaufils, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de M. C... et à la SCP Piwnica et Molinié, avocat du ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... C... a été nommé, à sa sortie de l'Ecole nationale d'administration, dans le corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel le 1er avril 2002 et affecté au tribunal administratif de Montpellier à compter du 1er octobre 2002. Nommé commissaire du gouvernement le 1er septembre 2003, il a été placé en congé, d'abord de longue maladie puis de longue durée, du 22 août 2006 au 21 août 2011. Par un avis du 20 juillet 2011, le comité médical du département de l'Hérault l'a déclaré définitivement inapte à la poursuite des fonctions de magistrat administratif, mais apte à exercer d'autres fonctions dans le cadre d'un reclassement à l'issue de son congé de longue durée le 21 août 2011. Par un arrêté du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu l'imputabilité au service de la maladie de M. C... à compter du 22 août 2006 et a, par un arrêté du même jour, prononcé sa réintégration au sein du corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel à compter du 22 août 2011. L'intéressé, resté sans affectation avec versement d'un plein traitement depuis le 22 août 2011, a été reclassé, par un arrêté du 30 mai 2013 du vice-président du Conseil d'Etat, sur un poste de chargé de mission au sein de la Cour nationale du droit d'asile à compter du 1er juin 2013. Après avoir été promu au grade de premier conseiller des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel par un décret du Président de la République du 23 octobre 2013, M. C... a été placé, par un arrêté du 10 février 2014 du garde des sceaux, ministre de la justice, en position de détachement dans le corps des administrateurs civils auprès de ce ministre pour une durée de deux ans, à compter du 1er février 2014. Par une demande indemnitaire du 30 décembre 2015, restée sans réponse, M. C... a sollicité du vice-président du Conseil d'Etat le versement de la somme de 1 195 536,50 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa maladie imputable au service et de son reclassement tardif. Par un jugement du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. C... la somme de 31 000 euros en réparation de divers préjudices moraux, de troubles dans les conditions d'existence et de souffrances psychiques, liés aux répercussions de sa maladie professionnelle et de la mise en congé correspondante, au retard à l'avancement au sein de son corps d'origine et au fait d'être contraint à renoncer à poursuivre une carrière dans la juridiction administrative, ainsi qu'au délai mis par l'administration à le reclasser. Par un arrêt du 12 mai 2023, la cour administrative d'appel de Versailles, faisant partiellement droit à l'appel incident du garde des sceaux, ministre de la justice, a ramené à 26 000 euros la somme que l'Etat est condamné à lui verser et a rejeté l'appel principal formé par M. C... contre ce jugement en tant qu'il avait rejeté le surplus de ses conclusions. M. B... se pourvoit en cassation contre cet arrêt, dont le garde des sceaux, ministre de la justice, demande, par la voie du pourvoi incident, l'annulation en tant qu'il l'a condamné à indemniser le préjudice résultant pour M. B... de la faute commise par l'Etat à raison de son reclassement tardif.
Sur le pourvoi principal :
En ce qui concerne le régime d'indemnisation des fonctionnaires victimes d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle :
2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que celles de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, désormais reprises à l'article L. 824-1 du code général de la fonction publique, qui instituent, en faveur des fonctionnaires de l'Etat victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique ou psychique, partielle ou totale, et permanente, d'exercer une ou plusieurs fonctions causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.
Quant à l'existence d'une faute de l'Etat de nature à engager sa responsabilité dans l'apparition de la maladie professionnelle de M. B... :
3. L'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique, dispose que : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. " L'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique précise que : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. " L'article 3 de ce même décret, dans sa rédaction applicable au litige, rappelle en outre que, notamment dans les administrations et établissements publics à caractère administratif de l'Etat, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions de ce décret, celles autrefois définies à l'ancien titre III du livre II du code de travail, dont celles figurant à son ancien article L. 230-2 et désormais inscrites, depuis le 1er mai 2008, aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 de ce code, ainsi que par les décrets pris pour leur application. Enfin, aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 230-2 du code du travail en vigueur au moment des faits en litige : " I. - Le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l'établissement, y compris les travailleurs temporaires. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. " Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de leurs agents et qu'il leur appartient à ce titre, sauf à commettre une faute de service, d'assurer la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet.
4. En premier lieu, d'une part, en vertu de l'article L. 112-5 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, dans le cadre de ses attributions en matière administrative, est chargé d'une mission permanente d'inspection à l'égard des juridictions administratives, exercée, en application de l'article R. 112-1 du même code, sous l'autorité du vice-président, par un conseiller d'Etat assisté d'autres membres, et chargée de contrôler l'organisation et le fonctionnement des juridictions. A ce titre, il appartient au président de la mission d'inspection des juridictions administratives de diligenter les enquêtes qui, au vu des informations qui lui sont communiquées, lui paraissent nécessaires. Informé de l'existence d'une situation propre à présenter un risque pour la santé des personnels au sein d'une juridiction administrative, il peut ainsi être amené, s'il l'estime justifié, à prendre l'attache du chef de la juridiction concernée afin de s'assurer de l'existence d'un tel risque et, le cas échéant, de ce que les mesures préventives et, si besoin, correctrices ont bien été prises par ce dernier au titre de ses obligations en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents placés sous son autorité. D'autre part, outre la mission d'inspection des juridictions administratives, l'organisation et la gestion de la juridiction administrative reposaient, à la date des faits en litige, sur plusieurs responsables, services et instances - dont le secrétaire général du Conseil d'Etat, le secrétaire général des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le médecin de prévention, le comité d'hygiène et de sécurité spécial des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et les agents chargés de la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité au sein de la juridiction administrative alors déployés auprès de chaque cour administrative d'appel pour l'ensemble des juridictions relevant de son ressort géographique -, ainsi que sur des organisations et représentants syndicaux. L'ensemble de ces interlocuteurs était susceptible d'être alerté sur l'existence de dysfonctionnements ou risques au sein d'une juridiction de nature à porter atteinte à la santé de ses magistrats et agents et d'y apporter une réponse, le cas échéant en sollicitant les autorités compétentes pour établir la matérialité de ces dysfonctionnements et risques et, si nécessaire, y mettre un terme.
5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le grief tiré de la carence fautive du Conseil d'Etat à ne pas avoir mis en place les actions de prévention, d'information et de formation exigées par les dispositions citées au point 3 au titre de ses obligations, en tant qu'autorité gestionnaire des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel responsable, à ce titre, de la sécurité et de la protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents de ces juridictions, notamment contre les risques psychosociaux, la cour a d'abord relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le courrier du 15 juin 2005 adressé par M. B... au président de la mission d'inspection des juridictions administratives, qui se bornait à dénoncer le fait que les nouvelles méthodes de travail instaurées au sein du tribunal administratif de Montpellier par sa présidente pour optimiser le traitement des dossiers contentieux avaient, selon lui, porté atteinte aux droits des justiciables et entamé la motivation et l'implication des personnels de la juridiction, n'avait aucunement pour objet d'alerter son destinataire sur les conséquences de ce fonctionnement sur son état de santé personnel ou sur celui des magistrats et agents de la juridiction et n'appelait pas, par conséquent, d'intervention de la part du président de la mission à cet égard. Elle a, ensuite, estimé que l'absence, à la date des faits litigieux, d'un protocole formel de prévention des risques psychosociaux au sein des juridictions administratives ne suffisait pas à caractériser, à elle seule, une méconnaissance par le Conseil d'Etat de ses obligations en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents de ces juridictions, dès lors qu'outre la saisine du président de la mission d'inspection des juridictions administratives, d'autres mécanismes d'alerte sur l'existence de tels risques, notamment par la saisine des interlocuteurs mentionnés au point précédent, étaient mobilisables au sein de la juridiction administrative. En statuant ainsi, la cour n'a pas, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, entaché son arrêt d'erreur de droit.
6. En deuxième lieu, si M. C... soutient que la cour a omis de répondre à son moyen tiré de ce que le Conseil d'Etat, en ne procédant pas, alors qu'il en avait fait expressément la demande auprès du président de la mission d'inspection des juridictions administratives par un courrier du 21 mai 2012, aux investigations qui auraient permis d'analyser les dommages qui lui avaient été causés par la maladie qu'il avait contractée en service et de déterminer les responsabilités dans la survenue des faits qui en étaient à l'origine, avait méconnu les dispositions prescrivant l'ouverture d'une telle enquête en cas d'accident de service ou de maladie professionnelle, il résulte de l'instruction que cette argumentation, laquelle n'était du reste pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ni de la référence aux dispositions instituant une telle obligation, était uniquement invoquée à l'appui des développements du requérant sur le régime d'indemnisation auquel il estimait avoir droit, de sorte que la cour n'était pas tenue d'y répondre spécifiquement.
7. En troisième lieu, le requérant soutient que, pour écarter le moyen tiré de ce que la maladie qu'il a contractée dans l'exercice de ses fonctions au tribunal administratif de Montpellier résultait du harcèlement moral dont il aurait fait l'objet de la part de la présidente de cette juridiction entre 2003 et 2006 et était à ce titre imputable à une faute de l'Etat justifiant une réparation intégrale des préjudices qui y étaient directement liés, la cour a dénaturé les pièces du dossier en estimant qu'il se bornait à reprendre en appel son argumentation de première instance sur ce point et a, en conséquence, insuffisamment motivé son arrêt et méconnu son office en adoptant les motifs retenus par le tribunal administratif de Paris aux points 5 à 10 de son jugement du 14 mars 2019. Toutefois, ces moyens ne peuvent qu'être écartés dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant n'avait fait état en appel d'aucun élément nouveau susceptible de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre dont les premiers juges n'auraient pas déjà tenu compte pour conclure, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, que les faits qu'il avait rapportés n'étaient pas, au vu des échanges contradictoires des parties, constitutifs d'une situation de harcèlement moral mais étaient justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement qui n'excédaient pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique de la présidente du tribunal administratif de Montpellier et qui tenaient notamment, selon les termes de ce jugement, à la position de confrontation et d'opposition systématiques dans laquelle M. B... s'était lui-même placé vis-à-vis de sa cheffe de juridiction au regard des objectifs légitimes de traitement des dossiers dans un délai raisonnable poursuivis par cette dernière.
8. En quatrième et dernier lieu, c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur e point, a estimé que l'accroissement de la charge de travail des magistrats, résultant de la mise en oeuvre, au sein du tribunal administratif de Montpellier, de méthodes de travail destinées à optimiser le traitement de dossiers contentieux afin de résorber le stock important d'affaires anciennes de la juridiction et de diminuer un délai de jugement pouvant atteindre pour certaines d'entre elles près de sept ans, n'avait pas manifestement excédé leurs capacités de travail, la cour se bornant, à cet égard, à relever que cet effort exceptionnel n'était pas d'une ampleur telle qu'il devait être regardé comme de nature à faire courir un danger pour leur santé. Contrairement à ce que soutient M. C..., en statuant ainsi, la cour n'a pas subordonné l'engagement de la responsabilité de l'Etat à ce titre à l'existence d'une faute lourde. Le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que la cour n'a pas, dans son appréciation de l'impact de cette charge de travail supplémentaire sur son état de santé, tenu compte des tâches que lui avait personnellement confiées sa hiérarchie, dès lors qu'en jugeant l'alourdissement de la charge de travail des magistrats compatible avec l'exigence de protection de leur santé, les juges d'appel ont implicitement mais nécessairement estimé que les objectifs de résultats assignés à chacun des magistrats de la juridiction, dont M. B..., n'étaient pas déraisonnables au regard de leur capacité individuelle de travail.
Quant aux préjudices invoqués par le requérant résultant de son placement en congé pour raison de santé de 2006 à 2011 :
9. En premier lieu, de première part, aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service, (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. " Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa version applicable au litige et dont les dispositions sont désormais reprises aux articles L. 822-2 à L. 822-4 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. /Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27/ du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. / Le fonctionnaire qui a obtenu un congé de longue maladie ne peut bénéficier d'un autre congé de cette nature, s'il n'a pas auparavant repris l'exercice de ses fonctions pendant un an ; / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée n'est attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. Tout congé attribué par la suite pour cette affection est un congé de longue durée. / Sur demande de l'intéressé, l'administration a la faculté, après avis du comité médical, de maintenir en congé de longue maladie le fonctionnaire qui peut prétendre à l'octroi d'un congé de longue durée ; / (...) ". Aux termes de l'article 63 de la même loi, dans sa version applicable au litige : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps, en exécution de l'article 26 ci-dessus et nonobstant les limites d'âge supérieures, s'ils remplissent les conditions d'ancienneté fixées par ces statuts. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le reclassement, qui est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé, peut intervenir. / Il peut être procédé au reclassement des fonctionnaires mentionnés à l'alinéa premier du présent article par la voie du détachement dans un corps de niveau équivalent ou inférieur. Dès qu'il s'est écoulé une période d'un an, les fonctionnaires détachés dans ces conditions peuvent demander leur intégration dans le corps de détachement. "
10. Il résulte de la combinaison des dispositions citées au point précédent que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emploi, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Toutefois, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui en remplit les conditions soit placé en congé de longue maladie ou en congé de longue durée, le cas échéant à l'initiative de l'administration. Il a alors droit, dans le premier cas, au maintien de son plein traitement pendant trois ans et, dans le second, au maintien de son plein traitement pendant cinq ans et à un demi-traitement pendant trois ans.
11. De deuxième part, aux termes de l'article 1er du décret du 26 août 2010, entré en vigueur le 30 août 2010, relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés, dans sa version applicable au litige : " I. - 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, aux magistrats de l'ordre judiciaire et, le cas échéant, aux agents non titulaires relevant du décret du 17 janvier 1986 susvisé est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et des articles 10, 12, 14 et 15 du décret du 17 janvier 1986 susvisé ; / 2° Les dispositions des régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent demeurent applicables ; / 3° Les dispositions qui prévoient, pour certains régimes indemnitaires spécifiques rétribuant des sujétions particulières, leur suspension à compter du remplacement de l'agent dans ses fonctions demeurent applicables. / II. - Toutefois, les agents bénéficiaires des congés mentionnés au 1° du I ne peuvent, durant ces périodes de congés, acquérir de nouveaux droits au titre des primes et indemnités non forfaitaires qui ont le caractère de remboursement de frais et au titre des primes non forfaitaires qui sont liées à l'organisation et au dépassement du cycle de travail. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le bénéfice des indemnités attachées à l'exercice des fonctions est maintenu, dans les conditions ainsi définies, aux fonctionnaires de l'Etat placés soit en congé de maladie ordinaire soit en congé à raison d'un accident de service ou d'une maladie imputable au service. Dans ce second cas, les fonctionnaires bénéficiant du maintien de l'intégralité de leur traitement en vertu des dispositions du second alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 citées au point 9, conservent également le bénéfice intégral de ces régimes indemnitaires, dans le respect, quand ceux-ci prévoient une modulation, des dispositions de ce décret.
12. De dernière part, aux termes de l'article 1er du décret du 14 décembre 2007 relatif au régime de l'indemnité de fonction des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " Il peut être alloué aux membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel une indemnité de fonction comprenant deux parts : / - une part tenant compte des responsabilités, du niveau d'expérience et des sujétions afférentes aux fonctions exercées, dite part fonctionnelle ; / - une part tenant compte des résultats obtenus et de la manière de servir, dite part individuelle. "
13. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, par un arrêté du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu l'imputabilité au service de la maladie de M. C... et requalifié les congés de longue maladie et de longue durée qui lui ont été accordés entre le 22 août 2006 et 21 août 2011 en congé pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions, régi par les dispositions du second alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, et que si M. B... a, à ce titre, bénéficié du reversement des sommes qu'il aurait dû percevoir à plein traitement du 22 août 2009 au 21 août 2011, ces sommes n'incluaient pas les parts individuelle et fonctionnelle de son indemnité de fonctions.
14. De première part, pour juger que le requérant ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 1er du décret du 26 août 2010 citées au point 11 pour réclamer le maintien de son régime indemnitaire, en complément du versement de l'intégralité de son traitement, pour la période courant à compter du 22 août 2006, la cour a rappelé sans erreur de droit qu'elles ne sont entrées en vigueur que le 30 août 2010. De deuxième part, si M. B... soutenait devant les juges d'appel que lui était dû, pour l'ensemble de la période du 22 août 2006 au 21 août 2011, le versement de l'intégralité des indemnités accessoires sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du décret du 14 mars 1986, l'invocation de ces dispositions, régissant le maintien du régime indemnitaire en cas de congé de longue durée, était inopérante dès lors que les congés de longue maladie et de longue durée qui lui ont été octroyés sur la période en cause avaient été requalifiés en congé pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions, lequel congé était régi par le second alinéa du 2° du I de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 cité au point 9. En outre, pour la période du 22 août 2006 au 29 août 2010, M. C..., qui n'a bénéficié ni d'une allocation temporaire d'invalidité, ni d'une rente viagère d'invalidité, ne pouvait prétendre, eu égard à ce qui a été dit au point 2, au titre de l'obligation du Conseil d'Etat de le garantir contre les risques encourus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle, sauf dans l'hypothèse où ces chefs de préjudice seraient directement liés à une maladie imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de son employeur. Enfin, en retenant que, pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été placé en congé de maladie imputable au service, l'indemnité de fonction prévue par l'article 1er du décret du 14 décembre 2007, destinée à rémunérer les services assurés au sein de ces juridictions et à compenser notamment les sujétions afférentes, était attachée à l'exercice effectif de fonctions, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance alléguée par le requérant que cette indemnité puisse constituer près du tiers de la rémunération des magistrats administratifs, la cour n'a pas, contrairement à ce que soutient M. C..., entaché son arrêt d'erreur de droit.
En ce qui concerne la procédure de reclassement du requérant :
15. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 2 du décret du 30 novembre 1984 relatif au reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, pris en application de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 cité au point 9, dans sa version applicable au litige : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. " Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un autre corps doit se voir proposer par l'administration plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement. L'impossibilité, pour l'administration, de proposer de tels emplois doit faire l'objet d'une décision motivée. / (...) / La procédure de reclassement telle qu'elle résulte du présent article doit être conduite au cours d'une période d'une durée maximum de trois mois à compter de la demande de l'agent ".
16. D'autre part, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade. Ainsi, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un fonctionnaire qui a été irrégulièrement maintenu sans affectation a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de son maintien illégal sans affectation. Pour déterminer l'étendue de la responsabilité de la personne publique, il est tenu compte des démarches qu'il appartient à l'intéressé d'entreprendre auprès de son administration, eu égard tant à son niveau dans la hiérarchie administrative que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans exercer aucune fonction. Dans ce cadre, sont indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause qui débute à la date d'expiration du délai raisonnable dont disposait l'administration pour lui trouver une affectation, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions.
17. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, si le requérant a adressé au vice-président du Conseil d'Etat un courrier du 25 juin 2011 sollicitant, dans l'hypothèse où ne serait pas reconnue l'imputabilité au service de sa maladie, le bénéfice des dispositions relatives au reclassement des fonctionnaires reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, il ne l'a informé que par un nouveau courrier du 13 juillet 2011 de son souhait d'être finalement reclassé, s'il était déclaré inapte à reprendre les fonctions qui étaient les siennes au sein du tribunal administratif de Montpellier, sur un autre emploi, au besoin au sein d'un autre corps. A la suite de l'avis du 20 juillet 2011 par lequel le comité médical départemental de l'Hérault a proposé la réintégration dans son corps de M. C... à compter du 22 août 2011 et précisé qu'il était définitivement inapte à ses fonctions mais restait apte à un reclassement, le vice-président du Conseil d'Etat a, par un arrêté du 10 septembre 2012, prononcé la réintégration de l'intéressé dans son corps d'origine à compter du 22 août 2011. Par un arrêté du 30 mai 2013, le vice-président du Conseil d'Etat a reclassé M. C... sur un poste de chargé de mission au sein du centre de recherche et de documentation de la Cour nationale du droit d'asile à compter du 1er juin 2013. Ainsi, M. C... a été maintenu en position d'activité sans affectation mais avec traitement du 22 août 2011 jusqu'au 30 mai 2013, soit pour une durée totale d'un an, neuf mois et huit jours, et non, contrairement à ce qu'il soutient, pour une durée de près de deux ans. En fixant à un an et demi la période de maintien de M. C... sans affectation ayant excédé le délai raisonnable dont disposait l'administration pour le reclasser, constitutive d'une faute engageant la responsabilité de l'Etat, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
18. En deuxième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que M. C... n'était pas fondé à demander l'indemnisation de la perte de revenus résultant du retard pris par l'administration pour le reclasser et tenant à l'absence de régularisation d'un demi-traitement perçu en juillet 2012 en lieu et place d'un plein traitement ainsi qu'au non-versement de son indemnité de fonction, la cour a relevé, d'une part, que l'intéressé avait bénéficié à ce titre, en novembre 2013, d'un rappel d'indemnité de 13 500 euros. M. C... n'est pas fondé à soutenir que la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en retenant que cette indemnité correspondait à un rappel dû au titre de la période pendant laquelle il devait être regardé comme ayant été indument maintenu en position d'activité sans affectation, alors qu'elle correspondait à l'indemnité de fonction qui lui était due au titre de l'année 2013 à raison de ses fonctions de magistrat des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel détaché comme chargé de mission auprès de la Cour nationale du droit d'asile, le document attestant de la nature de cette somme n'ayant été versé à l'instruction pour la première fois par M. C... qu'à l'appui de son pourvoi en cassation. D'autre part, si la cour a également relevé qu'il ne justifiait pas des primes et indemnités dont il bénéficiait dans le cadre de son détachement sur un emploi d'administrateur civil ce qui ne permettait pas de déterminer la différence entre la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre en l'absence de retard pris par l'administration pour le reclasser et celle qu'il a effectivement perçue, ce motif, qui présente un caractère surabondant, ne saurait davantage être utilement critiqué en cassation. Enfin, c'est par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation que la cour a relevé, au vu des pièces du dossier qui lui était soumis, que la rémunération de M. B... pour le mois de juillet 2012 avait bien été assurée à plein traitement.
19. En troisième et dernier lieu, le fonctionnaire maintenu en position d'activité, sans pour autant être affecté sur un emploi correspondant à son grade, et qui, en dépit de l'absence d'accomplissement de services effectifs, continue de percevoir son traitement conserve à ce titre ses droits à l'avancement. L'absence de reclassement de M. C... dans un délai raisonnable à compter de sa réintégration dans son corps d'origine est ainsi restée sans incidence sur les possibilités d'avancement dont l'intéressé a continué à bénéficier au cours de la période pendant laquelle, à la suite de cette réintégration, il a été maintenu en position d'activité sans affectation avec versement de son traitement. Dès lors, c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation et sans erreur de droit que la cour a jugé que n'était pas établie, en l'espèce, l'existence d'un lien de causalité entre la faute que l'administration a commise en tardant à reclasser M. C... et le fait qu'il n'a pas été promu au grade de premier conseiller avant le 1er décembre 2013.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que présente le garde des sceaux, ministre de la justice, au même titre.
Sur le pourvoi incident :
21. En se bornant à soutenir que le délai de plus d'un an mis en l'espèce par l'administration pour procéder au reclassement de l'intéressé ne présente pas un caractère fautif en raison de la rareté des vacances de postes hors contentieux dans le corps dont il relève, le garde des sceaux, ministre de la justice, ne justifie pas des raisons qui expliquent ce délai de reclassement excessif, alors au demeurant que M. C... fait état de recherches de possibilités de reclassement qu'il a lui-même initiées à compter de mai 2012. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que le délai déraisonnable mis par l'administration à reclasser M. B... constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à son égard.
22. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident du garde des sceaux, ministre de la justice, doit être rejeté.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi principal de M. C... et le pourvoi incident du garde des sceaux, ministre de la justice, sont rejetés.
Article 2 : Les conclusions présentées par le garde des sceaux, ministre de la justice, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie en sera adressée au secrétariat général du Conseil d'Etat.
N° 476209
ECLI:FR:CECHS:2025:476209.20250806
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre
Mme Yacine Seck, rapporteure
SCP GASCHIGNARD, LOISEAU, MASSIGNON, avocats
Lecture du mercredi 6 août 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 195 536,50 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis lors du déroulement de sa carrière et à raison de la maladie qu'il a contractée en service, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2012 pour les sommes correspondant à l'indemnisation de son préjudice de perte de revenus pour la période du 22 août 2006 au 21 août 2011 et à compter du 30 septembre 2015 pour les autres sommes, et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1606924/5-2 du 14 mars 2019, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser la somme de 31 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015, avec capitalisation des intérêts échus au 30 décembre 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Par une ordonnance n° 19PA01635 du 19 décembre 2019, le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat l'appel formé par M. C... contre ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande et l'appel incident formé par le garde des sceaux, ministre de la justice, contre ce même jugement en tant qu'il a condamné l'Etat à indemniser M. B... à hauteur de 31 000 euros.
Par une ordonnance n° 437246 du 24 janvier 2020, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application des dispositions de l'article R. 322-3 du code de justice administrative, attribué à la cour administrative d'appel de Versailles la requête de M. C....
Par un arrêt n° 20VE00367 du 12 mai 2023, la cour administrative d'appel de Versailles a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 26 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il a de contraire à son arrêt, et rejeté le surplus des conclusions de M. C... et de l'appel incident du garde des sceaux, ministre de la justice.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 juillet et 23 octobre 2023 et les 16 février et 24 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de rejeter le pourvoi incident présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code du travail ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;
- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2007-1762 du 14 décembre 2007 ;
- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Yacine Seck, auditrice,
- les conclusions de M. Cyrille Beaufils, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de M. C... et à la SCP Piwnica et Molinié, avocat du ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... C... a été nommé, à sa sortie de l'Ecole nationale d'administration, dans le corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel le 1er avril 2002 et affecté au tribunal administratif de Montpellier à compter du 1er octobre 2002. Nommé commissaire du gouvernement le 1er septembre 2003, il a été placé en congé, d'abord de longue maladie puis de longue durée, du 22 août 2006 au 21 août 2011. Par un avis du 20 juillet 2011, le comité médical du département de l'Hérault l'a déclaré définitivement inapte à la poursuite des fonctions de magistrat administratif, mais apte à exercer d'autres fonctions dans le cadre d'un reclassement à l'issue de son congé de longue durée le 21 août 2011. Par un arrêté du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu l'imputabilité au service de la maladie de M. C... à compter du 22 août 2006 et a, par un arrêté du même jour, prononcé sa réintégration au sein du corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel à compter du 22 août 2011. L'intéressé, resté sans affectation avec versement d'un plein traitement depuis le 22 août 2011, a été reclassé, par un arrêté du 30 mai 2013 du vice-président du Conseil d'Etat, sur un poste de chargé de mission au sein de la Cour nationale du droit d'asile à compter du 1er juin 2013. Après avoir été promu au grade de premier conseiller des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel par un décret du Président de la République du 23 octobre 2013, M. C... a été placé, par un arrêté du 10 février 2014 du garde des sceaux, ministre de la justice, en position de détachement dans le corps des administrateurs civils auprès de ce ministre pour une durée de deux ans, à compter du 1er février 2014. Par une demande indemnitaire du 30 décembre 2015, restée sans réponse, M. C... a sollicité du vice-président du Conseil d'Etat le versement de la somme de 1 195 536,50 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa maladie imputable au service et de son reclassement tardif. Par un jugement du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. C... la somme de 31 000 euros en réparation de divers préjudices moraux, de troubles dans les conditions d'existence et de souffrances psychiques, liés aux répercussions de sa maladie professionnelle et de la mise en congé correspondante, au retard à l'avancement au sein de son corps d'origine et au fait d'être contraint à renoncer à poursuivre une carrière dans la juridiction administrative, ainsi qu'au délai mis par l'administration à le reclasser. Par un arrêt du 12 mai 2023, la cour administrative d'appel de Versailles, faisant partiellement droit à l'appel incident du garde des sceaux, ministre de la justice, a ramené à 26 000 euros la somme que l'Etat est condamné à lui verser et a rejeté l'appel principal formé par M. C... contre ce jugement en tant qu'il avait rejeté le surplus de ses conclusions. M. B... se pourvoit en cassation contre cet arrêt, dont le garde des sceaux, ministre de la justice, demande, par la voie du pourvoi incident, l'annulation en tant qu'il l'a condamné à indemniser le préjudice résultant pour M. B... de la faute commise par l'Etat à raison de son reclassement tardif.
Sur le pourvoi principal :
En ce qui concerne le régime d'indemnisation des fonctionnaires victimes d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle :
2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que celles de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, désormais reprises à l'article L. 824-1 du code général de la fonction publique, qui instituent, en faveur des fonctionnaires de l'Etat victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique ou psychique, partielle ou totale, et permanente, d'exercer une ou plusieurs fonctions causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.
Quant à l'existence d'une faute de l'Etat de nature à engager sa responsabilité dans l'apparition de la maladie professionnelle de M. B... :
3. L'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique, dispose que : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. " L'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique précise que : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. " L'article 3 de ce même décret, dans sa rédaction applicable au litige, rappelle en outre que, notamment dans les administrations et établissements publics à caractère administratif de l'Etat, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions de ce décret, celles autrefois définies à l'ancien titre III du livre II du code de travail, dont celles figurant à son ancien article L. 230-2 et désormais inscrites, depuis le 1er mai 2008, aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 de ce code, ainsi que par les décrets pris pour leur application. Enfin, aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 230-2 du code du travail en vigueur au moment des faits en litige : " I. - Le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l'établissement, y compris les travailleurs temporaires. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. " Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de leurs agents et qu'il leur appartient à ce titre, sauf à commettre une faute de service, d'assurer la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet.
4. En premier lieu, d'une part, en vertu de l'article L. 112-5 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, dans le cadre de ses attributions en matière administrative, est chargé d'une mission permanente d'inspection à l'égard des juridictions administratives, exercée, en application de l'article R. 112-1 du même code, sous l'autorité du vice-président, par un conseiller d'Etat assisté d'autres membres, et chargée de contrôler l'organisation et le fonctionnement des juridictions. A ce titre, il appartient au président de la mission d'inspection des juridictions administratives de diligenter les enquêtes qui, au vu des informations qui lui sont communiquées, lui paraissent nécessaires. Informé de l'existence d'une situation propre à présenter un risque pour la santé des personnels au sein d'une juridiction administrative, il peut ainsi être amené, s'il l'estime justifié, à prendre l'attache du chef de la juridiction concernée afin de s'assurer de l'existence d'un tel risque et, le cas échéant, de ce que les mesures préventives et, si besoin, correctrices ont bien été prises par ce dernier au titre de ses obligations en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents placés sous son autorité. D'autre part, outre la mission d'inspection des juridictions administratives, l'organisation et la gestion de la juridiction administrative reposaient, à la date des faits en litige, sur plusieurs responsables, services et instances - dont le secrétaire général du Conseil d'Etat, le secrétaire général des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le médecin de prévention, le comité d'hygiène et de sécurité spécial des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et les agents chargés de la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité au sein de la juridiction administrative alors déployés auprès de chaque cour administrative d'appel pour l'ensemble des juridictions relevant de son ressort géographique -, ainsi que sur des organisations et représentants syndicaux. L'ensemble de ces interlocuteurs était susceptible d'être alerté sur l'existence de dysfonctionnements ou risques au sein d'une juridiction de nature à porter atteinte à la santé de ses magistrats et agents et d'y apporter une réponse, le cas échéant en sollicitant les autorités compétentes pour établir la matérialité de ces dysfonctionnements et risques et, si nécessaire, y mettre un terme.
5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le grief tiré de la carence fautive du Conseil d'Etat à ne pas avoir mis en place les actions de prévention, d'information et de formation exigées par les dispositions citées au point 3 au titre de ses obligations, en tant qu'autorité gestionnaire des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel responsable, à ce titre, de la sécurité et de la protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents de ces juridictions, notamment contre les risques psychosociaux, la cour a d'abord relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le courrier du 15 juin 2005 adressé par M. B... au président de la mission d'inspection des juridictions administratives, qui se bornait à dénoncer le fait que les nouvelles méthodes de travail instaurées au sein du tribunal administratif de Montpellier par sa présidente pour optimiser le traitement des dossiers contentieux avaient, selon lui, porté atteinte aux droits des justiciables et entamé la motivation et l'implication des personnels de la juridiction, n'avait aucunement pour objet d'alerter son destinataire sur les conséquences de ce fonctionnement sur son état de santé personnel ou sur celui des magistrats et agents de la juridiction et n'appelait pas, par conséquent, d'intervention de la part du président de la mission à cet égard. Elle a, ensuite, estimé que l'absence, à la date des faits litigieux, d'un protocole formel de prévention des risques psychosociaux au sein des juridictions administratives ne suffisait pas à caractériser, à elle seule, une méconnaissance par le Conseil d'Etat de ses obligations en matière de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des magistrats et agents de ces juridictions, dès lors qu'outre la saisine du président de la mission d'inspection des juridictions administratives, d'autres mécanismes d'alerte sur l'existence de tels risques, notamment par la saisine des interlocuteurs mentionnés au point précédent, étaient mobilisables au sein de la juridiction administrative. En statuant ainsi, la cour n'a pas, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, entaché son arrêt d'erreur de droit.
6. En deuxième lieu, si M. C... soutient que la cour a omis de répondre à son moyen tiré de ce que le Conseil d'Etat, en ne procédant pas, alors qu'il en avait fait expressément la demande auprès du président de la mission d'inspection des juridictions administratives par un courrier du 21 mai 2012, aux investigations qui auraient permis d'analyser les dommages qui lui avaient été causés par la maladie qu'il avait contractée en service et de déterminer les responsabilités dans la survenue des faits qui en étaient à l'origine, avait méconnu les dispositions prescrivant l'ouverture d'une telle enquête en cas d'accident de service ou de maladie professionnelle, il résulte de l'instruction que cette argumentation, laquelle n'était du reste pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ni de la référence aux dispositions instituant une telle obligation, était uniquement invoquée à l'appui des développements du requérant sur le régime d'indemnisation auquel il estimait avoir droit, de sorte que la cour n'était pas tenue d'y répondre spécifiquement.
7. En troisième lieu, le requérant soutient que, pour écarter le moyen tiré de ce que la maladie qu'il a contractée dans l'exercice de ses fonctions au tribunal administratif de Montpellier résultait du harcèlement moral dont il aurait fait l'objet de la part de la présidente de cette juridiction entre 2003 et 2006 et était à ce titre imputable à une faute de l'Etat justifiant une réparation intégrale des préjudices qui y étaient directement liés, la cour a dénaturé les pièces du dossier en estimant qu'il se bornait à reprendre en appel son argumentation de première instance sur ce point et a, en conséquence, insuffisamment motivé son arrêt et méconnu son office en adoptant les motifs retenus par le tribunal administratif de Paris aux points 5 à 10 de son jugement du 14 mars 2019. Toutefois, ces moyens ne peuvent qu'être écartés dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant n'avait fait état en appel d'aucun élément nouveau susceptible de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre dont les premiers juges n'auraient pas déjà tenu compte pour conclure, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, que les faits qu'il avait rapportés n'étaient pas, au vu des échanges contradictoires des parties, constitutifs d'une situation de harcèlement moral mais étaient justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement qui n'excédaient pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique de la présidente du tribunal administratif de Montpellier et qui tenaient notamment, selon les termes de ce jugement, à la position de confrontation et d'opposition systématiques dans laquelle M. B... s'était lui-même placé vis-à-vis de sa cheffe de juridiction au regard des objectifs légitimes de traitement des dossiers dans un délai raisonnable poursuivis par cette dernière.
8. En quatrième et dernier lieu, c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur e point, a estimé que l'accroissement de la charge de travail des magistrats, résultant de la mise en oeuvre, au sein du tribunal administratif de Montpellier, de méthodes de travail destinées à optimiser le traitement de dossiers contentieux afin de résorber le stock important d'affaires anciennes de la juridiction et de diminuer un délai de jugement pouvant atteindre pour certaines d'entre elles près de sept ans, n'avait pas manifestement excédé leurs capacités de travail, la cour se bornant, à cet égard, à relever que cet effort exceptionnel n'était pas d'une ampleur telle qu'il devait être regardé comme de nature à faire courir un danger pour leur santé. Contrairement à ce que soutient M. C..., en statuant ainsi, la cour n'a pas subordonné l'engagement de la responsabilité de l'Etat à ce titre à l'existence d'une faute lourde. Le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que la cour n'a pas, dans son appréciation de l'impact de cette charge de travail supplémentaire sur son état de santé, tenu compte des tâches que lui avait personnellement confiées sa hiérarchie, dès lors qu'en jugeant l'alourdissement de la charge de travail des magistrats compatible avec l'exigence de protection de leur santé, les juges d'appel ont implicitement mais nécessairement estimé que les objectifs de résultats assignés à chacun des magistrats de la juridiction, dont M. B..., n'étaient pas déraisonnables au regard de leur capacité individuelle de travail.
Quant aux préjudices invoqués par le requérant résultant de son placement en congé pour raison de santé de 2006 à 2011 :
9. En premier lieu, de première part, aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service, (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. " Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa version applicable au litige et dont les dispositions sont désormais reprises aux articles L. 822-2 à L. 822-4 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. /Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27/ du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. / Le fonctionnaire qui a obtenu un congé de longue maladie ne peut bénéficier d'un autre congé de cette nature, s'il n'a pas auparavant repris l'exercice de ses fonctions pendant un an ; / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée n'est attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. Tout congé attribué par la suite pour cette affection est un congé de longue durée. / Sur demande de l'intéressé, l'administration a la faculté, après avis du comité médical, de maintenir en congé de longue maladie le fonctionnaire qui peut prétendre à l'octroi d'un congé de longue durée ; / (...) ". Aux termes de l'article 63 de la même loi, dans sa version applicable au litige : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps, en exécution de l'article 26 ci-dessus et nonobstant les limites d'âge supérieures, s'ils remplissent les conditions d'ancienneté fixées par ces statuts. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le reclassement, qui est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé, peut intervenir. / Il peut être procédé au reclassement des fonctionnaires mentionnés à l'alinéa premier du présent article par la voie du détachement dans un corps de niveau équivalent ou inférieur. Dès qu'il s'est écoulé une période d'un an, les fonctionnaires détachés dans ces conditions peuvent demander leur intégration dans le corps de détachement. "
10. Il résulte de la combinaison des dispositions citées au point précédent que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emploi, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Toutefois, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui en remplit les conditions soit placé en congé de longue maladie ou en congé de longue durée, le cas échéant à l'initiative de l'administration. Il a alors droit, dans le premier cas, au maintien de son plein traitement pendant trois ans et, dans le second, au maintien de son plein traitement pendant cinq ans et à un demi-traitement pendant trois ans.
11. De deuxième part, aux termes de l'article 1er du décret du 26 août 2010, entré en vigueur le 30 août 2010, relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés, dans sa version applicable au litige : " I. - 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, aux magistrats de l'ordre judiciaire et, le cas échéant, aux agents non titulaires relevant du décret du 17 janvier 1986 susvisé est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et des articles 10, 12, 14 et 15 du décret du 17 janvier 1986 susvisé ; / 2° Les dispositions des régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent demeurent applicables ; / 3° Les dispositions qui prévoient, pour certains régimes indemnitaires spécifiques rétribuant des sujétions particulières, leur suspension à compter du remplacement de l'agent dans ses fonctions demeurent applicables. / II. - Toutefois, les agents bénéficiaires des congés mentionnés au 1° du I ne peuvent, durant ces périodes de congés, acquérir de nouveaux droits au titre des primes et indemnités non forfaitaires qui ont le caractère de remboursement de frais et au titre des primes non forfaitaires qui sont liées à l'organisation et au dépassement du cycle de travail. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le bénéfice des indemnités attachées à l'exercice des fonctions est maintenu, dans les conditions ainsi définies, aux fonctionnaires de l'Etat placés soit en congé de maladie ordinaire soit en congé à raison d'un accident de service ou d'une maladie imputable au service. Dans ce second cas, les fonctionnaires bénéficiant du maintien de l'intégralité de leur traitement en vertu des dispositions du second alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 citées au point 9, conservent également le bénéfice intégral de ces régimes indemnitaires, dans le respect, quand ceux-ci prévoient une modulation, des dispositions de ce décret.
12. De dernière part, aux termes de l'article 1er du décret du 14 décembre 2007 relatif au régime de l'indemnité de fonction des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " Il peut être alloué aux membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel une indemnité de fonction comprenant deux parts : / - une part tenant compte des responsabilités, du niveau d'expérience et des sujétions afférentes aux fonctions exercées, dite part fonctionnelle ; / - une part tenant compte des résultats obtenus et de la manière de servir, dite part individuelle. "
13. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, par un arrêté du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu l'imputabilité au service de la maladie de M. C... et requalifié les congés de longue maladie et de longue durée qui lui ont été accordés entre le 22 août 2006 et 21 août 2011 en congé pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions, régi par les dispositions du second alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, et que si M. B... a, à ce titre, bénéficié du reversement des sommes qu'il aurait dû percevoir à plein traitement du 22 août 2009 au 21 août 2011, ces sommes n'incluaient pas les parts individuelle et fonctionnelle de son indemnité de fonctions.
14. De première part, pour juger que le requérant ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 1er du décret du 26 août 2010 citées au point 11 pour réclamer le maintien de son régime indemnitaire, en complément du versement de l'intégralité de son traitement, pour la période courant à compter du 22 août 2006, la cour a rappelé sans erreur de droit qu'elles ne sont entrées en vigueur que le 30 août 2010. De deuxième part, si M. B... soutenait devant les juges d'appel que lui était dû, pour l'ensemble de la période du 22 août 2006 au 21 août 2011, le versement de l'intégralité des indemnités accessoires sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du décret du 14 mars 1986, l'invocation de ces dispositions, régissant le maintien du régime indemnitaire en cas de congé de longue durée, était inopérante dès lors que les congés de longue maladie et de longue durée qui lui ont été octroyés sur la période en cause avaient été requalifiés en congé pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions, lequel congé était régi par le second alinéa du 2° du I de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 cité au point 9. En outre, pour la période du 22 août 2006 au 29 août 2010, M. C..., qui n'a bénéficié ni d'une allocation temporaire d'invalidité, ni d'une rente viagère d'invalidité, ne pouvait prétendre, eu égard à ce qui a été dit au point 2, au titre de l'obligation du Conseil d'Etat de le garantir contre les risques encourus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle, sauf dans l'hypothèse où ces chefs de préjudice seraient directement liés à une maladie imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de son employeur. Enfin, en retenant que, pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été placé en congé de maladie imputable au service, l'indemnité de fonction prévue par l'article 1er du décret du 14 décembre 2007, destinée à rémunérer les services assurés au sein de ces juridictions et à compenser notamment les sujétions afférentes, était attachée à l'exercice effectif de fonctions, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance alléguée par le requérant que cette indemnité puisse constituer près du tiers de la rémunération des magistrats administratifs, la cour n'a pas, contrairement à ce que soutient M. C..., entaché son arrêt d'erreur de droit.
En ce qui concerne la procédure de reclassement du requérant :
15. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 2 du décret du 30 novembre 1984 relatif au reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, pris en application de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 cité au point 9, dans sa version applicable au litige : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. " Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un autre corps doit se voir proposer par l'administration plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement. L'impossibilité, pour l'administration, de proposer de tels emplois doit faire l'objet d'une décision motivée. / (...) / La procédure de reclassement telle qu'elle résulte du présent article doit être conduite au cours d'une période d'une durée maximum de trois mois à compter de la demande de l'agent ".
16. D'autre part, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade. Ainsi, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un fonctionnaire qui a été irrégulièrement maintenu sans affectation a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de son maintien illégal sans affectation. Pour déterminer l'étendue de la responsabilité de la personne publique, il est tenu compte des démarches qu'il appartient à l'intéressé d'entreprendre auprès de son administration, eu égard tant à son niveau dans la hiérarchie administrative que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans exercer aucune fonction. Dans ce cadre, sont indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause qui débute à la date d'expiration du délai raisonnable dont disposait l'administration pour lui trouver une affectation, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions.
17. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, si le requérant a adressé au vice-président du Conseil d'Etat un courrier du 25 juin 2011 sollicitant, dans l'hypothèse où ne serait pas reconnue l'imputabilité au service de sa maladie, le bénéfice des dispositions relatives au reclassement des fonctionnaires reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, il ne l'a informé que par un nouveau courrier du 13 juillet 2011 de son souhait d'être finalement reclassé, s'il était déclaré inapte à reprendre les fonctions qui étaient les siennes au sein du tribunal administratif de Montpellier, sur un autre emploi, au besoin au sein d'un autre corps. A la suite de l'avis du 20 juillet 2011 par lequel le comité médical départemental de l'Hérault a proposé la réintégration dans son corps de M. C... à compter du 22 août 2011 et précisé qu'il était définitivement inapte à ses fonctions mais restait apte à un reclassement, le vice-président du Conseil d'Etat a, par un arrêté du 10 septembre 2012, prononcé la réintégration de l'intéressé dans son corps d'origine à compter du 22 août 2011. Par un arrêté du 30 mai 2013, le vice-président du Conseil d'Etat a reclassé M. C... sur un poste de chargé de mission au sein du centre de recherche et de documentation de la Cour nationale du droit d'asile à compter du 1er juin 2013. Ainsi, M. C... a été maintenu en position d'activité sans affectation mais avec traitement du 22 août 2011 jusqu'au 30 mai 2013, soit pour une durée totale d'un an, neuf mois et huit jours, et non, contrairement à ce qu'il soutient, pour une durée de près de deux ans. En fixant à un an et demi la période de maintien de M. C... sans affectation ayant excédé le délai raisonnable dont disposait l'administration pour le reclasser, constitutive d'une faute engageant la responsabilité de l'Etat, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
18. En deuxième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que M. C... n'était pas fondé à demander l'indemnisation de la perte de revenus résultant du retard pris par l'administration pour le reclasser et tenant à l'absence de régularisation d'un demi-traitement perçu en juillet 2012 en lieu et place d'un plein traitement ainsi qu'au non-versement de son indemnité de fonction, la cour a relevé, d'une part, que l'intéressé avait bénéficié à ce titre, en novembre 2013, d'un rappel d'indemnité de 13 500 euros. M. C... n'est pas fondé à soutenir que la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en retenant que cette indemnité correspondait à un rappel dû au titre de la période pendant laquelle il devait être regardé comme ayant été indument maintenu en position d'activité sans affectation, alors qu'elle correspondait à l'indemnité de fonction qui lui était due au titre de l'année 2013 à raison de ses fonctions de magistrat des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel détaché comme chargé de mission auprès de la Cour nationale du droit d'asile, le document attestant de la nature de cette somme n'ayant été versé à l'instruction pour la première fois par M. C... qu'à l'appui de son pourvoi en cassation. D'autre part, si la cour a également relevé qu'il ne justifiait pas des primes et indemnités dont il bénéficiait dans le cadre de son détachement sur un emploi d'administrateur civil ce qui ne permettait pas de déterminer la différence entre la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre en l'absence de retard pris par l'administration pour le reclasser et celle qu'il a effectivement perçue, ce motif, qui présente un caractère surabondant, ne saurait davantage être utilement critiqué en cassation. Enfin, c'est par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation que la cour a relevé, au vu des pièces du dossier qui lui était soumis, que la rémunération de M. B... pour le mois de juillet 2012 avait bien été assurée à plein traitement.
19. En troisième et dernier lieu, le fonctionnaire maintenu en position d'activité, sans pour autant être affecté sur un emploi correspondant à son grade, et qui, en dépit de l'absence d'accomplissement de services effectifs, continue de percevoir son traitement conserve à ce titre ses droits à l'avancement. L'absence de reclassement de M. C... dans un délai raisonnable à compter de sa réintégration dans son corps d'origine est ainsi restée sans incidence sur les possibilités d'avancement dont l'intéressé a continué à bénéficier au cours de la période pendant laquelle, à la suite de cette réintégration, il a été maintenu en position d'activité sans affectation avec versement de son traitement. Dès lors, c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation et sans erreur de droit que la cour a jugé que n'était pas établie, en l'espèce, l'existence d'un lien de causalité entre la faute que l'administration a commise en tardant à reclasser M. C... et le fait qu'il n'a pas été promu au grade de premier conseiller avant le 1er décembre 2013.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que présente le garde des sceaux, ministre de la justice, au même titre.
Sur le pourvoi incident :
21. En se bornant à soutenir que le délai de plus d'un an mis en l'espèce par l'administration pour procéder au reclassement de l'intéressé ne présente pas un caractère fautif en raison de la rareté des vacances de postes hors contentieux dans le corps dont il relève, le garde des sceaux, ministre de la justice, ne justifie pas des raisons qui expliquent ce délai de reclassement excessif, alors au demeurant que M. C... fait état de recherches de possibilités de reclassement qu'il a lui-même initiées à compter de mai 2012. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que le délai déraisonnable mis par l'administration à reclasser M. B... constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à son égard.
22. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident du garde des sceaux, ministre de la justice, doit être rejeté.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi principal de M. C... et le pourvoi incident du garde des sceaux, ministre de la justice, sont rejetés.
Article 2 : Les conclusions présentées par le garde des sceaux, ministre de la justice, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie en sera adressée au secrétariat général du Conseil d'Etat.