Conseil d'État
N° 507950
ECLI:FR:CEORD:2025:507950.20250912
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO & GOULET, avocats
Lecture du vendredi 12 septembre 2025
Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de constater la violation manifeste de la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021, en deuxième lieu, d'ordonner au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de remettre, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance, l'attestation employeur officielle mentionnant l'octroi d'une rémunération annuelle brute respectant le plancher européen obligatoire égal au salaire annuel brut moyen français et la durée d'un contrat de 24 mois correspondant à un parcours de consolidation des compétences, en troisième lieu, d'ordonner la transmission de cette pièce au consulat général de France au Maroc et à TLS contact Casablanca, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en quatrième lieu, à titre subsidiaire, d'ordonner au même établissement, selon les mêmes conditions, de remettre l'attestation employeur officielle mentionnant une rémunération annuelle brute de 41 386, 48 euros et, en dernier lieu, d'ordonner la saisine du conseil national de gestion en vue de sa réaffectation à l'hôpital Nord de Marseille et la transmission du dossier à la direction générale de l'offre de soins. Par une ordonnance n° 2510043 du 25 août 2025, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Par une requête, enregistrée le 5 septembre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'enjoindre au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de délivrer, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, l'attestation employeur officielle mentionnant une rémunération annuelle brute correspondant au 2ème échelon des praticiens associés ainsi qu'une durée de 24 mois correspondant au parcours de consolidation des compétences ;
3°) d'enjoindre la transmission directe et immédiate de cette attestation au consulat général de France à Casablanca, à TLS contact Casablanca et à elle-même par courrier électronique, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'ordonner la saisine du centre national de gestion pour réaffectation au service d'accueil des urgences adultes de l'hôpital Nord de Marseille ;
5°) de mettre à la charge des parties perdantes la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite, dès lors qu'elle se trouve, en l'absence de titre de séjour approprié, bloquée au Maroc où elle a démissionné de son poste et que le refus du centre hospitalier d'attester d'un niveau de rémunération correspondant aux exigences posées par l'article R. 421-25-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'empêche de bénéficier du seul titre de séjour approprié à sa situation, c'est-à-dire le titre " talent - profession médicale et de la pharmacie " qui lui permettrait de rejoindre la France afin d'y entamer son parcours de consolidation des compétences et de retrouver son compagnon dont elle est éloignée ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de sa vie privée et familiale, au droit d'exercer un emploi et à la liberté d'aller et venir ;
- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a considéré qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la méconnaissance de la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021, alors que le refus du centre hospitalier d'Arles de lui délivrer l'attestation employeur mentionnant une rémunération annuelle brute respectant les exigences posées par cette directive constitue une méconnaissance manifeste du droit de l'Union européenne de nature à justifier que le juge des référés prenne des mesures afin d'en garantir le respect ;
- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a considéré que le centre hospitalier pouvait refuser de délivrer une attestation justifiant d'une rémunération annuelle brute principale d'au moins 41 386, 48 euros, alors, d'une part, que les dispositions de l'article R. 6152-911 code de la santé publique ne font pas obstacle à son classement, dès la première année, au deuxième échelon de rémunération et, d'autre part, que la délivrance d'une telle attestation constitue une nécessité s'agissant d'un praticien diplômé hors Union européenne ayant réussi les épreuves de vérification des connaissances et qui entre dès lors dans le champ d'application du titre de séjour " talent - profession médicale et de la pharmacie ".
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n°2025-539 du 13 juin 2025 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, créé par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration : " L'étranger qui bénéficie d'une décision d'affectation, d'une attestation permettant un exercice temporaire ou d'une autorisation d'exercer mentionnées aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique, qui occupe un emploi au titre d'une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-12-1 du même code et qui justifie du respect d'un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d'Etat se voit délivrer une carte pluriannuelle portant la mention " talent-profession médicale et de la pharmacie " d'une durée maximale de quatre ans, sous réserve de la signature de la charte des valeurs de la République et du principe de laïcité. /La carte mentionnée au premier alinéa du présent article permet l'exercice de l'activité professionnelle ayant justifié sa délivrance. " L'article R. 421-25-1 du même code, créé par le décret n° 2025-539 du 13 juin 2025 relatif aux cartes de séjour " talent " et modifiant certaines dispositions relatives aux cartes de séjour " recherche d'emploi-création d'entreprise " et " entrepreneur et profession libérale " , dispose que : " Pour l'application de l'article L. 421-13-1, le seuil de rémunération dont le respect doit être justifié est une rémunération annuelle brute dont le montant est au moins égal au deuxième échelon de la grille des émoluments des praticiens associés fixé, conformément aux dispositions du 1° de l'article R. 6152-912 du code de la santé publique, par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, du budget et de la fonction publique. " L'arrêté du 29 juin 2023 modifiant l'arrêté du 8 juillet 2022 relatif aux émoluments, rémunérations ou indemnités des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques exerçant leurs fonctions dans les établissements publics fixe, en son annexe VII, à compter du 1er juillet 2023, le montant brut annuel des émoluments des praticiens associés titulaires du 2ème échelon à 41 386, 48 euros, et celui des émoluments des praticiens associés titulaires du 1er échelon à 36 624, 45 euros. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou qui fait l'objet d'un détachement conformément aux articles L. 1262-1, L. 1262-2 et L. 1262-2-1 du code du travail se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / Elle est délivrée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement, dans la limite d'un an. / Elle est renouvelée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement. " L'article L. 5221-2-1 du code du travail dispose que, par dérogation à l'article L. 5221-2 de ce code en vertu duquel, pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail, n'est pas soumis à cette condition " 2° Le praticien étranger titulaire d'un diplôme, d'un certificat ou d'un autre titre permettant l'exercice dans le pays d'obtention de ce diplôme, de ce certificat ou de ce titre, sur présentation de la décision d'affectation du ministre chargé de la santé dans un établissement de santé, prévue aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique (...) ". Enfin, le 19° de l'article R. 5221-2 du code du travail dispense le praticien étranger répondant aux conditions mentionnées au 2° de l'article L. 5221-2-1 de l'autorisation de travail prévue à l'article R. 5221-1 du même code pour exercer une activité professionnelle salariée en France.
3. Il résulte de l'instruction conduite devant la juge des référés du tribunal administratif de Marseille que Mme A..., ressortissante marocaine, médecin, lauréate de l'épreuve de vérification des connaissances au titre de la session 2024 pour la spécialité " médecine générale ", a été, par mesure du centre national de gestion du 25 mars 2025, affectée au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles en vue d'accomplir son parcours de consolidation des compétences, cette décision précisant qu'elle devait rejoindre son affectation sous un délai de deux mois. Dès lors que la requérante n'était titulaire que d'un visa de tourisme, le contrat qui lui a été proposé en qualité de praticien associé n'a toutefois pu donner lieu à exécution. Mme A..., retournée au Maroc, a sollicité la délivrance d'un visa et d'un titre de séjour portant la mention " Talent - profession médicale et de la pharmacie " au titre de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Afin de compléter son dossier enregistré le 19 juillet 2025, le consulat de France au Maroc lui a demandé de fournir tout justificatif attestant une rémunération annuelle brute d'au moins 41 386,48 euros, correspondant au 2ème échelon des praticiens associés. Le centre hospitalier d'Arles a refusé la remise d'une attestation justifiant du versement à Mme A..., en qualité de praticien associé, d'émoluments à hauteur de ce montant, au motif que l'intéressée ne pourrait percevoir la première année qu'une rémunération correspondant au 1er échelon. Mme A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de remettre, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, une attestation employeur officielle mentionnant l'octroi d'une rémunération annuelle brute respectant le plancher européen obligatoire égal au salaire annuel brut moyen français, ou à tout le moins égal à 41 386,48 euros, et la durée d'un contrat de 24 mois correspondant à un parcours de consolidation des compétences. Elle fait appel de l'ordonnance du 25 août 2025 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
4. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par cet article soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures.
5. Pour justifier d'une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la requérante fait valoir qu'en l'absence de délivrance d'une attestation mentionnant une rémunération dépassant le seuil fixé pour l'application de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle se trouve dans l'impossibilité d'entrer en France et d'obtenir la délivrance d'un visa et d'une carte de séjour " talent-profession médicale et de la pharmacie ", en violation du droit de l'Union européenne. Elle soutient que l'impossibilité d'obtenir ce titre de séjour, en la contraignant de demeurer au Maroc sans rémunération alors qu'elle y a démissionné de son poste, la place dans une situation de blocage et d'isolement, du fait de l'impossibilité tant d'exercer son métier que de rejoindre la France où se trouve son compagnon et d'exercer sa liberté d'aller et venir, et fait obstacle à ce qu'elle puisse accomplir son parcours de consolidation des compétences dans des conditions de séjour et de rémunération conformes à la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié. Toutefois, par les circonstances qu'elle invoque, et alors en outre qu'il résulte des écritures d'appel de la requérante que, postérieurement à l'ordonnance attaquée, le consulat de France à Casablanca, statuant sur la demande de visa de l'intéressée, lui a délivré un visa long séjour valant titre de séjour mention " Travailleur temporaire ", la requérante ne justifie pas de l'existence d'une situation d'urgence imminente impliquant l'intervention à très bref délai du prononcé d'une mesure de sauvegarde de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence n'est pas remplie. Par suite, Mme A... n'est manifestement pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Il y a lieu, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres conditions posées par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de rejeter sa requête selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A....
Copie en sera adressée au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles, à l'agence régionale de santé et au centre national de gestion des praticiens hospitaliers.
Fait à Paris, le 12 septembre 2025
Signé : Emilie Bokdam-Tognetti
N° 507950
ECLI:FR:CEORD:2025:507950.20250912
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO & GOULET, avocats
Lecture du vendredi 12 septembre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de constater la violation manifeste de la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021, en deuxième lieu, d'ordonner au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de remettre, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance, l'attestation employeur officielle mentionnant l'octroi d'une rémunération annuelle brute respectant le plancher européen obligatoire égal au salaire annuel brut moyen français et la durée d'un contrat de 24 mois correspondant à un parcours de consolidation des compétences, en troisième lieu, d'ordonner la transmission de cette pièce au consulat général de France au Maroc et à TLS contact Casablanca, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en quatrième lieu, à titre subsidiaire, d'ordonner au même établissement, selon les mêmes conditions, de remettre l'attestation employeur officielle mentionnant une rémunération annuelle brute de 41 386, 48 euros et, en dernier lieu, d'ordonner la saisine du conseil national de gestion en vue de sa réaffectation à l'hôpital Nord de Marseille et la transmission du dossier à la direction générale de l'offre de soins. Par une ordonnance n° 2510043 du 25 août 2025, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Par une requête, enregistrée le 5 septembre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'enjoindre au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de délivrer, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, l'attestation employeur officielle mentionnant une rémunération annuelle brute correspondant au 2ème échelon des praticiens associés ainsi qu'une durée de 24 mois correspondant au parcours de consolidation des compétences ;
3°) d'enjoindre la transmission directe et immédiate de cette attestation au consulat général de France à Casablanca, à TLS contact Casablanca et à elle-même par courrier électronique, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'ordonner la saisine du centre national de gestion pour réaffectation au service d'accueil des urgences adultes de l'hôpital Nord de Marseille ;
5°) de mettre à la charge des parties perdantes la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite, dès lors qu'elle se trouve, en l'absence de titre de séjour approprié, bloquée au Maroc où elle a démissionné de son poste et que le refus du centre hospitalier d'attester d'un niveau de rémunération correspondant aux exigences posées par l'article R. 421-25-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'empêche de bénéficier du seul titre de séjour approprié à sa situation, c'est-à-dire le titre " talent - profession médicale et de la pharmacie " qui lui permettrait de rejoindre la France afin d'y entamer son parcours de consolidation des compétences et de retrouver son compagnon dont elle est éloignée ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de sa vie privée et familiale, au droit d'exercer un emploi et à la liberté d'aller et venir ;
- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a considéré qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la méconnaissance de la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021, alors que le refus du centre hospitalier d'Arles de lui délivrer l'attestation employeur mentionnant une rémunération annuelle brute respectant les exigences posées par cette directive constitue une méconnaissance manifeste du droit de l'Union européenne de nature à justifier que le juge des référés prenne des mesures afin d'en garantir le respect ;
- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a considéré que le centre hospitalier pouvait refuser de délivrer une attestation justifiant d'une rémunération annuelle brute principale d'au moins 41 386, 48 euros, alors, d'une part, que les dispositions de l'article R. 6152-911 code de la santé publique ne font pas obstacle à son classement, dès la première année, au deuxième échelon de rémunération et, d'autre part, que la délivrance d'une telle attestation constitue une nécessité s'agissant d'un praticien diplômé hors Union européenne ayant réussi les épreuves de vérification des connaissances et qui entre dès lors dans le champ d'application du titre de séjour " talent - profession médicale et de la pharmacie ".
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n°2025-539 du 13 juin 2025 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, créé par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration : " L'étranger qui bénéficie d'une décision d'affectation, d'une attestation permettant un exercice temporaire ou d'une autorisation d'exercer mentionnées aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique, qui occupe un emploi au titre d'une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-12-1 du même code et qui justifie du respect d'un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d'Etat se voit délivrer une carte pluriannuelle portant la mention " talent-profession médicale et de la pharmacie " d'une durée maximale de quatre ans, sous réserve de la signature de la charte des valeurs de la République et du principe de laïcité. /La carte mentionnée au premier alinéa du présent article permet l'exercice de l'activité professionnelle ayant justifié sa délivrance. " L'article R. 421-25-1 du même code, créé par le décret n° 2025-539 du 13 juin 2025 relatif aux cartes de séjour " talent " et modifiant certaines dispositions relatives aux cartes de séjour " recherche d'emploi-création d'entreprise " et " entrepreneur et profession libérale " , dispose que : " Pour l'application de l'article L. 421-13-1, le seuil de rémunération dont le respect doit être justifié est une rémunération annuelle brute dont le montant est au moins égal au deuxième échelon de la grille des émoluments des praticiens associés fixé, conformément aux dispositions du 1° de l'article R. 6152-912 du code de la santé publique, par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, du budget et de la fonction publique. " L'arrêté du 29 juin 2023 modifiant l'arrêté du 8 juillet 2022 relatif aux émoluments, rémunérations ou indemnités des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques exerçant leurs fonctions dans les établissements publics fixe, en son annexe VII, à compter du 1er juillet 2023, le montant brut annuel des émoluments des praticiens associés titulaires du 2ème échelon à 41 386, 48 euros, et celui des émoluments des praticiens associés titulaires du 1er échelon à 36 624, 45 euros. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou qui fait l'objet d'un détachement conformément aux articles L. 1262-1, L. 1262-2 et L. 1262-2-1 du code du travail se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / Elle est délivrée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement, dans la limite d'un an. / Elle est renouvelée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement. " L'article L. 5221-2-1 du code du travail dispose que, par dérogation à l'article L. 5221-2 de ce code en vertu duquel, pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail, n'est pas soumis à cette condition " 2° Le praticien étranger titulaire d'un diplôme, d'un certificat ou d'un autre titre permettant l'exercice dans le pays d'obtention de ce diplôme, de ce certificat ou de ce titre, sur présentation de la décision d'affectation du ministre chargé de la santé dans un établissement de santé, prévue aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique (...) ". Enfin, le 19° de l'article R. 5221-2 du code du travail dispense le praticien étranger répondant aux conditions mentionnées au 2° de l'article L. 5221-2-1 de l'autorisation de travail prévue à l'article R. 5221-1 du même code pour exercer une activité professionnelle salariée en France.
3. Il résulte de l'instruction conduite devant la juge des référés du tribunal administratif de Marseille que Mme A..., ressortissante marocaine, médecin, lauréate de l'épreuve de vérification des connaissances au titre de la session 2024 pour la spécialité " médecine générale ", a été, par mesure du centre national de gestion du 25 mars 2025, affectée au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles en vue d'accomplir son parcours de consolidation des compétences, cette décision précisant qu'elle devait rejoindre son affectation sous un délai de deux mois. Dès lors que la requérante n'était titulaire que d'un visa de tourisme, le contrat qui lui a été proposé en qualité de praticien associé n'a toutefois pu donner lieu à exécution. Mme A..., retournée au Maroc, a sollicité la délivrance d'un visa et d'un titre de séjour portant la mention " Talent - profession médicale et de la pharmacie " au titre de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Afin de compléter son dossier enregistré le 19 juillet 2025, le consulat de France au Maroc lui a demandé de fournir tout justificatif attestant une rémunération annuelle brute d'au moins 41 386,48 euros, correspondant au 2ème échelon des praticiens associés. Le centre hospitalier d'Arles a refusé la remise d'une attestation justifiant du versement à Mme A..., en qualité de praticien associé, d'émoluments à hauteur de ce montant, au motif que l'intéressée ne pourrait percevoir la première année qu'une rémunération correspondant au 1er échelon. Mme A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles de remettre, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, une attestation employeur officielle mentionnant l'octroi d'une rémunération annuelle brute respectant le plancher européen obligatoire égal au salaire annuel brut moyen français, ou à tout le moins égal à 41 386,48 euros, et la durée d'un contrat de 24 mois correspondant à un parcours de consolidation des compétences. Elle fait appel de l'ordonnance du 25 août 2025 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
4. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par cet article soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures.
5. Pour justifier d'une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la requérante fait valoir qu'en l'absence de délivrance d'une attestation mentionnant une rémunération dépassant le seuil fixé pour l'application de l'article L. 421-13-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle se trouve dans l'impossibilité d'entrer en France et d'obtenir la délivrance d'un visa et d'une carte de séjour " talent-profession médicale et de la pharmacie ", en violation du droit de l'Union européenne. Elle soutient que l'impossibilité d'obtenir ce titre de séjour, en la contraignant de demeurer au Maroc sans rémunération alors qu'elle y a démissionné de son poste, la place dans une situation de blocage et d'isolement, du fait de l'impossibilité tant d'exercer son métier que de rejoindre la France où se trouve son compagnon et d'exercer sa liberté d'aller et venir, et fait obstacle à ce qu'elle puisse accomplir son parcours de consolidation des compétences dans des conditions de séjour et de rémunération conformes à la directive (UE) 2021/1883 du 20 octobre 2021 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié. Toutefois, par les circonstances qu'elle invoque, et alors en outre qu'il résulte des écritures d'appel de la requérante que, postérieurement à l'ordonnance attaquée, le consulat de France à Casablanca, statuant sur la demande de visa de l'intéressée, lui a délivré un visa long séjour valant titre de séjour mention " Travailleur temporaire ", la requérante ne justifie pas de l'existence d'une situation d'urgence imminente impliquant l'intervention à très bref délai du prononcé d'une mesure de sauvegarde de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence n'est pas remplie. Par suite, Mme A... n'est manifestement pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Il y a lieu, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres conditions posées par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de rejeter sa requête selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A....
Copie en sera adressée au centre hospitalier Joseph Imbert d'Arles, à l'agence régionale de santé et au centre national de gestion des praticiens hospitaliers.
Fait à Paris, le 12 septembre 2025
Signé : Emilie Bokdam-Tognetti