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Ariane Web: CAA NANTES 19NT03497, lecture du 22 janvier 2021

Décision n° 19NT03497
22 janvier 2021
CAA de NANTES

N° 19NT03497

3ème chambre
M. le Pdt. COUVERT-CASTERA, président
M. Eric BERTHON, rapporteur
M. GAUTHIER, rapporteur public
SELARL JURIADIS, avocats


Lecture du vendredi 22 janvier 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... a demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Carrouges à lui verser la somme totale de 35 600 euros en réparation des divers préjudices qu'elle estime avoir subis du fait d'un harcèlement moral, de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre, de son licenciement et du non-paiement de vingt jours inscrits à son compte-épargne temps et, d'autre part, d'enjoindre à son employeur de régulariser divers aspects de sa situation administrative.

Par un jugement n° 1800674 du 5 juin 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 août 2019 Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 5 juin 2019 ;

2°) de condamner l'EHPAD de Carrouges à lui verser la somme totale de 35 600 euros, ainsi que 20 jours de congés payés qui ne lui ont pas été versés ;

3°) d'enjoindre à son employeur de modifier son attestation Pôle Emploi, son solde de tout compte et " l'attestation comportant le nombre d'heures reportables sur le compte personnel formation ".

4°) de mettre à la charge de l'EHPAD de Carrouges la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- elle a subi des faits de harcèlement moral à l'occasion de l'enquête disciplinaire dont elle a fait l'objet et de son licenciement ; elle a, de ce fait, subi un préjudice moral pour lequel elle sollicite une réparation à hauteur de 15 000 euros ; elle a également été contrainte d'engager des frais d'avocat pour un montant total de 7 000 euros ;
- la décision de licenciement prise à son encontre est entachée de détournement de procédure ; elle est fondée à demander à ce titre une indemnité de 12 000 euros ;
- elle a droit également au paiement de 1 600 euros correspondant à vingt jours inscrits sur son compte-épargne temps et de vingt jours de congés payés non pris.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 avril 2020 l'EHPAD de Carrouges, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- la requête est irrecevable car elle se borne à reproduire littéralement la demande de première instance et ne satisfait donc pas à l'exigence de motivation des requêtes qui résulte de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- les moyens soulevés en première instance par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant l'EHPAD de Carrouges.


Considérant ce qui suit :

1. Mme F... A... a été employée par l'EHPAD de Carrouges, dans l'Orne, en qualité d'adjointe des cadres hospitaliers contractuelle, du 17 octobre 2011 au 8 novembre 2017, d'abord sous contrat à durée déterminée, puis, à compter du 8 juin 2012, sous contrat à durée indéterminée. Elle a été suspendue à titre conservatoire pour motif disciplinaire à partir du 30 mars 2017, puis licenciée à compter du 9 novembre 2017 en raison du recrutement d'un agent titulaire de la fonction publique hospitalière. Le 12 janvier 2018, elle a sollicité de son ancien employeur le versement de diverses sommes au titre du harcèlement moral dont elle soutient avoir été victime, du licenciement " abusif " dont elle aurait fait l'objet, et en paiement de rémunérations lui restant dues. Par lettre du 8 février 2018, l'EHPAD de Carrouges a refusé de faire droit à ces demandes. Mme A... a alors saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande indemnitaire et de conclusions aux fins d'injonction. Le tribunal a rejeté ces demandes par un jugement du 5 juin 2019. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur la fin de non-recevoir opposée par l'EHPAD de Carrouges :

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicables à l'introduction de l'instance d'appel en vertu des dispositions de l'article R. 811-13 du même code : " La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " En vertu de ces dispositions, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge.
3. La requête dont Mme A... a saisi la cour se borne à reproduire intégralement et exclusivement l'exposé des faits et moyens figurant dans son mémoire de première instance, dont elle ne diffère que par son intitulé, par une référence au jugement attaqué à la fin de l'exposé des faits et par la présentation à la cour de conclusions tendant à l'annulation de ce jugement. Il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée à la requête par l'EHPAD de Carrouges et tirée de ce que cette requête ne satisfait pas aux exigences de motivation résultant des dispositions précitées, doit être accueillie.

Sur les frais liés au litige :

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'EHPAD de Carrouges, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à Mme A... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter la demande présentée par l'EHPAD de Carrouges au même titre.

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'EHPAD de Carrouges au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... et à l'EHPAD de Carrouges.


Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Couvert-Castéra, président de la cour,
- Mme Brisson, président assesseur,
- M. E..., premier conseiller.


Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2020.

Le rapporteur
E. E...Le président
O. Couvert-Castéra

Le greffier
R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.



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