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Ariane Web: Conseil d'État 340859, lecture du 1 mars 2013, ECLI:FR:Code Inconnu:2013:340859.20130301

Décision n° 340859
1 mars 2013
Conseil d'État

N° 340859
ECLI:FR:Code Inconnu:2013:340859.20130301
Mentionné aux tables du recueil Lebon
6ème - 1ère SSR
M. Didier Ribes, rapporteur
M. Xavier de Lesquen, rapporteur public
SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE, avocats


Lecture du vendredi 1 mars 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu, 1° sous le n° 340859, la requête, enregistrée le 24 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société Roozen France et la SCI des Serres, dont les sièges sont Zone horticole du Bugey à Saint-Vulbas (01150) ; les sociétés requérantes demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2010-402 du 23 avril 2010 autorisant Électricité de France à créer, sur le territoire de la commune de Saint-Vulbas (département de l'Ain), une installation nucléaire de base dénommée Installation de conditionnement et d'entreposage de déchets activés (ICEDA) ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de produire tous les documents et avis relatifs aux modifications apportées à la demande d'autorisation initialement déposée par Électricité de France le 29 septembre 2005 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacune d'entre elles de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu, 2° sous le n° 340957, la requête, enregistrée le 28 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la CRIIRAD, dont le siège est au 471, avenue Victor Hugo à Valence (26000), l'Association hiéroise pour la défense de l'environnement, dont le siège est à la Mairie de Hières-sur-Amby (38118), l'association Sortir du nucléaire Cornouaille, dont le siège est au 53, impasse de l'Odet à Quimper (29000), le CRILAN, dont le siège est au 10, route d'Etang-Val aux Pieux (50340), l'association Médiane, dont le siège est à la maison de la culture et des associations, rue Résini au Pertuis (84120), l'association Vivre dans les monts d'Arrée, dont le siège est CAL, route de Berrien à Huelgoat (29690) et l'association Bretagne Vivante - SEPNB, dont le siège est à Brest (29000) ; la CRIIRAD et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement ;

Vu la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 ;

Vu la directive 97/11/CE du Conseil du 3 mars 1997 ;

Vu la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 ;

Vu la loi n° 2005-1319 du 26 octobre 2005 ;

Vu la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 ;

Vu la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 ;

Vu le décret n° 63-1228 du 11 décembre 1963 ;

Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ;

Vu le décret n° 95-540 du 4 mai 1995 ;

Vu le décret n° 2006-629 du 30 mai 2006 ;

Vu le décret n° 2007-1557 du 2 novembre 2007 ;

Vu le décret n° 2009-496 du 30 avril 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Roozen France et de la SCI des Serres, de Me Brouchot, avocat de la CRIIRAD, de l'Association hiéroise pour la défense de l'environnement, de l'association Sortir du nucléaire Cornouaille, du CRILAN, de l'association Médiane, de l'association Vivre dans les monts d'Arrée et de l'association Bretagne Vivante - SEPNB, et de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat d'Electricité de France ;

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Roozen France et de la SCI des Serres, à Me Brouchot, avocat de la CRIIRAD, de l'Association hiéroise pour la défense de l'environnement, de l'association Sortir du nucléaire Cornouaille, du CRILAN, de l'association Médiane, de l'association Vivre dans les monts d'Arrée et de l'association Bretagne Vivante - SEPNB, et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat d'Electricité de France ;



1. Considérant que les requêtes n° 340859 et 340957 sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur l'absence de saisine de la Commission nationale du débat public :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 121-8 du code de l'environnement : " La Commission nationale du débat public est saisie de tous les projets d'aménagement ou d'équipement qui, par leur nature, leurs caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel, tel qu'il peut être évalué lors de la phase d'élaboration, répondent à des critères ou excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat " ; qu'en vertu de l'article R. 121-2 du même code, pris pour l'application de ces dispositions, cette commission est saisie de plein droit de la création d'une installation nucléaire de base consistant en un nouveau site hors production électro-nucléaire correspondant à un investissement d'un coût supérieur à 300 millions d'euros ; que, contrairement à ce qui est soutenu, le coût pris en compte pour apprécier le respect de ces dispositions n'a pas à inclure le fonctionnement ultérieur de l'installation ; qu'il résulte de l'instruction que le coût estimé de la construction de l'installation nucléaire de base dénommée Installation de conditionnement et d'entreposage de déchets activés (ICEDA) sur le site de Bugey, tel qu'il pouvait raisonnablement être estimé lors de l'élaboration du projet, est inférieur à 300 millions d'euros ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la Commission nationale du débat public aurait dû être saisie du projet en vertu des dispositions précitées doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du II du même article L. 121-8, dans sa rédaction alors en vigueur : " En outre, les projets appartenant aux catégories définies en application du I mais dont le coût prévisionnel est d'un montant inférieur au seuil fixé en application du I, et qui répondent à des critères techniques ou excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat pour chaque nature de projet, sont rendus publics par leur maître d'ouvrage ou par la personne responsable du projet, qui en publie les objectifs et les caractéristiques essentielles. / En ce cas, la commission peut être saisie par le maître d'ouvrage ou la personne publique responsable du projet et par dix parlementaires ; elle peut également être saisie par un conseil régional, un conseil général, un conseil municipal ou un établissement public de coopération intercommunale ayant une compétence en matière d'aménagement de l'espace, territorialement intéressés ou par l'une des associations agréées de protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 141-1 exerçant leur activité sur l'ensemble du territoire national (...) " ; que, s'il résulte de l'instruction que le coût prévisionnel de l'ICEDA pouvait être estimé en 2006 à 240 millions d'euros, soit un montant supérieur au seuil de 150 millions d'euros fixé à l'article R. 121-2 pour l'application du II de l'article L. 121-8, il résulte des termes mêmes de ces dispositions que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, la saisine de la Commission nationale du débat public n'était pas de droit du seul fait du dépassement de ce seuil ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-10 du même code : " Le ministre chargé de l'environnement, conjointement avec le ministre intéressé, peut saisir la Commission nationale du débat public en vue de l'organisation d'un débat public portant sur des options générales d'intérêt national en matière d'environnement, de développement durable ou d'aménagement " ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le ministre n'était pas tenu de saisir la Commission nationale du débat public sur leur fondement ; que, dès lors que la saisine de cette commission n'était pas obligatoire, le choix du ministre de ne pas faire usage de la faculté que ces dispositions lui ouvrent relève de sa libre appréciation et ne saurait entacher d'irrégularité la procédure préalable à l'édiction du décret attaqué ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que l'annexe I de la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public aux processus décisionnels et l'accès à la justice en matière d'environnement vise, au nombre des projets dont elle exige qu'ils soient soumis à une procédure de participation du public, les " installations destinées exclusivement au stockage (prévu pour plus de dix ans) de combustibles nucléaires irradiés ou de déchets radioactifs dans un site différent du site de production " ; que si l'ICEDA doit être regardée comme étant au nombre des installations visées par ces stipulations, celles-ci n'ont pas pour effet d'imposer que la création de telles installations soit soumise à la procédure prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code de l'environnement ;


Sur le moyen tiré de ce que le public n'aurait pas été informé du projet ni mis à même de participer au processus décisionnel à un stade précoce de la procédure :

6. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 4 et de l'annexe I de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dans sa rédaction issue de la directive du Conseil 97/11/CE du 3 mars 1997, que les " installations destinées exclusivement au stockage (prévu pour plus de dix ans) de combustibles nucléaires irradiés ou de déchets radioactifs dans un site différent du site de production " sont soumises à une évaluation conformément aux articles 5 à 10 de la directive ; que la création de l'ICEDA relève du champ d'application de ces dispositions, l'entreposage de déchets activés pour une durée de plusieurs décennies devant être regardé comme un " stockage de déchets radioactifs " ; que l'article 6 de la même directive, dans sa rédaction issue de la directive 2003/35/CE du 26 mai 2003, dispose que : " 2. À un stade précoce des procédures décisionnelles en matière d'environnement visé à l'article 2, paragraphe 2, et au plus tard dès que ces informations peuvent raisonnablement être fournies, les informations suivantes sont communiquées au public par des avis au public ou d'autres moyens appropriés tels que les moyens de communication électroniques lorsqu'ils sont disponibles (...) / 4. À un stade précoce de la procédure, le public concerné se voit donner des possibilités effectives de participer au processus décisionnel en matière d'environnement visé à l'article 2, paragraphe 2, et, à cet effet, il est habilité à adresser des observations et des avis, lorsque toutes les options sont envisageables, à l'autorité ou aux autorités compétentes avant que la décision concernant la demande d'autorisation ne soit prise " ; que la soumission d'un projet à une enquête publique régie par les dispositions du code de l'environnement doit être regardée comme une modalité d'information et de participation du public assurant la mise en oeuvre des objectifs fixés par les dispositions citées ci-dessus de l'article 6 de la directive du 27 juin 1985 ;

7. Considérant que, selon l'article 70 du décret du 2 novembre 2007 relatif aux installations nucléaires de base et au contrôle, en matière de sûreté nucléaire, du transport de substances radioactives : " Les demandes d'autorisation de création (...) déposées en application du décret du 11 décembre 1963 avant la publication du présent décret continuent à être instruites selon les procédures fixées par le décret du 11 décembre 1963 (...) " ; que l'article 3 du décret du 11 décembre 1963, qui régit l'instruction des demandes de création d'une installation nucléaire de base, dispose notamment que " l'enquête publique est régie, sous réserve des dispositions suivantes, par les chapitres Ier et II du décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ", ces dernières dispositions, qui imposaient la soumission du projet de création de l'ICEDA à une enquête publique, étant désormais codifiées à l'article L. 593-8 du code de l'environnement ; que, par suite, le respect des exigences posées par les dispositions précitées de la directive du 27 juin 1985 tenant à ce que le public soit informé du projet et mis à même de participer au processus décisionnel à un stade précoce de la procédure doit être apprécié au regard des dispositions de droit interne applicables relatives à l'enquête publique ;

8. Considérant que l'enquête publique à laquelle a été soumis le projet litigieux s'est déroulée antérieurement à l'édiction du décret l'autorisant ; que les allégations selon lesquelles les informations requises par les dispositions de droit interne relatives aux enquêtes publiques, conformes aux dispositions des paragraphes 2 et 3 de l'article 6 de la directive du 27 juin 1985, n'auraient pas, dans ce cadre, été mises à la disposition du public sont dénuées des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, dès lors, la Société Roozen France et la SCI des Serres ne sont pas fondées à soutenir qu'auraient été méconnues les exigences tenant à ce que le public soit informé du projet et mis à même de participer au processus décisionnel à un stade précoce de la procédure ;

9. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent la CRIIRAD et autres, les dispositions de la directive citée ci-dessus n'imposaient pas que la création de l'ICEDA soit soumise à la procédure prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code de l'environnement ;


Sur les moyens relatifs au lancement de l'enquête publique :

10. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions du code de l'environnement régissant les enquêtes publiques, auxquelles renvoie, ainsi qu'il a été dit, l'article 3 du décret du 11 décembre 1963, le préfet fixe la durée de l'enquête, qui ne peut être inférieure à un mois ni excéder deux mois ; que s'il est soutenu que la durée d'un mois retenue par l'arrêté des préfets de l'Isère et de l'Ain du 18 mai 2006 prescrivant l'ouverture d'une enquête publique serait insuffisante, il résulte de ce qui vient d'être dit que rien n'imposait aux auteurs de cet arrêté de choisir une durée plus longue ; qu'en l'espèce, ceux-ci ont pu choisir une durée d'un mois sans entacher d'irrégularité l'enquête publique ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait aux préfets de décider que l'enquête publique se déroulerait du 13 juin au 13 juillet 2006 ; que la circonstance que l'enquête a été menée pour partie durant une période de vacances scolaires est, en l'espèce, sans influence sur la régularité de la procédure ;

12. Considérant, en troisième lieu, d'une part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait l'organisation d'une enquête publique conjointe sur le démantèlement du réacteur Bugey 1 et la création de l'ICEDA, ces deux opérations présentant des liens importants, dès lors que l'enquête distinguait avec clarté les deux projets et qu'une information complète était assurée sur chacun d'eux ;

13. Considérant, d'autre part, que lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en oeuvre des principes énoncés à l'article 7 de la Charte de l'environnement, aux termes duquel toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, la légalité des décisions administratives s'apprécie par rapport à ces dispositions, sous réserve, s'agissant de dispositions législatives antérieures à l'entrée en vigueur de la Charte de l'environnement, qu'elles ne soient pas incompatibles avec les exigences qui découlent de cette Charte ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 7 de la Charte de l'environnement doit être apprécié au regard des dispositions législatives qui soumettent l'autorisation litigieuse à une procédure d'enquête publique ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle enquête conjointe ait, en l'espèce, nui à la bonne information du public ni que les dispositions législatives qui soumettent l'autorisation litigieuse à une procédure d'enquête publique aient été méconnues ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait été pris au terme d'une procédure méconnaissant les exigences constitutionnelles résultant de l'article 7 de la Charte de l'environnement ne peut qu'être écarté ;

14. Considérant, en quatrième lieu, que l'article L. 123-4 du code de l'environnement dispose que : " L'enquête mentionnée à l'article L. 123-1 est conduite, selon la nature et l'importance des opérations, par un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête désignés par le président du tribunal administratif ou le membre du tribunal délégué par lui à cette fin (...) " ; que les préfets de l'Isère et de l'Ain ont pu décider, sans entacher d'irrégularité l'enquête publique, de confier la conduite de l'enquête publique à un commissaire enquêteur et non à une commission d'enquête ;

15. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 123-14 du code de l'environnement, un avis portant les indications relatives à l'ouverture de l'enquête publique à la connaissance du public est, par les soins du préfet, " publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. Pour les opérations d'importance nationale, ledit avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale quinze jours au moins avant le début de l'enquête " ; qu'il résulte de l'instruction que l'avis comportant les indications requises a été publié, le 26 mai 2006, dans le Dauphiné libéré et dans le Progrès, puis rappelé dans ces mêmes journaux le 16 juin 2006 ; que si, contrairement à ce qui est soutenu, le Dauphiné libéré est diffusé dans les deux départements concernés, le Progrès n'est pas diffusé dans l'Isère ; qu'ainsi l'avis n'a été publié que dans un seul journal local ou régional diffusé dans ce dernier département ; que, cependant, l'avis en cause ayant également été publié dans le Monde et dans le Figaro, quotidiens nationaux diffusés dans l'Isère, cette circonstance n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à entacher d'irrégularité la procédure ;

16. Considérant, en sixième lieu, que s'il est soutenu que l'avis publié ne permettait pas au public de comprendre la nature du projet d'ICEDA, il résulte de l'instruction que cet avis respecte les prescriptions des articles R. 123-13 et R. 123-14 du code de l'environnement qui imposent d'indiquer l'objet de l'enquête ;

17. Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que l'avis n'aurait pas fait l'objet de l'affichage dans les mairies et sur les lieux des travaux projetés prescrit par le second alinéa du même article R. 123-14 n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur le dossier soumis à enquête publique :

En ce qui concerne les moyens tirés du droit interne :

18. Considérant, en premier lieu, que si les requérantes soutiennent que l'étude d'impact jointe au dossier de demande d'autorisation aurait dû porter sur " l'ensemble des installations ou équipements exploités ou projetés par le demandeur qui, par leur proximité ou leur connexité avec l'installation soumise à autorisation, sont de nature à participer aux incidences sur les eaux, le milieu aquatique ou l'atmosphère ", en application de l'article 8 du décret du 4 mai 1995 relatif aux rejets d'effluents liquides et gazeux et aux prélèvements d'eau des installations nucléaires de base, la demande d'autorisation présentée le 29 septembre 2005 l'a été, non pas sur le fondement de ce décret, mais sur celui du décret du 11 décembre 1963 relatif aux installations nucléaires, qui ne prévoit pas une telle obligation ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

19. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 3 du décret du 11 décembre 1963 et de l'article R. 123-6 du code de l'environnement, dans leur rédaction applicable en l'espèce, que le rapport préliminaire de sûreté devait être soumis à la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection à l'appui de la demande d'autorisation mais n'avait pas à figurer dans le dossier soumis à enquête publique ; que, par suite, la révision de ce rapport postérieurement au déroulement de l'enquête publique, dans le cadre de l'instruction technique de la demande d'autorisation par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), n'est pas susceptible d'entacher d'irrégularité l'enquête publique ; que, contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que cette autorité ait relevé en mars 2009 des insuffisances dans la révision par Électricité de France (EDF) du rapport préliminaire de sûreté ne révèle pas, à elle seule, une insuffisance de l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête publique de nature à affecter la régularité de cette enquête ;

20. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, il résulte de l'instruction que les plans présentés par EDF dans le dossier de la demande d'autorisation sont conformes aux prescriptions de l'article 3 du décret du 11 décembre 1963, en vertu desquelles le plan de situation au 1/10 000 indique notamment le périmètre de l'installation et les voies publiques ;

21. Considérant, en quatrième lieu, que selon l'article R. 122-3 du code de l'environnement, " Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement " et l'étude d'impact présente notamment " 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique " ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il résulte de l'instruction que l'étude d'impact comporte une étude des effets directs et indirects du projet sur les activités humaines, notamment agricoles et horticoles ; que l'étude d'impact et l'étude de dangers décrivent de manière suffisante les risques liés aux rejets radioactifs, le risque sismique et le risque d'inondation ;

22. Considérant, en cinquième lieu, que s'il résulte de l'instruction que la profondeur des fondations des ouvrages de l'ICEDA, de 13 mètres selon l'étude d'impact, a été portée ultérieurement à un niveau compris entre 31 et 55 mètres à la suite des observations de l'ASN, cette modification n'est pas de nature à révéler une insuffisance de l'étude d'impact s'agissant de l'étude de l'incidence du projet sur l'hydrogéologie du site dès lors qu'elle n'affecte pas l'économie générale du projet ;

23. Considérant, en sixième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° du R. 123-6 du code de l'environnement selon lesquelles le dossier soumis à enquête publique comprend la mention des textes qui régissent l'enquête publique en cause et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative à l'opération considérée manque en fait ;

24. Considérant, enfin, que, contrairement à ce qui est soutenu, le dossier soumis à enquête publique précise que l'ICEDA n'est pas exclusivement liée au démantèlement des centrales de première génération et qu'elle a également vocation à accueillir des déchets issus non pas du démantèlement des réacteurs à l'arrêt mais de l'exploitation de l'ensemble des réacteurs en activité ; que les requérantes ne peuvent utilement critiquer l'information délivrée par EDF dans un document diffusé au public mais qui ne faisant pas partie de ceux qui devaient être joints au dossier d'enquête publique, ne saurait entacher celle-ci d'irrégularité ;

En ce qui concerne les moyens tirés de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 :

25. Considérant que la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement vise à ce que l'autorisation de réaliser de tels projets ne soit accordée qu'après une évaluation des incidences notables sur l'environnement, réalisée sur la base d'informations appropriées ; qu'à cette fin, elle prévoit notamment à son article 6 § 1, dans sa rédaction issue de la directive 97/11/CE du Conseil du 3 mars 1997, dont le délai de transposition a expiré le 14 mars 1999, que : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou cas par cas. Celles-ci reçoivent les informations recueillies en vertu de l'article 5. Les modalités de cette consultation sont fixées par les États membres " ; que le deuxième alinéa de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi du 26 octobre 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement, qui transpose cette directive en droit français, dispose que : " Les études préalables à la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier, doivent comporter une étude d'impact permettant d'en apprécier les conséquences. Cette étude d'impact est transmise pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement par l'autorité chargée d'autoriser ou d'approuver ces aménagements ou ces ouvrages ", le III de l'article L. 122-3 du même code renvoyant à un décret en Conseil d'État la désignation de l'autorité administrative à laquelle l'étude d'impact doit être transmise ; que si le décret du 30 avril 2009 relatif à l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement prévue aux articles L. 122-1 et L. 122-7 du code de l'environnement a été pris pour la transposition de l'article 6 § 1 de la directive du 27 juin 1985, l'article 6 de ce décret a prévu, pour des motifs de sécurité juridique, que ses dispositions ne seraient applicables qu'aux projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements dont l'étude d'impact serait remise à l'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation, d'approbation ou d'exécution après le premier jour du deuxième mois suivant la publication de ce décret ;

26. Considérant qu'en l'espèce, la demande d'autorisation ayant été déposée par EDF le 29 septembre 2005, le décret du 30 avril 2009 n'était pas applicable au projet autorisé par le décret attaqué du 23 avril 2010 ; qu'ainsi, les règles nationales qui ont été appliquées à la procédure en cause n'organisaient pas la transmission, pour avis, à une autorité compétente en matière d'environnement de l'étude d'impact du projet litigieux, contrairement à ce que prévoit l'article 6 § 1 de la directive du 27 juin 1985, le fait que le décret attaqué a été pris sur le rapport du ministre chargé de l'environnement ne pouvant être regardé comme tenant lieu de l'avis prévu par la directive ;

27. Considérant toutefois, d'une part, qu'au regard des finalités poursuivies par cette directive - qui, ainsi qu'il a été dit, tend à ce que l'autorisation de réaliser de tels projets ne soit accordée qu'après une évaluation des incidences notables sur l'environnement, réalisée sur la base d'informations appropriées - il résulte de ce qui a été dit au point 21 que l'étude d'impact relative au projet litigieux était d'une consistance et d'une qualité suffisantes pour assurer l'information complète du public et éclairer l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation ; que, dès lors, la circonstance que la procédure d'enquête a été organisée selon des règles ne comportant pas de transmission pour avis à l'autorité prévue à l'article 6 § 1 de la directive est, en l'espèce, restée sans incidence sur la légalité du décret attaqué ;

28. Considérant, d'autre part, que si tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions d'une directive, lorsque l'État n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires, c'est à la condition qu'elles soient précises et inconditionnelles ; que, dans le cas contraire, les dispositions d'une directive ne peuvent être directement invoquées pour demander l'annulation d'un tel acte ; que les dispositions de l'article 6 § 1 de la directive du 27 juin 1985 invoquées à l'encontre du décret attaqué sont, en raison de leur imprécision, dépourvues d'effet direct ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que ce décret méconnaît directement ces dispositions, faute de transmission de l'étude d'impact à l'autorité compétente en matière d'environnement, ne peut qu'être écarté ;

Sur le déroulement de l'enquête publique :

29. Considérant, en premier lieu, que s'il est soutenu que, bien que l'arrêté du 18 mai 2006 prescrivant l'enquête publique ait prévu que le dossier d'enquête soit mis à la disposition du public dans les préfectures de l'Ain et de l'Isère et les sous-préfectures de Belley et de la Tour du Pin, aucun registre d'enquête n'aurait été mis à disposition du public dans ces lieux, il ne ressort pas des pièces du dossier que les insuffisances alléguées auraient été de nature à méconnaître les prescriptions de l'article R. 123-7 du code de l'environnement ;

30. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-20 du même code : " Lorsqu'il estime que l'importance ou la nature de l'opération ou les conditions de déroulement de l'enquête publique rendent nécessaire l'organisation d'une réunion publique, le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête en fait part au préfet et au maître de l'ouvrage et leur indique les modalités qu'il propose pour l'organisation de cette réunion " ; que l'utilité de l'organisation d'une telle réunion est laissée à l'appréciation du commissaire enquêteur qui a pu décider, sans entacher d'irrégularité l'enquête publique, de ne pas la prescrire ;

Sur le rapport du commissaire enquêteur :

31. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le commissaire enquêteur ne se serait pas prononcé sur l'ensemble de l'opération projetée, alors même que le résumé qu'il fait des observations recueillies et les motifs qu'il avance pour fonder son avis favorable ne font pas mention de l'accueil de déchets issus de réacteurs en activité ; que les requérantes ne sont, par suite, pas fondées à soutenir qu'il ne saurait être regardé comme ayant délivré un avis favorable au projet soumis à enquête publique ;

32. Considérant, en second lieu, que selon les dispositions, alors en vigueur, du second alinéa de l'article R. 123-22 du code de l'environnement : " (...) Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qui est soutenu, le commissaire enquêteur a traduit le sens des observations recueillies ; qu'il n'avait pas à répondre à chacune d'entre elles ; que le moyen tiré de ce que ses conclusions ne reflèteraient pas un avis personnel car elles ne seraient que la retranscription des informations données par EDF, n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté ;

Sur l'absence de déclaration de projet :

33. Considérant, d'une part, que l'article 144 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a inséré dans le code de l'environnement un article L. 126-1 aux termes duquel : " Lorsqu'un projet public de travaux, d'aménagements ou d'ouvrages a fait l'objet d'une enquête publique en application du chapitre III du présent titre, l'autorité de l'Etat ou l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l'établissement public responsable du projet se prononce, par une déclaration de projet, sur l'intérêt général de l'opération projetée (...) " ; qu'en application de l'article 146 de cette loi, le décret du 30 mai 2006 relatif à la déclaration de projet, qui a inséré dans le code de l'environnement des articles R. 126-1 à R. 126-4, a précisé que ses dispositions s'appliquaient " aux projets faisant l'objet d'un arrêté d'ouverture d'enquête publique pris postérieurement à la date de publication du présent décret " ; qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté interpréfectoral prescrivant l'enquête publique a été pris le 18 mai 2006, soit antérieurement à la publication du décret précité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le projet autorisé par le décret attaqué aurait dû faire l'objet de la déclaration de projet mentionnée à l'article L. 126-1 du code de l'environnement ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

Sur l'absence d'avis conforme du ministre de la santé :

34. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 70, déjà mentionné, du décret du 2 novembre 2007 que si les demandes d'autorisation de création déposées avant sa publication en application du décret du 11 décembre 1963 continuent à être instruites selon les procédures fixées par ce décret, elles sont acceptées ou rejetées par décret pris sur le rapport des ministres chargés de la sûreté nucléaire et après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, selon les modalités définies par le décret du 2 novembre 2007 ; que les dispositions de ce dernier décret ne prévoient pas d'avis du ministre de la santé ; qu'il s'ensuit que l'avis conforme de ce ministre, qui était certes prévu par l'article 3 du décret du 11 décembre 1963, n'était pas requis en l'espèce dès lors qu'il ne se rattache pas à la procédure d'instruction de la demande mais à son acceptation, régie par les seules dispositions du décret du 2 novembre 2007 ; que le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal faute de recueil de cet avis préalablement à son édiction ne peut donc qu'être écarté ;

Sur l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire :

35. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, il résulte de l'instruction que l'Autorité de sûreté nucléaire s'est prononcée sur un projet de décret modifié afin de tenir compte de l'avis émis par la commission consultative des installations nucléaires de base lors de sa séance du 9 septembre 2009 ;

36. Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que n'auraient pas été transmis à cette autorité tous les avis rendus en application de l'article 13 du décret du 23 novembre 2007 n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur l'information du public sur le décret attaqué :

37. Considérant que s'il est soutenu que les modalités de publicité de la décision d'autorisation de création d'une installation nucléaire de base fixées par l'article 17 du décret du 2 novembre 2007 n'auraient pas été respectées, en méconnaissance des dispositions des articles L. 122-1 et R. 122-16 du code de l'environnement, cette circonstance, dont il résulte au demeurant de l'instruction qu'elle n'est pas avérée, est sans incidence sur la légalité du décret attaqué ;

Sur la durée de l'autorisation :

38. Considérant qu'aux termes du II de l'article 16 du décret du 2 novembre 2007 : " Le décret d'autorisation de création d'une installation nucléaire de base : (...) / 3° Fixe la durée de l'autorisation si celle-ci est accordée pour une durée limitée (...) " ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le décret d'autorisation peut, contrairement à ce qui est soutenu, ne pas fixer de durée de l'autorisation si celle-ci n'est pas accordée pour une durée limitée ; qu'est sans incidence sur ce point la circonstance que la durée de vie prévisible de l'installation soit de cinquante ans ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 du décret du 11 décembre 1963 :

39. Considérant que le I de l'article 3 du décret du 11 décembre 1963 dispose que : " Les installations nucléaires de base ne peuvent être créées qu'après autorisation. La demande d'autorisation porte sur l'installation ou les installations nucléaires de base ainsi que sur les installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article 6 bis. Un site nucléaire peut comprendre plusieurs installations nucléaires de base ayant un même exploitant et constituant un tout organique ; il peut comporter dans les mêmes conditions des possibilités d'accueil d'installations nouvelles " ; que, dès lors que ces dispositions, qui ne portent pas sur la procédure d'instruction de la demande, n'étaient pas applicables au décret attaqué, les requérantes ne peuvent utilement soutenir qu'elles ont été méconnues au motif que l'ICEDA ne formerait pas, avec l'autre installation présente sur le site, un " tout organique " ; qu'au demeurant, les dispositions du décret du 2 novembre 2007 ne subordonnent pas l'autorisation de créer plusieurs installations nucléaires de base sur un même site nucléaire à une telle condition ;

Sur la durée d'entreposage des déchets :

40. Considérant qu'aux termes de l'article L. 542-1-1 du code de l'environnement : " (...) L'entreposage de matières ou de déchets radioactifs est l'opération consistant à placer ces substances à titre temporaire dans une installation spécialement aménagée en surface ou en faible profondeur à cet effet, dans l'attente de les récupérer. / Le stockage de déchets radioactifs est l'opération consistant à placer ces substances dans une installation spécialement aménagée pour les conserver de façon potentiellement définitive (...) " ;

41. Considérant que la demande d'autorisation faisait état d'une durée maximale d'entreposage ; que le décret attaqué vise " la demande présentée le 29 septembre 2005 par Electricité de France et le dossier joint à cette demande, complété le 21 décembre 2007, le 31 octobre 2008 et le 10 avril 2009 " ; que son article 1er dispose que : " Electricité de France (EDF) (...) est autorisée à créer (...) une installation nucléaire de base, dénommée ICEDA (Installation de conditionnement et d'entreposage de déchets activés), (...) conforme à la demande du 29 septembre 2005 susvisée et au dossier joint à cette demande (...) " ; que, par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret serait illégal faute de fixer par lui-même une durée d'entreposage des déchets ;


Sur la définition des conditions d'entreposage des déchets :

42. Considérant, en premier lieu, que selon l'article 16 du décret du 2 novembre 2007 : " (...) II.-Le décret d'autorisation de création d'une installation nucléaire de base : / 1° Mentionne l'identité de l'exploitant, la nature de l'installation et sa capacité maximale (...) " ; que le décret attaqué détermine les bâtiments composant l'installation, fixe un plafond à l'activité totale de l'ensemble des substances radioactives présentes dans l'installation, pour chaque type d'émetteurs, et renvoie expressément au dossier joint à la demande d'autorisation déposée par EDF, qui décrit la superficie de chaque bâtiment, le nombre de colis qu'il peut accueillir et le volume de ces colis ; que, par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué ne mentionnerait pas la capacité maximale de l'installation ; que la circonstance que l'article 1er du décret indique que " l'installation est constituée (...) d'un troisième hall prévu pour une extension ultérieure de capacité " est sans incidence sur ce point, de même que la circonstance qu'un des motifs avancés pour le choix du site du Bugey pour accueillir l'ICEDA est la " possibilité d'extension de la disponibilité foncière du site " ;
43. Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que le décret attaqué ne comporterait aucune indication relative aux critères d'acceptation des déchets susceptibles d'être entreposés dans l'ICEDA manque en fait ; que le décret n'avait pas à définir le sort final des déchets entreposés ; qu'il n'avait pas davantage à définir les délais et conditions de démantèlement de l'installation, ce dernier faisant l'objet d'un décret d'autorisation spécifique ;




Sur l'existence de risques sanitaires et environnementaux :

44. Considérant que l'article 29 de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire dispose que : " I. La création d'une installation nucléaire de base est soumise à autorisation. Cette autorisation ne peut être délivrée que si, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, l'exploitant démontre que les dispositions techniques ou d'organisation prises ou envisagées aux stades de la conception, de la construction et de l'exploitation ainsi que les principes généraux proposés pour le démantèlement ou, pour les installations de stockage de déchets radioactifs, pour leur entretien et leur surveillance après leur arrêt définitif selon les modalités définies au VI, sont de nature à prévenir ou à limiter de manière suffisante les risques ou inconvénients que l'installation présente pour les intérêts mentionnés au I de l'article 28 (...) " ;

45. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des éléments fournis par Electricité de France à l'appui de sa demande d'autorisation de création de l'installation litigieuse, ainsi que des observations formulées par l'Autorité de sûreté nucléaire et des prescriptions édictées par cette dernière, que les dispositions techniques et d'organisation envisagées pour le projet litigieux sont de nature, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, à limiter de manière suffisante les risques induits par le fonctionnement de la centrale sur la sécurité, la santé et la salubrité publiques et l'environnement ; qu'en particulier, le projet prend correctement en compte le risque d'une crue engendrée par la rupture du barrage de Vouglans ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les risques de malveillance ne seraient pas correctement pris en compte ; que dès lors, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'autorisation litigieuse, qui a pris en compte l'ensemble de ces éléments, a été délivrée en méconnaissance des dispositions rappelées ci-dessus ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance du plan local d'urbanisme :

46. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme relatif aux plans locaux d'urbanisme : " Le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan " ; qu'il résulte de ces dispositions que le règlement d'un plan local d'urbanisme n'est pas opposable au décret autorisant la création d'une installation nucléaire de base, pris sur le fondement du décret du 2 novembre 2007, qui relève d'une législation distincte de celle régissant les installations classées pour la protection de l'environnement ; que, dès lors, les requérantes ne peuvent utilement soutenir que le décret attaqué méconnaît les dispositions de l'article Ux1 du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Vulbas ;

47. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes n° 340859 et 340957 doivent être rejetées, y compris leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et Électricité de France, ni d'enjoindre à l'État de produire tous les documents et avis relatifs aux modifications apportées à la demande d'autorisation initialement déposée par Electricité de France le 29 septembre 2005 ;

48. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Société Roozen France et de la SCI des Serres la somme de 1 500 euros chacune à verser à Electricité de France, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a également lieu de mettre à la charge de la CRIIRAD, de l'Association hiéroise pour la défense de l'environnement, de l'association Sortir du nucléaire Cornouaille, de l'association CRILAN, de l'association Médiane, de l'association Vivre dans les monts d'Arrée et de l'association Bretagne Vivante - SEPNB la somme de 300 euros chacune à verser à Electricité de France au titre des mêmes dispositions ;



D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes n°s 340859 et 340957 sont rejetées.

Article 2 : La société Roozen France et la SCI des Serres verseront chacune à Electricité de France une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La CRIIRAD, l'Association hiéroise pour la défense de l'environnement, l'association Sortir du nucléaire Cornouaille, l'association CRILAN, l'association Médiane, l'association Vivre dans les monts d'Arrée et l'association Bretagne Vivante - SEPNB verseront chacune à Electricité de France une somme de 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Roozen France, à la SCI des Serres, à la CRIIRAD, premier requérant dénommé, à Électricité de France, au Premier ministre, à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et au ministre de l'économie et des finances. Les autres requérants seront informés de la présente décision par Me Brouchot, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'État.


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