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Ariane Web: Conseil d'État 383377, lecture du 7 mai 2015, ECLI:FR:CECHS:2015:383377.20150507

Décision n° 383377
7 mai 2015
Conseil d'État

N° 383377
ECLI:FR:CESJS:2015:383377.20150507
Inédit au recueil Lebon
9ème SSJS
M. Olivier Japiot, rapporteur
M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public
SCP JEAN-PHILIPPE CASTON ; SCP GATINEAU, FATTACCINI, avocats


Lecture du jeudi 7 mai 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Saint-Denis d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Sainte-Rose (La Réunion) et d'ordonner la transmission du dossier au procureur de la République en application de l'article L. 117-1 du code électoral.

Par un jugement n° 1400316 du 26 juin 2014, le tribunal administratif de Saint-Denis a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 dans cette commune et a rejeté le surplus des conclusions de M.B..., ainsi que celles de M. D... C...-E... tendant à ce que M. B...soit déclaré inéligible.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 4 août et 4 septembre 2014 et les 30 janvier, 12 février et 9 avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...-E... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la protestation de M.B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative.


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. C...-E... et à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. B... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 avril 2015, présentée par M. C... -E... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 avril 2015, présentée par M. C... -E... ;


Considérant ce qui suit :

1. A l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées dans la commune de Sainte-Rose (La Réunion), les 23 et 30 mars 2014, la liste conduite par M. C... -E..., maire sortant, a obtenu au second tour de scrutin, sur un total de 4 993 suffrages exprimés, 2 527 voix, soit 61 voix de plus que celle conduite par M.B..., qui a obtenu 2 466 voix. M. C... -E... relève appel du jugement du 26 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis, sur la protestation de M. B..., a annulé l'ensemble des opérations électorales.

2. Le moyen tiré de ce que la minute de la décision attaquée ne comporterait pas les signatures du président de la formation de jugement et du greffier manque en fait.

3. Aux termes de l'article L. 66 du code électoral : " Les bulletins blancs, ceux ne contenant pas une désignation suffisante ou dans lesquels les votants se sont fait connaître, les bulletins trouvés dans l'urne sans enveloppe ou dans des enveloppes non réglementaires, les bulletins écrits sur papier de couleur, les bulletin ou enveloppes portants des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions injurieuses pour les candidats ou pour des tiers n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement. / Mais ils sont annexés au procès-verbal ainsi que les enveloppes non réglementaires et contresignés par les membres du bureau. / Chacun de ces bulletins annexés doit porter mention des causes de l'annexion. / Si l'annexion n'a pas été faite, cette circonstance n'entraîne l'annulation des opérations qu'autant qu'il est établi qu'elle a eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ".

4. Il résulte de l'instruction que sur les 136 bulletins blancs ou nuls annexés au procès-verbal transmis à la sous-préfecture de Saint-Benoît, les 88 bulletins provenant des bureaux de vote n° 1, 2, 4 et 6 ne portent pas la mention des causes de leur annexion, en méconnaissance des dispositions précitées du code électoral. Le juge de l'élection se trouve ainsi dans l'impossibilité de vérifier la nullité de ces 88 bulletins. Dès lors, il y a lieu, pour apprécier l'influence d'une telle irrégularité sur les résultats du scrutin, d'ajouter hypothétiquement 88 suffrages aux suffrages exprimés, dont le nombre serait ainsi porté à 5 081, la majorité absolue s'élevant alors à 2541. En ajoutant 88 suffrages à ceux obtenus par les deux listes, celle conduite par M. C... -E... obtiendrait 2 615 voix et celle conduite par M. B... 2 554 suffrages. Les deux listes franchiraient ainsi le seuil de la majorité absolue des suffrages exprimés. Dès lors, l'irrégularité affectant ces 88 bulletins empêche de déterminer avec certitude le résultat de l'élection.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, M. C...-E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement qu'il attaque, le tribunal administratif de Saint-Denis a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 dans la commune de Sainte-Rose.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B...qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... au titre des mêmes dispositions.


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. C...-E... est rejetée
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à MM. D...C...-E... et A...B....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.