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Ariane Web: Conseil d'État 418547, lecture du 28 février 2018, ECLI:FR:CEORD:2018:418547.20180228

Décision n° 418547
28 février 2018
Conseil d'État

N° 418547
ECLI:FR:CEORD:2018:418547.20180228
Inédit au recueil Lebon



Lecture du mercredi 28 février 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association de défense de l'audiovisuel public (ADAP) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler la décision n° 2018-13 du 31 janvier 2018 du Conseil supérieur de l'audiovisuel mettant fin aux fonctions du président de Radio France ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :
- la condition d'urgence est remplie, dès lors que l'exécution de la décision contestée risque de créer une situation irréversible en ce qu'elle implique la désignation d'un nouveau président de Radio France ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de communication audiovisuelle en ce que, d'une part, la décision contestée n'est fondée sur aucun motif légal et, d'autre part, les motifs retenus caractérisent une atteinte au principe d'indépendance des médias publics ;
- la procédure de révocation, à supposer qu'elle constitue une procédure de sanction, d'une part, ne se fonde sur aucune cause et aucun manquement identifié qui puisse faire l'objet d'une sanction et, d'autre part, méconnaît le principe non bis in idem.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la décision n° 93599, 93600, 93601, 93602 du 4 novembre 1977 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux ;
- le code de justice administrative ;




Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Eu égard aux pouvoirs dont dispose le juge des référés en vertu de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, l'association de défense de l'audiovisuel public (ADAP) doit être regardée comme demandant au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de ces dispositions, la suspension de la décision du 31 janvier 2018 du Conseil supérieur de l'audiovisuel mettant fin aux fonctions du président de Radio France en application de l'article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, aux termes duquel : " Le mandat des présidents de la société France Télévisions, de la société Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France peut leur être retiré, par décision motivée [du Conseil supérieur de l'audiovisuel], dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 47-4 (...) ".

3. L'association requérante fait valoir qu'elle a notamment pour objet, selon ses statuts, de " veiller à l'indépendance des médias publics, leur stratégie, leur gestion, leur engagement éditorial " et de " contribuer à leur renforcement, ceci incluant d'éventuels recours contre les décisions injustifiées ou contraires au droit de ces organismes ... ".

4. Toutefois, l'intérêt ainsi invoqué par cette association n'est pas de nature à lui donner qualité pour demander la suspension, ni d'ailleurs l'annulation, de la décision individuelle par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel retire son mandat au président de l'une des sociétés mentionnées à l'article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986.

5. Il suit de là que la requête de l'association requérante est irrecevable et doit être rejetée en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du même code.



O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de l'association de défense de l'audiovisuel public est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association de défense de l'audiovisuel public.
Copie en sera adressée pour information au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à M. B... A...et à la ministre de la culture.