Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 431604, lecture du 13 février 2020, ECLI:FR:CECHS:2020:431604.20200213

Décision n° 431604
13 février 2020
Conseil d'État

N° 431604
ECLI:FR:CECHS:2020:431604.20200213
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre
M. Philippe Ranquet, rapporteur
M. Laurent Cytermann, rapporteur public
SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX, avocats


Lecture du jeudi 13 février 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 7 mars 2019 par lequel le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a prononcé sa mise à la retraite à compter du 1er septembre 2019 et de la décision du 12 mars 2019 par laquelle celui-ci a rejeté sa demande de prolongation d'activité jusqu'au 31 août 2020, et d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse de lui accorder la prolongation d'activité jusqu'au 31 août 2020 ou, à défaut, de réexaminer sa demande. Par une ordonnance n° 1905647 du 29 mai 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Par un pourvoi, enregistré le 12 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de Mme B... A... ;



Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... demande l'annulation de l'ordonnance du 29 mai 2019 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la suspension de la décision, notifiée par lettre du 12 mars 2019, par laquelle le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n'a fait droit à sa demande de prolongation d'activité que jusqu'au 31 août 2019 et de l'arrêté du 7 mars 2019, notifié par la même lettre, par lequel la même autorité a prononcé sa mise à la retraite à compter du 1er septembre 2019.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / (...) " ;

3. D'autre part, aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. (...) ".

4. Eu égard à sa portée, la décision par laquelle l'autorité administrative refuse de faire droit à une demande de maintien en activité présentée en application de ces dispositions doit être regardée comme un refus d'autorisation, au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise qu'après avoir cité les dispositions dont il était fait application et les conditions qu'elles posent, la décision du 12 mars 2019 s'est bornée à se référer à l'avis défavorable de la rectrice de l'académie de Versailles pour justifier du refus opposé à la demande de prolongation d'activité de Mme A... entre le 1er septembre 2019 et le 31 août 2020 sans préciser les éléments de fait sur lesquels reposait cette appréciation et sans que cet avis n'ait été adressé à l'intéressée. Par suite, en jugeant que le moyen tiré de ce que la décision du 12 mars 2019 était insuffisamment motivée n'était pas propre à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

6. Il y a lieu, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, d'annuler cette ordonnance.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par Mme A..., en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

8. Pour justifier de l'urgence que présente la suspension de la décision du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, Mme A... se borne à faire valoir que la décision attaquée lui refusant la prolongation de son activité jusqu'au 31 août 2020 la placera dans une situation financière difficile, sans apporter de justificatifs au soutien de ces allégations. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'elle était informée depuis le 27 novembre 2017 de son admission à la retraite à compter du 14 avril 2019. Par suite, les circonstances qu'elle invoque ne sont pas de nature à révéler une situation d'urgence justifiant que soit prononcée la suspension de l'exécution de la décision attaquée.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander la suspension de l'arrêté du 7 mars 2019 et de la décision notifiée par la lettre du 12 mars 2019.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas en l'espèce la partie perdante.


D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'ordonnance du 29 mai 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.



Voir aussi