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Ariane Web: Conseil d'État 427738, lecture du 29 juillet 2020, ECLI:FR:CECHR:2020:427738.20200729

Décision n° 427738
29 juillet 2020
Conseil d'État

N° 427738
ECLI:FR:CECHR:2020:427738.20200729
Mentionné aux tables du recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
M. Laurent-Xavier Simonel, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
LE PRADO ; SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH, avocats


Lecture du mercredi 29 juillet 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de la région de Chevreuse a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération du 10 décembre 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Chevreuse a décidé de mettre à sa disposition le terrain constituant l'assiette foncière de différents équipements sportifs intercommunaux et la décision du 28 mars 2013 par laquelle le maire de Chevreuse a rejeté son recours gracieux du 29 janvier 2013 tendant au retrait de cette délibération et à l'exécution des délibérations antérieures relatives à la cession de ce terrain.

Par un jugement n° 1303539 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a annulé la délibération du 10 décembre 2012 et la décision du maire du 28 mars 2013 en tant qu'elle refuse de prendre les mesures en vue de procéder au retrait de cette délibération et à l'exécution de la délibération du 19 mars 2012 ayant approuvé la cession de ce terrain au SIVOM de la région de Chevreuse.

Par un arrêt n° 17VE00334 du 6 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et a rejeté la demande du SIVOM de la région de Chevreuse présentée devant le tribunal administratif.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 février, 21 mars et 17 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SIVOM de la région de Chevreuse demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent-Xavier Simonel, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat du syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de la région de Chevreuse et à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la commune de Chevreuse ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les parcelles cadastrées section AT 140, AT 146 et AT 148 appartenant à la commune de Chevreuse ont fait l'objet d'une mise à disposition au profit du SIVOM de la région de Chevreuse pour qu'y soient construits une piscine intercommunale ouverte en 1972, puis un centre aquatique en 2008, en recevant de la sorte une affectation ininterrompue au service public. Par une délibération du 19 mars 2012, le conseil municipal de Chevreuse, d'une part, a approuvé la cession au SIVOM de la région de Chevreuse, pour un montant symbolique, de ces parcelles et de différents biens nécessaires à l'exercice des compétences " piscine intercommunale Alex Jany " et " aires de sauts et de lancers " à charge que l'affectation actuelle n'en soit pas modifiée et, d'autre part, a autorisé le maire à signer l'acte notarié à venir ainsi que tous documents se rapportant à cette délibération. Toutefois, au vu de l'avis de France Domaine du 7 novembre 2012 estimant la valeur vénale du seul terrain à 870 000 euros, le conseil municipal, par une nouvelle délibération du 10 décembre 2012, a décidé la poursuite de la mise à disposition du terrain et autorisé le maire à signer une convention de mise à disposition. Par un jugement du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a, sur la demande du SIVOM de la région de Chevreuse, d'une part, annulé la délibération du 10 décembre 2012 ainsi que la décision du maire de la commune de Chevreuse du 28 mars 2013 refusant de la retirer et, d'autre part, enjoint au maire d'assurer l'exécution de la délibération du conseil municipal du 19 mars 2012 en signant l'acte notarié de la vente de terrain autorisée par cette délibération. Le SIVOM de la région de Chevreuse se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 décembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par le SIVOM de la région de Chevreuse devant le tribunal administratif de Versailles.

2. Aux termes de l'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques, en vigueur depuis le 1er juillet 2006 : " Les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1, qui relèvent de leur domaine public, peuvent être cédés à l'amiable, sans déclassement préalable, entre ces personnes publiques, lorsqu'ils sont destinés à l'exercice des compétences de la personne publique qui les acquiert et relèveront de son domaine public ".

3. La délibération du conseil municipal d'une commune autorisant, décidant ou approuvant le transfert de propriété de biens immobiliers relevant de son domaine public au profit d'une autre personne publique, dans les conditions mentionnées à l'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques, constitue un acte créateur de droits dès lors que les parties ont marqué leur accord sur l'objet et les conditions financières de l'opération et que la réalisation du transfert de propriété n'est soumise à aucune condition. Par suite, en jugeant que seul l'acte en la forme administrative ou l'acte notarié entérinant la cession amiable de biens du domaine public entre personnes publiques est créateur de droits, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. Le SIVOM de la région de Chevreuse est donc fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du SIVOM de la région de Chevreuse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 6 décembre 2018 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Chevreuse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au syndicat intercommunal à vocation multiple de la région de Chevreuse et à la commune de Chevreuse.



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