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Ariane Web: Conseil d'État 434802, lecture du 14 octobre 2020, ECLI:FR:CECHR:2020:434802.20201014

Décision n° 434802
14 octobre 2020
Conseil d'État

N° 434802
ECLI:FR:CECHR:2020:434802.20201014
Mentionné aux tables du recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
Mme Coralie Albumazard, rapporteur
M. Stéphane Hoynck, rapporteur public
CABINET BRIARD, avocats


Lecture du mercredi 14 octobre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire en réplique et un autre mémoire, enregistrés le 23 septembre 2019, le 28 février 2020 et le 20 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association pour une consommation éthique demande au Conseil d'Etat :

1°) de saisir à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne des questions suivantes : " Le droit de l'Union européenne et en particulier le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, lorsque la mention de l'origine d'un produit entrant dans le champ de ce règlement est obligatoire, impose-t-il pour un produit provenant d'un territoire occupé, non autonome, contesté ou violant gravement le droit international et les droits de l'homme la mention de ce territoire lorsque tel est le cas ' A défaut, les dispositions du règlement, notamment celles de son chapitre VI, permettent-elles à un Etat membre d'exiger de telles mentions ' " ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du refus du ministre de l'économie et des finances de prendre plusieurs avis aux opérateurs économiques relatifs à l'indication de l'origine des marchandises issues, d'abord, de tous les territoires occupés ou colonisés selon les institutions de l'Organisation des nations unies (ONU), ensuite, des territoires contestés, et enfin, de pays dans lesquels l'ONU a constaté que les standards universellement reconnus en matière de droits de l'homme étaient bafoués ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'économie et des finances, sous astreinte de 50 000 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux semaines suivant la notification de la décision à intervenir, de prendre plusieurs avis aux opérateurs économiques relatifs à l'indication de l'origine des denrées alimentaires issues des territoires occupés ou colonisés, tels que constatés par l'ONU, des territoires contestés et des territoires dont le régime politique méconnaît gravement les droits de l'homme, tels que constatés par les organes de l'ONU ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de l'Association pour une consommation éthique ;



Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre en date du 25 juillet 2019, l'Association pour une consommation éthique a demandé au ministre de l'économie et des finances de prendre des avis aux opérateurs économiques relatifs à l'étiquetage des produits alimentaires provenant d'un territoire occupé, non autonome, contesté ou violant gravement le droit international et les droits de l'homme, afin de se conformer au règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires. En l'absence de réponse à sa demande, elle demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le refus implicite opposé à cette demande.

2. S'il est loisible à une autorité publique de prendre des circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif visant à faire connaître l'interprétation qu'elle retient de l'état du droit, elle n'est jamais tenue de le faire. Il en va de même lorsque le droit applicable résulte d'un règlement de l'Union européenne tel que le règlement (UE) n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 dont se prévaut en l'espèce l'association requérante, l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoyant qu'il est directement applicable dans l'ordre juridique interne. Il s'ensuit que le refus opposé à la demande de l'association requérante ne constitue pas une décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir.

3. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de l'Association pour une consommation éthique ne sont pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel, de même en conséquence que les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'Association pour une consommation éthique est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Association pour une consommation éthique et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.



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