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Ariane Web: Conseil d'État 442583, lecture du 12 mars 2021, ECLI:FR:CECHR:2021:442583.20210312

Décision n° 442583
12 mars 2021
Conseil d'État

N° 442583
ECLI:FR:CECHR:2021:442583.20210312
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
M. Hervé Cassagnabère, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public


Lecture du vendredi 12 mars 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) Natixis Lease Immo, devenue BPCE Lease Immo, a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017 pour deux immeubles situés respectivement aux 17 et 21 rue de Chazelles à Paris (17ème arrondissement).

Par un jugement nos 1911036, 1911054 du 12 juin 2020, ce tribunal a fait droit à ces demandes.

Par un pourvoi enregistré le 7 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de la société Natixis Lease Immo.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Natixis Lease Immo a demandé la décharge de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017 à raison d'immeubles, situés aux 17 et 21 rue de Chazelles à Paris, qu'elle loue à un établissement de santé. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Paris ayant fait droit à cette demande.

2. Aux termes de l'article 1520 du code général des impôts : " I. Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service (...) ". Aux termes de l'article 1521 du même code : " I. La taxe porte sur toutes les propriétés soumises à la taxe foncière sur les propriétés bâties ou qui en sont temporairement exonérées ainsi que sur les logements des fonctionnaires ou employés civils et militaires visés à l'article 1523 / (...) III. 1. Les conseils municipaux déterminent annuellement les cas où les locaux à usage industriel ou commercial peuvent être exonérés de la taxe. La liste des établissements exonérés est affichée à la porte de la mairie. / (...) 4. Sauf délibération contraire des communes ou des organes délibérants de leurs groupements, les locaux situés dans la partie de la commune où ne fonctionne pas le service d'enlèvement des ordures sont exonérés de la taxe ". En vertu de l'article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, les communes peuvent, alternativement, instituer une redevance d'enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu lorsqu'elles assurent au moins la collecte des déchets de ménage.

3. Il résulte de ces dispositions que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères prévue par le code général des impôts a, contrairement à la redevance du même nom susceptible d'être instituée en vertu du code général des collectivités territoriales, le caractère d'une imposition de toute nature et non celui d'une redevance pour services rendus. La circonstance que le propriétaire d'un immeuble passible de la taxe foncière sur les propriétés bâties situé dans une zone desservie par le service éliminerait lui-même les déchets ménagers produits par cet immeuble, sans recourir à l'utilisation du service, n'est pas, par elle-même, de nature à justifier une absence d'assujettissement.

4. Pour juger que l'immeuble en litige devait être regardé comme situé dans une partie de la commune où le service d'enlèvement des ordures ne fonctionne pas, au sens et pour l'application des dispositions précitées du 4 du III de l'article 1521 du code général des impôts, et faire, par suite, droit aux demandes de la société Natixis Lease Immo, le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il résultait de la réglementation sanitaire applicable que la collecte et l'élimination des déchets des établissements hospitaliers était assurée par ces établissements eux-mêmes et ne relevait pas du service de collecte et de traitement des déchets ménagers assuré par la collectivité. En statuant ainsi le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. Il résulte de l'instruction que les locaux à raison desquels les impositions litigieuses ont été établies sont situés en bordure d'une voie publique sur laquelle circulent les véhicules du service municipal de collecte des ordures ménagères. La société Natixis Lease Immo n'ayant ni établi ni même allégué un éloignement particulier entre le point de passage de ces véhicules et l'entrée des locaux en cause, elle ne saurait prétendre à être exonérée de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le fondement des dispositions du 4 du III de l'article 1521 du code général des impôts, quand bien même l'établissement de santé qu'est son locataire ne ferait pas usage du service compte tenu des contraintes que fait peser sur lui la réglementation sanitaire applicable. Ses demandes doivent, par suite, être rejetées, de même, par voie de conséquence, que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.





D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 juin 2020 est annulé.
Article 2 : Les demandes de la société Natixis Lease Immo ainsi que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratives sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société anonyme BPCE Lease Immo.


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