Conseil d'État
N° 429467
ECLI:FR:CECHR:2021:429467.20210420
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Matias de Sainte Lorette, rapporteur
Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public
CABINET COLIN - STOCLET, avocats
Lecture du mardi 20 avril 2021
Vu la procédure suivante :
La société Catana Group a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013 à raison de la réintégration d'une moins-value de cession. Par un jugement n° 1603194 du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18MA00177 du 5 février 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Catana Group demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Colin - Stoclet, avocat de la société Catana Group ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Poncin Yachts, aux droits de laquelle vient la société Catana Group, a procédé le 22 octobre 2012 à l'augmentation du capital de sa filiale, la société Harmony Yachts, par incorporation de la somme de 7 794 000 euros correspondant au montant du solde créditeur de son compte courant d'associé. Elle a ensuite cédé, le 2 novembre 2012, les actions qu'elle détenait de la société Harmony Yachts pour la somme d'un euro. Par un jugement du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la société Catana Group tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés correspondant à la réintégration, dans son résultat imposable de l'exercice clos le 31 août 2013, de la moins-value résultant de la cession des titres de la société Harmony Yachts. La société Catana Group demande l'annulation de l'arrêt du 5 février 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.
2. Aux termes du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, issu du I de l'article 18 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 : " La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d'un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d'inscription en comptabilité n'est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d'inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la limitation de la déductibilité des moins-values à court terme qu'elles prévoient s'applique seulement en cas de cession de titres de participations ayant fait l'objet d'une émission nouvelle en contrepartie d'un apport.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'apport réalisé le 22 octobre 2012 par la société Poncin Yachts au profit de la société Harmony Yachts a été effectué par élévation de la valeur nominale des titres de la filiale et non par émission d'actions nouvelles. Dès lors, en rejetant les conclusions d'appel de la société Catana Group tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration, sur le fondement des dispositions du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, de la moins-value résultant de la cession des titres de la société Harmony Yachts, alors que ces titres n'avaient pas fait l'objet d'une émission nouvelle dans le cadre de l'apport, la cour a méconnu le champ d'application de ces dispositions. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, la société Catana Group est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Catana Group au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 5 février 2019 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : L'Etat versera à la société Catana Group la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Catana Group et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
N° 429467
ECLI:FR:CECHR:2021:429467.20210420
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Matias de Sainte Lorette, rapporteur
Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public
CABINET COLIN - STOCLET, avocats
Lecture du mardi 20 avril 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société Catana Group a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013 à raison de la réintégration d'une moins-value de cession. Par un jugement n° 1603194 du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18MA00177 du 5 février 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Catana Group demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Colin - Stoclet, avocat de la société Catana Group ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Poncin Yachts, aux droits de laquelle vient la société Catana Group, a procédé le 22 octobre 2012 à l'augmentation du capital de sa filiale, la société Harmony Yachts, par incorporation de la somme de 7 794 000 euros correspondant au montant du solde créditeur de son compte courant d'associé. Elle a ensuite cédé, le 2 novembre 2012, les actions qu'elle détenait de la société Harmony Yachts pour la somme d'un euro. Par un jugement du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la société Catana Group tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés correspondant à la réintégration, dans son résultat imposable de l'exercice clos le 31 août 2013, de la moins-value résultant de la cession des titres de la société Harmony Yachts. La société Catana Group demande l'annulation de l'arrêt du 5 février 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.
2. Aux termes du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, issu du I de l'article 18 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 : " La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d'un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d'inscription en comptabilité n'est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d'inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la limitation de la déductibilité des moins-values à court terme qu'elles prévoient s'applique seulement en cas de cession de titres de participations ayant fait l'objet d'une émission nouvelle en contrepartie d'un apport.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'apport réalisé le 22 octobre 2012 par la société Poncin Yachts au profit de la société Harmony Yachts a été effectué par élévation de la valeur nominale des titres de la filiale et non par émission d'actions nouvelles. Dès lors, en rejetant les conclusions d'appel de la société Catana Group tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration, sur le fondement des dispositions du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, de la moins-value résultant de la cession des titres de la société Harmony Yachts, alors que ces titres n'avaient pas fait l'objet d'une émission nouvelle dans le cadre de l'apport, la cour a méconnu le champ d'application de ces dispositions. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, la société Catana Group est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Catana Group au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 5 février 2019 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : L'Etat versera à la société Catana Group la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Catana Group et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.