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Ariane Web: Conseil d'État 449770, lecture du 11 mars 2022, ECLI:FR:CECHR:2022:449770.20220311

Décision n° 449770
11 mars 2022
Conseil d'État

N° 449770
ECLI:FR:CECHR:2022:449770.20220311
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
M. Jean-Marc Vié, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public
SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats


Lecture du vendredi 11 mars 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Le syndicat mixte départemental de valorisation et de traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme (VALTOM), a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014 dans les rôles de la commune de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) à raison d'une installation située 1 chemin des domaines de Beaulieu. Le directeur départemental des finances publiques du Puy-de-Dôme a soumis d'office au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en application des articles R. 199-1 et R. 200-3 du livre des procédures fiscales, les réclamations formées par ce même syndicat tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015, 2016, 2017 et 2018 à raison de la même installation. Par un jugement nos 1600854, 1700182, 1801936, 2000165 du 15 décembre 2020, le tribunal a rejeté ces demandes.

Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 17 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat mixte VALTOM demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du syndicat Valtom ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le syndicat mixte VALTOM a été assujetti à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2014 à 2018 à raison d'un centre de traitement des déchets édifié et exploité, sur un terrain dont il est propriétaire à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), par la société Vernéa dans le cadre d'un bail emphytéotique administratif, lequel n'avait pas fait l'objet de la publication au fichier immobilier prévue à l'article 1402 du code général des impôts, assorti d'une convention de délégation de service public. Il se pourvoit en cassation contre le jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

2. Aux termes de l'article 1382 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les immeubles nationaux, les immeubles régionaux, les immeubles départementaux pour les taxes perçues par les communes et par le département auquel ils appartiennent et les immeubles communaux pour les taxes perçues par les départements et par la commune à laquelle ils appartiennent, lorsqu'ils sont affectés à un service public ou d'utilité générale et non productifs de revenus, notamment : (.....) / Sous réserve des dispositions du 9°, cette exonération n'est pas applicable aux immeubles qui appartiennent à des établissements publics autres que les établissements publics de coopération intercommunale, les syndicats mixtes, les pôles métropolitains, les ententes interdépartementales, les établissements publics scientifiques, d'enseignement et d'assistance ainsi que les établissements visés aux articles 12 et 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ni aux organismes de l'Etat, des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial. / Les immeubles qui sont incorporés gratuitement au domaine de l'Etat, des collectivités locales ou des établissements publics, en vertu d'une convention, sont imposables jusqu'à l'expiration de celle-ci. (....) ".

3. Dans le cadre d'une délégation de service public ou d'une concession de travaux mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l'acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l'ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, à la personne publique dès leur réalisation ou leur acquisition. La faculté offerte aux parties au contrat d'en disposer autrement ne peut s'exercer, en ce qui concerne les droits réels dont peut bénéficier le cocontractant sur le domaine public d'une collectivité territoriale, que selon les modalités et dans les limites définies aux articles L. 1311-2 à L. 1311-8 du code général des collectivités territoriales, entrés en vigueur le 1er juillet 2006, et à condition que la nature et l'usage des droits consentis ne soient pas susceptibles d'affecter la continuité du service public.

4. Pour écarter le moyen tiré de ce que les biens construits par la société Vernéa dans le cadre du bail emphytéotique administratif devaient bénéficier de l'exonération prévue par le 1° de l'article 1382 du code général des impôts, le tribunal administratif s'est fondé, d'une part, sur ce qu'il était constant que ces biens étaient nécessaires au fonctionnement du service public et que l'article 30 du bail stipulait que la propriété en revenait gratuitement au syndicat mixte requérant et, d'autre part, sur ce que, contrairement à ce qu'il soutenait, ce syndicat ne pouvait être regardé comme ayant lui-même financé ces biens dans le cadre de la convention tripartite conclue le 25 juillet 2013 avec la société Vernéa et des établissements financiers " relative au financement du pôle de traitement des déchets ménagers et assimilés pour le VALTOM ", les flux financiers en cause ne correspondant pas au coût des installations en cause. Il en a déduit que ces biens devaient être imposés au nom du syndicat, pendant la durée du bail emphytéotique en application du dernier alinéa de ce même 1.

5. En jugeant ainsi, sans dénaturer les stipulations contractuelles dont il était saisi, compte tenu de ce que l'absence de publication au ficher immobilier du bail en application de l'article 1402 du code général des impôts ne permettait pas de rendre redevable de la taxe l'emphytéote, que l'incorporation des biens au domaine du syndicat devait être regardée comme réalisée gratuitement au sens et pour l'application du dernier alinéa du 1° de l'article 1382 du code général des impôts, le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé son jugement, n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce. Il n'a, par suite, pas commis d'erreur de droit en en déduisant, quand bien même les immeubles en cause seraient affectés à un service public et improductifs de revenus, que le syndicat mixte ne pouvait revendiquer le bénéfice de l'exonération qu'il sollicitait.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat mixte VALTOM n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du syndicat mixte VALTOM est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat mixte départemental de valorisation et de traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré à l'issue de la séance du 23 février 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. I... C..., M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. G... K..., M. D... J..., M. A... L..., M. H... F..., M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 11 mars 2022.

Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Marc Vié
La secrétaire :
Signé : Mme B... E...



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