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Ariane Web: Conseil d'État 465145, lecture du 25 janvier 2023, ECLI:FR:CECHR:2023:465145.20230125

Décision n° 465145
25 janvier 2023
Conseil d'État

N° 465145
ECLI:FR:CECHR:2023:465145.20230125
Mentionné aux tables du recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Paul Bernard, rapporteur
M. Philippe Ranquet, rapporteur public


Lecture du mercredi 25 janvier 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Pau, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 14 février 2022 rejetant le compte de campagne de Mme B... C... et de M. D... A..., candidats au premier tour des élections départementales qui s'est déroulé le 20 juin 2021 dans le canton d'Auch 2 (Gers).

Par un jugement n° 2200382 du 20 mai 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette saisine et a fixé à 585 euros le montant du remboursement dû par l'Etat à Mme C... et à M. A....

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 juin et 9 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de constater qu'elle a rejeté à bon droit le compte de campagne de Mme C... et de M. A....


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code électoral ;
- la loi n° 2021-191 du 22 février 2021 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :

1. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne déposé par Mme B... C... et M. D... A..., membres d'un binôme de candidats au premier tour des élections départementales qui s'est déroulé le 20 juin 2021 dans le canton d'Auch 2 (Gers), et a saisi le juge de l'élection en application de l'article L. 52-15 du code électoral. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté cette saisine et fixé à 585 euros le montant du remboursement forfaitaire dû par l'Etat.

2. Selon l'article L. 52-15 du code électoral, la commission approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. Lorsqu'elle a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, elle saisit le juge de l'élection.

3. Les articles L. 52-4 à L. 52-6 du code électoral prévoient que tout candidat à une élection déclare un mandataire qui, sous réserve de certaines exceptions, recueille les fonds destinés au financement de la campagne et règle les dépenses engagées en vue de l'élection en étant tenu d'ouvrir un compte de dépôt unique retraçant la totalité de ses opérations financières. Aux termes de l'article L. 52-12 du même code : " I.- Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement des dépenses électorales prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s'il a bénéficié de dons de personnes physiques (...) / II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d'une copie des contrats de prêts conclus en application de l'article L. 52-7-1 du présent code, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte / III.- Le compte de campagne est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables. Ce dernier met le compte de campagne en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. / Cette présentation n'est pas obligatoire : / 1° Lorsque le candidat ou le candidat tête de liste n'est pas tenu d'établir un compte de campagne, en application du I du présent article ; / 2° Ou lorsque le candidat ou le candidat tête de liste a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n'excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, il transmet à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à l'appui du compte de campagne, les relevés du compte bancaire ouvert en application de l'article L. 52-5 ou de l'article L. 52-6 (...) ". En l'espèce, la date limite de dépôt du compte de campagne était fixée au vendredi 17 septembre 2021 à 18 heures par l'article 11 de la loi du 22 février 2021 portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique.

4. Il résulte de l'instruction que Mme C... et M. A... n'avaient pas joint le relevé des opérations postérieures au 30 juin 2021 effectuées sur le compte bancaire ouvert par leur mandataire financier au compte de campagne qu'ils ont déposé dans le délai rappelé au point 3, et n'ont pas davantage fourni ce document dans le cadre de l'instruction menée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Cette dernière a rejeté leur compte de campagne pour ce motif. Toutefois, le relevé des opérations joint à ce compte de campagne faisait apparaître un virement au titre d'un prêt financier consenti par une formation politique. Le compte de campagne, établi par un expert-comptable, était en outre accompagné de documents comptables, en particulier un rapprochement bancaire pour les mois de juillet et août 2021 et le journal de banque, qui retraçaient la totalité des opérations intervenues sur le compte bancaire ouvert par le mandataire financier en précisant les dates et les comptes d'origine des virements correspondant à un second prêt consenti par la même formation et à l'apport personnel du candidat, pour un montant total de 833 euros de recettes, et les numéros, les bénéficiaires et les dates de débit de cinq chèques pour un montant total de 586 euros de dépenses. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard au faible nombre des opérations réalisées et à la modicité des sommes engagées, et dès lors que les documents produits permettaient de contrôler la réalité des recettes et des dépenses inscrites au compte de campagne, de s'assurer que celles-ci étaient cohérentes avec les opérations qu'il mentionne et qu'aucune autre anomalie n'apparaissait, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa saisine.

5. Il résulte de ce qui précède que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à Mme B... C... et à M. D... A....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer.


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