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Ariane Web: Conseil d'État 476634, lecture du 5 avril 2024, ECLI:FR:CECHS:2024:476634.20240405

Décision n° 476634
5 avril 2024
Conseil d'État

N° 476634
ECLI:FR:CECHS:2024:476634.20240405
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
M. Jean-Luc Nevache, président
M. Jean-Luc Matt, rapporteur
M. Thomas Janicot, rapporteur public


Lecture du vendredi 5 avril 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 31 juillet 2023 et le 7 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux de réadaptation (FHP-SMR) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 mai 2023 définissant les critères et les pondérations du montant populationnel mentionné à l'article R. 162-34-4 du code de la sécurité sociale et la liste de critères mentionnée à l'article R. 162-34-10 du même code ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 mars 2024, présentée par la Fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux de réadaptation ;



Considérant ce qui suit :

1. En vertu du I de l'article L. 162-23 du code de la sécurité sociale, chaque année, est défini un objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux activités de soins médicaux de réadaptation qui sont exercées par les différents établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 du même code. Cet objectif est constitué du montant annuel de charges supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés au cours de l'année dans le cadre de ces activités. Conformément au I de l'article R. 162-34-3 de ce code : " Chaque année, dans un délai de quinze jours suivant la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget arrêtent : / 1° Le montant de l'objectif de dépenses mentionné au I de l'article L. 162-23 (...) ". L'article L. 162 23-3 du même code prévoit que, pour ces activités de soins, les différents établissements de santé mentionnés à l'article L. 162 22-6 " bénéficient d'un financement mixte sous la forme de recettes issues directement de l'activité, dans les conditions prévues au I de l'article L. 162-23-4, et d'une dotation forfaitaire visant à sécuriser de manière pluriannuelle le financement de leurs activités, selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat ". Sur le fondement de ces dispositions, l'article R. 162-34-2 précise que " le financement mixte mentionné à l'article L. 162-23-3 se compose : / (...) 2° D'une dotation forfaitaire dont le montant est calculé dans les conditions fixées à l'article R. 162-34-10 ".

2. En premier lieu, en vertu de l'article R. 162-34-4 du code de la sécurité sociale : " I.- Chaque année, dans un délai de quinze jours suivant la publication de l'arrêté mentionné au I de l'article R. 162-34-3, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent au sein du montant mentionné au 1° du I de cet article : / 1° La part affectée à la dotation forfaitaire des établissements mentionnée au 2° de l'article R. 162-34-2 (...) / II.- Chaque année, dans un délai de quinze jours suivant la publication de l'arrêté prévu au I du présent article, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent pour chacune des régions : / 1° Au sein de la part mentionnée au 1° du I : / a) Le montant populationnel tenant compte de critères relatifs aux caractéristiques démographiques et à l'état de santé de la population de la région. Ces critères et leur pondération sont définis par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'après avoir arrêté la part de l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux activités de soins médicaux de réadaptation affectée à la dotation forfaitaire des établissements, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale doivent arrêter, au sein de cette part affectée à la dotation forfaitaire des établissements, chaque année et pour chacune des régions, le montant populationnel en tenant compte de critères relatifs aux caractéristiques démographiques et à l'état de santé de la population de chaque région qu'il leur incombe de définir, de même que leur pondération, ainsi qu'ils ont entendu le faire par l'arrêté en litige.

3. A ce titre, l'article 1er de l'arrêté attaqué dispose que : " Conformément à l'article R. 162-34-4 du code de la sécurité sociale, la dotation forfaitaire mentionnée au 2° de l'article R. 162-34-2 du même code est composée des montants suivants : / 1° Un montant populationnel calculé selon des modalités tenant compte de critères relatifs aux caractéristiques démographiques et l'état de santé de la population dans les conditions prévues à l'article 2 du présent arrêté (...) ". L'article 2 de l'arrêté attaqué prévoit que : " I.- Le montant populationnel mentionné au a du 1° du II de l'article R. 162-34-4 du code de la sécurité sociale est fonction notamment de l'évaluation résultant de deux volets : / 1° Un volet " proximité " ; / 2° Un volet de " recours infrarégionaux " lui-même composé de cinq sous-volets : (...) / II.- Pour chacun des volets, les caractéristiques démographiques et d'état de santé de la population ainsi que leur pondération sont fixées en annexe 1 du présent arrêté ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions de l'arrêté attaqué que, contrairement à ce que soutient la fédération requérante, celui-ci définit l'ensemble des critères relatifs aux caractéristiques démographiques et à l'état de santé de la population de chaque région dont il est tenu compte par les ministres pour arrêter chaque année pour chacune des régions le montant populationnel. Le moyen tiré de ce que les ministres auraient méconnu l'étendue de la compétence qui leur est confiée sur ce point par le II de l'article R. 162-34-4 du code de la sécurité sociale manque donc en fait.

5. En deuxième lieu, en vertu du I de l'article R. 162-34-9 du code de la sécurité sociale : " Après la publication de l'arrêté mentionné au II de l'article R. 162-34-4, le directeur général de l'agence régionale de santé arrête pour chaque établissement les montants : / 1° De la dotation forfaitaire issu du montant populationnel mentionné au 1° du II de l'article R. 162-34-4 dans les conditions fixées au I de l'article R. 162-34-10 (...) ". Selon le I de l'article R. 162-34-10 du même code : " Le montant mentionné au 1° du I de l'article R. 162-34-9 est réparti entre établissements de santé de la région en tenant compte de l'offre hospitalière existante, sur la base de critères fixés au niveau régional par le directeur général de l'agence régionale de santé après avis de la section du comité mentionnée au 3° de l'article R. 162-29-3, notamment à partir d'une liste de critères arrêtée par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Les critères régionaux ne prennent pas en compte les données d'activité ". Pour l'application de ces dernières dispositions, l'article 3 de l'arrêté attaqué prévoit que : " Les critères mentionnés au I de l'article R. 162-34-10 du code de la sécurité sociale peuvent notamment être établis sur la base des critères inscrits sur la liste figurant en annexe 2 du présent arrêté ".

5. D'une part, l'article R. 162-34-10 du code de la sécurité sociale impose seulement aux directeurs généraux des agences régionales de santé de partir notamment de la liste de critères fixés par les ministres chargés et de la santé et de la sécurité sociale pour déterminer les critères régionaux sur la base desquels, en tenant compte de l'offre hospitalière existante, le montant populationnel arrêté pour la région est réparti entre établissements de santé. La fédération requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait ces dispositions en se bornant à prévoir que les critères régionaux " peuvent " notamment être établis sur la base des critères qu'il fixe en son annexe 2 et non qu'ils le " doivent ". D'autre part, les critères relatifs au taux d'occupation, à l'adéquation de la durée moyenne de séjour aux différents cas médicaux traités par l'établissement et au poids de l'activité de l'établissement dans l'activité totale du territoire, fixés par cette annexe, ne prennent en compte les données d'activité de l'établissement de santé concerné que pour mesurer l'offre hospitalière existante et non directement pour répartir le montant populationnel en fonction de ces données d'activité. Par suite, la fédération requérante n'est pas non plus fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait à ce titre l'article R. 162-34-10 du code de la sécurité sociale.

6. En dernier lieu, ni le critère du " nombre de places en services de soins infirmiers à domicile par habitant de la région ", fixé à l'annexe 1 au titre des caractéristiques démographiques et d'état de santé de la population, ni le critère du " nombre de places dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées ", fixé à l'annexe 2 s'agissant des caractéristiques populationnelles, au titre des indicateurs d'accessibilité à l'offre de soins et d'équipement, ni ceux, enfin, fixés à la même annexe s'agissant des caractéristiques des établissements, au titre des critères décrivant le profil d'activité de l'établissement, des " thématiques du projet médical ou d'établissement en cohérence avec le plan régional de santé ", ou de la " participation à un plan national de santé publique " ne sont, contrairement à ce que soutient la fédération requérante, imprécis ou équivoques et ne peuvent être regardés comme méconnaissant l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la Fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux de réadaptation doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la Fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux de réadaptation est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux de réadaptation et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : M. Jean-Luc Nevache, assesseur, présidant ; Mme Célia Verot, conseillère d'Etat et M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 5 avril 2024.


Le président :
Signé : M. Jean-Luc Nevache
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Luc Matt
Le secrétaire :
Signé : M. Hervé Herber