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Ariane Web: Conseil d'État 497619, lecture du 10 juillet 2025, ECLI:FR:CECHR:2025:497619.20250710

Décision n° 497619
10 juillet 2025
Conseil d'État

N° 497619
ECLI:FR:CECHR:2025:497619.20250710
Mentionné aux tables du recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Liza Bellulo, rapporteure
M. Clément Malverti, rapporteur public
SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH, avocats


Lecture du jeudi 10 juillet 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. D... E... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 juillet 2021 par lequel le maire de Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) a délivré à Mme C... B... un permis de construire deux maisons. Par un jugement n° 2200582 du 28 mai 2024, ce tribunal a annulé cet arrêté.

Par une ordonnance n° 24VE01757 du 5 septembre 2024, enregistrée le 6 septembre 2024 au secrétariat du Conseil d'Etat, la présidente de la cour d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, présenté par Mme B..., enregistré le 26 juin 2024 au greffe de cette cour.

Par ce pourvoi et par trois autres mémoires, enregistrés les 16 décembre 2024, 14 février et 21 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Liza Bellulo, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Guérin - Gougeon, avocat de Mme B..., et à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de M. A... ;




Considérant ce qui suit :

1. Mme C... B... se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif du 28 mai 2024 ayant annulé le permis de construire qui lui avait été délivré le 23 juillet 2021 par le maire de Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine), en vue de construire deux maisons individuelles, dont l'une prenant appui un garage déjà édifié.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B... n'a pas établi, ni même allégué, qu'elle n'aurait pas été en mesure de faire état, avant la clôture de l'instruction, du permis de construire qui, selon elle, avait autorisé la construction d'un garage sur son terrain. Dès lors, la requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait entaché son jugement d'irrégularité ou méconnu son office en s'abstenant de rouvrir l'instruction à la suite de la production de cette pièce.

3. En deuxième lieu, lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative est saisie d'une demande qui ne satisfait pas à cette exigence, elle est tenue de la rejeter et d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble des éléments qui doivent être soumis à son autorisation.

4. C'est sans erreur de droit qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, qu'il ne ressortait d'aucune des pièces du dossier que la construction existante aurait été autorisée, le tribunal a retenu, pour annuler l'arrêté litigieux, que le maire de Fontenay-aux-Roses était tenu de refuser le permis de construire sollicité, qui avait pour objet de réaliser des travaux sur cette construction, et de l'inviter à présenter une demande portant sur le garage existant et sur les maisons individuelles projetées.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 60041 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". En prononçant l'annulation du permis de construire litigieux puis en écartant l'ensemble des autres moyens de la requête comme inopérants, le tribunal administratif, qui, ce faisant, s'est prononcé explicitement sur tous les moyens qu'il a estimé fondés, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme.

6. Enfin, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 4, le moyen reconnu comme fondé par le tribunal justifie légalement le dispositif d'annulation de son jugement, il n'y a pas lieu pour le juge de cassation de censurer les motifs par lesquels le tribunal a écarté comme inopérants les autres moyens soulevés devant lui, motifs auxquels ne s'attache pas d'autorité de chose jugée. Par suite, la requérante ne saurait utilement soutenir que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en écartant ces autres moyens comme inopérants.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros à verser à M. A... sur le fondement de ces dispositions.


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.
Article 2 : Mme B... versera à M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B..., à la commune de Fontenay-aux-Roses et à M. D... E... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 25 juin 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etats et Mme Liza Bellulo, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 10 juillet 2025.


Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Liza Bellulo
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard


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