Conseil d'État
N° 469499
ECLI:FR:CECHR:2025:469499.20250716
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Cécile Fraval, rapporteure
M. Cyrille Beaufils, rapporteur public
SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES, avocats
Lecture du mercredi 16 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
L'Institution de gestion sociale des armées (IGESA) a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner l'Etat à lui verser la somme de 174 020, 09 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des décisions du 13 septembre 2013 par lesquelles l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse l'a autorisée à licencier six de ses salariés pour motif économique. Par un jugement n° 1800439 du 6 mars 2020, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 25 050, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, et rejeté le surplus de ses conclusions.
Par un arrêt n° 20MA01763 du 7 octobre 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de l'IGESA, condamné l'Etat à verser à cette dernière une somme de 30 300, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia en ce qu'il a de contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de la requête de l'IGESA.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés le 7 décembre 2022, le 6 mars 2023 et le 2 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'IGESA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Fraval, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Cyrille Beaufils, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de l'IGESA ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par huit décisions du 13 septembre 2013, l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse a autorisé l'Institution de gestion sociale des armées (IGESA), établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministère de la défense, à licencier, pour motif économique, huit salariés protégés affectés au Foyer central des forces françaises et éléments civils stationnés en Allemagne, lesquels ont ensuite été licenciés. Toutefois, par un jugement du 15 janvier 2015 devenu définitif, le tribunal administratif de Bastia a, sur la demande de six de ces huit salariés protégés, annulé les décisions autorisant leur licenciement, au motif qu'elles avaient été prises par une autorité territorialement incompétente. Après avoir été, à la suite de ces annulations, condamnée par des jugements du 15 juin 2017 du conseil de prud'hommes de Mulhouse à verser à ces six salariés protégés diverses indemnités, l'IGESA a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner l'Etat à lui verser la somme de 174 020, 09 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des décisions l'ayant autorisée à licencier ces salariés. Par un jugement du 6 mars 2020, le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 25 050, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant pour l'IGESA du versement à cinq salariés protégés de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail et rejeté le surplus de la demande de l'institution. L'IGESA se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 octobre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur son appel, condamné l'Etat à lui verser une somme de 30 300, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia en ce qu'il a de contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de sa requête.
2. En application des dispositions du code du travail, le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l'autorité administrative. L'illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l'égard de l'employeur, pour autant qu'il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain. Lorsqu'un employeur sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision administrative l'ayant autorisé à licencier un salarié protégé entachée d'incompétence, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement intervenir. Dans le cas où il juge qu'une même décision aurait été prise par l'autorité compétente, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme la conséquence directe du vice d'incompétence qui entachait la décision administrative illégale.
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir relevé que les décisions du 13 septembre 2013 de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse avaient été annulées par le tribunal administratif de Bastia pour un vice d'incompétence, a jugé que le préjudice allégué par l'IGESA relatif aux indemnités, afférentes au statut de salarié protégé des intéressés, qu'elle avait dû verser aux salariés licenciés en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, était en lien direct avec une telle illégalité fautive mais que tel n'était pas le cas du préjudice causé par le versement aux mêmes salariés des indemnités, dues en cas de licenciement sans cause réelle ni sérieuse, prévues par l'article L. 1235-3 du même code, dès lors que le tribunal administratif n'avait pas annulé les décisions attaquées en raison de l'inexacte appréciation par l'autorité administrative du motif économique des licenciements projetés. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, ainsi qu'il a été dit au point précédent, de rechercher si les mêmes décisions que celles annulées par le tribunal administratif auraient pu légalement intervenir, compte tenu de ce que l'IGESA faisait valoir s'agissant de l'appréciation par l'administration du motif économique des licenciements projetés, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que l'IGESA est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur le partage de responsabilité :
6. En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut, le cas échéant, être tenu compte, pour déterminer l'étendue de la responsabilité de l'Etat à l'égard de l'employeur à raison de la délivrance d'une autorisation de licenciement entachée d'illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l'employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l'employeur en sollicitant la délivrance d'une telle autorisation.
7. En premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, le tribunal administratif de Bastia, par un jugement du 15 janvier 2015 devenu définitif, a annulé les décisions du 13 septembre 2013 par lesquelles l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse a autorisé l'IGESA à licencier six salariés protégés au motif que cette inspectrice n'était pas territorialement compétente pour statuer sur les demandes d'autorisation de licenciement qui lui avaient été transmises. En outre, il résulte de l'instruction que le Foyer central des forces françaises et éléments civils stationnés en Allemagne, au sein duquel travaillaient les salariés protégés licenciés pour motif économique, qui assurait un service de restauration et d'hôtellerie à un tarif préférentiel ainsi que certaines activités de loisirs au bénéfice des personnels civils et militaires actifs ou retraités du ministère de la défense et de leur famille, relevait du secteur des activités à caractère social assurées par l'IGESA, que cette institution, chargée d'offrir des prestations d'action sociale aux personnels du ministère des armées ainsi qu'à leurs familles, mettait en oeuvre également dans d'autres établissements. A ce titre, il ne résulte d'aucune des pièces produites par les parties dans le cadre de la présente instance, que le motif économique des licenciements projetés, apprécié au niveau de l'ensemble du secteur de l'activité sociale de l'IGESA, était établi, ce que les parties ne contestent pas et qu'au demeurant le conseil de prud'hommes de Mulhouse a également retenu, par des jugements du 15 juin 2017 devenus irrévocables. Dans ces conditions, le motif économique n'étant pas établi, les mêmes décisions n'auraient pas pu être légalement prises par l'inspecteur du travail compétent.
8. En second lieu, il résulte de l'instruction qu'en sollicitant l'autorisation de procéder à ces licenciements sur le fondement d'un motif économique alors que ce motif n'était pas établi, l'IGESA a, pour sa part et contrairement à ce qu'elle soutient, commis une faute qui est de nature à exonérer l'Etat de 80 % de sa responsabilité.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne le versement par l'IGESA aux salariés protégés concernés de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail :
9. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2422-4 du code du travail : " Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. / L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. "
10. Il résulte de l'instruction que, par cinq jugements du conseil de prud'hommes de Mulhouse du 15 juin 2017, l'IGESA a été condamnée à verser à cinq salariés protégés la somme cumulée de 36 841,38 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 2422-4 du code du travail cité au point précédent. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de ces indemnités est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées par le jugement du 15 janvier 2015 du tribunal administratif de Bastia. Toutefois, compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il sera fait une exacte appréciation des responsabilités encourues en condamnant l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 7 368,28 euros, correspondant à 20% du montant cumulé de 36 841,38 euros qu'elle s'est trouvée contrainte de payer à ces cinq salariés en application des dispositions précitées de l'article L. 2422-4 du code du travail. Sur ce point, il y a lieu de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020.
En ce qui concerne le versement par l'IGESA aux salariés de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail :
11. Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail : " Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. / Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur (...) ".
12. Il résulte de l'instruction que, par six jugements du 15 juin 2017 du conseil de prud'hommes de Mulhouse, l'IGESA a été condamnée à verser à six salariés protégés la somme cumulée de 112 819,52 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 1235-3 du code du travail cité au point précédent. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de cette somme est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées par le jugement du 15 janvier 2015 du tribunal administratif de Bastia devenu définitif. Par suite, l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la réparation du préjudice résultant pour elle du versement, auquel elle a été condamnée par le juge judiciaire, à six salariés protégés d'une indemnité au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail. Compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à l'IGESA la somme de 22 563,90 euros en réparation de ce préjudice.
En ce qui concerne les frais d'honoraires d'avocat exposés par l'IGESA dans le cadre des instances prud'homales :
13. L'IGESA demande le remboursement des frais d'honoraires d'avocat qu'elle a exposés devant le conseil de prud'hommes de Mulhouse et le juge départiteur de cette juridiction pour un montant total de 13 260 euros, dont elle justifie la réalité en produisant les factures correspondantes. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de ces frais est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées. Toutefois, compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il sera fait une exacte appréciation des responsabilités encourues en condamnant l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 2 652 euros, correspondant à 20 % du montant total des frais d'honoraires d'avocat qu'elle a exposés devant le conseil de prud'hommes de Mulhouse. Il y a lieu de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020.
En ce qui concerne les frais mis à la charge de l'IGESA au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre des instances prudhommales :
14. Il résulte de l'instruction que le conseil de prud'hommes de Mulhouse a, par six jugements du 15 juin 2017, mis à la charge de l'IGESA la somme cumulée de 7 500 euros, au titre des frais engagés devant la juridiction judiciaire et supportés par les salariés protégés qu'elle avait licenciés, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Le préjudice résultant pour l'IGESA du paiement de cette somme, due au titre des frais de justice exposés par ces salariés dans le cadre des procédures qu'ils ont engagées devant le juge judiciaire aux fins d'indemnisation de l'illégalité et du défaut de cause réelle et sérieuse de leurs licenciements, présente un lien direct et certain avec l'illégalité fautive ayant entaché les décisions autorisant leur licenciement. Par suite, l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à condamner l'Etat à lui verser une somme en réparation de ce préjudice. Compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à l'IGESA, à ce titre, la somme de 1 500 euros.
En ce qui concerne les frais qui auraient été mis à la charge de l'IGESA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le tribunal administratif de Bastia :
15. Les frais de justice exposés devant le juge administratif en conséquence directe d'une faute de l'administration sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à celle-ci, dans les conditions suivantes. Lorsqu'une partie avait la qualité de demanderesse à une instance à l'issue de laquelle le juge annule pour excès de pouvoir une décision administrative illégale, la part de son préjudice correspondant à des frais exposés et non compris dans les dépens est réputée intégralement réparée par la décision que prend le juge dans l'instance en cause sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Lorsqu'en revanche une partie autre que l'administration ayant pris la décision illégale avait la qualité de défenderesse à une telle instance ou relève appel du jugement rendu à l'issue de l'instance ayant annulé cette décision, les frais de justice utilement exposés par elle, ainsi que, le cas échéant, les frais mis à sa charge par le juge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à l'administration.
16. Si l'IGESA avait la qualité de défenderesse à l'instance à l'issue de laquelle le tribunal administratif de Bastia a, par un jugement du 15 janvier 2015, annulé pour excès de pouvoir les décisions autorisant le licenciement de six de ses salariés protégés, il ressort des termes mêmes de ce jugement qu'aucune somme n'a été mise à la charge de l'IGESA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il en résulte que l'IGESA n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice allégué à ce titre.
17. Il résulte de tout ce qui précède que l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné l'Etat à ne lui allouer que la somme de 25 050,69 euros. L'IGESA est seulement fondée à demander que cette somme soit portée à la somme de 34 084,18 euros, qui portera intérêts à compter du 26 décembre 2017, date de réception de la demande indemnitaire préalable de l'IGESA. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts au 26 décembre 2018 et à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'IGESA, tant en cassation qu'en appel, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 octobre 2022 est annulé.
Article 2 : La somme de 25 050,69 euros que l'Etat a été condamné à verser à l'IGESA par le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia est portée à 34 084,18 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à la date du 26 décembre 2018, puis à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par l'IGESA devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par l'IGESA, en appel et en cassation, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à l'Institution de gestion sociale des armées et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Copie en sera adressée pour information au ministre des armées.
N° 469499
ECLI:FR:CECHR:2025:469499.20250716
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Cécile Fraval, rapporteure
M. Cyrille Beaufils, rapporteur public
SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES, avocats
Lecture du mercredi 16 juillet 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
L'Institution de gestion sociale des armées (IGESA) a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner l'Etat à lui verser la somme de 174 020, 09 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des décisions du 13 septembre 2013 par lesquelles l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse l'a autorisée à licencier six de ses salariés pour motif économique. Par un jugement n° 1800439 du 6 mars 2020, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 25 050, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, et rejeté le surplus de ses conclusions.
Par un arrêt n° 20MA01763 du 7 octobre 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de l'IGESA, condamné l'Etat à verser à cette dernière une somme de 30 300, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia en ce qu'il a de contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de la requête de l'IGESA.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés le 7 décembre 2022, le 6 mars 2023 et le 2 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'IGESA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Fraval, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Cyrille Beaufils, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de l'IGESA ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par huit décisions du 13 septembre 2013, l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse a autorisé l'Institution de gestion sociale des armées (IGESA), établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministère de la défense, à licencier, pour motif économique, huit salariés protégés affectés au Foyer central des forces françaises et éléments civils stationnés en Allemagne, lesquels ont ensuite été licenciés. Toutefois, par un jugement du 15 janvier 2015 devenu définitif, le tribunal administratif de Bastia a, sur la demande de six de ces huit salariés protégés, annulé les décisions autorisant leur licenciement, au motif qu'elles avaient été prises par une autorité territorialement incompétente. Après avoir été, à la suite de ces annulations, condamnée par des jugements du 15 juin 2017 du conseil de prud'hommes de Mulhouse à verser à ces six salariés protégés diverses indemnités, l'IGESA a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner l'Etat à lui verser la somme de 174 020, 09 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des décisions l'ayant autorisée à licencier ces salariés. Par un jugement du 6 mars 2020, le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 25 050, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant pour l'IGESA du versement à cinq salariés protégés de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail et rejeté le surplus de la demande de l'institution. L'IGESA se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 octobre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur son appel, condamné l'Etat à lui verser une somme de 30 300, 69 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017 et de leur capitalisation, réformé le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia en ce qu'il a de contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de sa requête.
2. En application des dispositions du code du travail, le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l'autorité administrative. L'illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l'égard de l'employeur, pour autant qu'il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain. Lorsqu'un employeur sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision administrative l'ayant autorisé à licencier un salarié protégé entachée d'incompétence, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement intervenir. Dans le cas où il juge qu'une même décision aurait été prise par l'autorité compétente, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme la conséquence directe du vice d'incompétence qui entachait la décision administrative illégale.
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir relevé que les décisions du 13 septembre 2013 de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse avaient été annulées par le tribunal administratif de Bastia pour un vice d'incompétence, a jugé que le préjudice allégué par l'IGESA relatif aux indemnités, afférentes au statut de salarié protégé des intéressés, qu'elle avait dû verser aux salariés licenciés en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, était en lien direct avec une telle illégalité fautive mais que tel n'était pas le cas du préjudice causé par le versement aux mêmes salariés des indemnités, dues en cas de licenciement sans cause réelle ni sérieuse, prévues par l'article L. 1235-3 du même code, dès lors que le tribunal administratif n'avait pas annulé les décisions attaquées en raison de l'inexacte appréciation par l'autorité administrative du motif économique des licenciements projetés. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, ainsi qu'il a été dit au point précédent, de rechercher si les mêmes décisions que celles annulées par le tribunal administratif auraient pu légalement intervenir, compte tenu de ce que l'IGESA faisait valoir s'agissant de l'appréciation par l'administration du motif économique des licenciements projetés, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que l'IGESA est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur le partage de responsabilité :
6. En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut, le cas échéant, être tenu compte, pour déterminer l'étendue de la responsabilité de l'Etat à l'égard de l'employeur à raison de la délivrance d'une autorisation de licenciement entachée d'illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l'employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l'employeur en sollicitant la délivrance d'une telle autorisation.
7. En premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, le tribunal administratif de Bastia, par un jugement du 15 janvier 2015 devenu définitif, a annulé les décisions du 13 septembre 2013 par lesquelles l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Haute-Corse a autorisé l'IGESA à licencier six salariés protégés au motif que cette inspectrice n'était pas territorialement compétente pour statuer sur les demandes d'autorisation de licenciement qui lui avaient été transmises. En outre, il résulte de l'instruction que le Foyer central des forces françaises et éléments civils stationnés en Allemagne, au sein duquel travaillaient les salariés protégés licenciés pour motif économique, qui assurait un service de restauration et d'hôtellerie à un tarif préférentiel ainsi que certaines activités de loisirs au bénéfice des personnels civils et militaires actifs ou retraités du ministère de la défense et de leur famille, relevait du secteur des activités à caractère social assurées par l'IGESA, que cette institution, chargée d'offrir des prestations d'action sociale aux personnels du ministère des armées ainsi qu'à leurs familles, mettait en oeuvre également dans d'autres établissements. A ce titre, il ne résulte d'aucune des pièces produites par les parties dans le cadre de la présente instance, que le motif économique des licenciements projetés, apprécié au niveau de l'ensemble du secteur de l'activité sociale de l'IGESA, était établi, ce que les parties ne contestent pas et qu'au demeurant le conseil de prud'hommes de Mulhouse a également retenu, par des jugements du 15 juin 2017 devenus irrévocables. Dans ces conditions, le motif économique n'étant pas établi, les mêmes décisions n'auraient pas pu être légalement prises par l'inspecteur du travail compétent.
8. En second lieu, il résulte de l'instruction qu'en sollicitant l'autorisation de procéder à ces licenciements sur le fondement d'un motif économique alors que ce motif n'était pas établi, l'IGESA a, pour sa part et contrairement à ce qu'elle soutient, commis une faute qui est de nature à exonérer l'Etat de 80 % de sa responsabilité.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne le versement par l'IGESA aux salariés protégés concernés de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail :
9. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2422-4 du code du travail : " Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. / L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. "
10. Il résulte de l'instruction que, par cinq jugements du conseil de prud'hommes de Mulhouse du 15 juin 2017, l'IGESA a été condamnée à verser à cinq salariés protégés la somme cumulée de 36 841,38 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 2422-4 du code du travail cité au point précédent. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de ces indemnités est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées par le jugement du 15 janvier 2015 du tribunal administratif de Bastia. Toutefois, compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il sera fait une exacte appréciation des responsabilités encourues en condamnant l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 7 368,28 euros, correspondant à 20% du montant cumulé de 36 841,38 euros qu'elle s'est trouvée contrainte de payer à ces cinq salariés en application des dispositions précitées de l'article L. 2422-4 du code du travail. Sur ce point, il y a lieu de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020.
En ce qui concerne le versement par l'IGESA aux salariés de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail :
11. Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail : " Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. / Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur (...) ".
12. Il résulte de l'instruction que, par six jugements du 15 juin 2017 du conseil de prud'hommes de Mulhouse, l'IGESA a été condamnée à verser à six salariés protégés la somme cumulée de 112 819,52 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 1235-3 du code du travail cité au point précédent. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de cette somme est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées par le jugement du 15 janvier 2015 du tribunal administratif de Bastia devenu définitif. Par suite, l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la réparation du préjudice résultant pour elle du versement, auquel elle a été condamnée par le juge judiciaire, à six salariés protégés d'une indemnité au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail. Compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à l'IGESA la somme de 22 563,90 euros en réparation de ce préjudice.
En ce qui concerne les frais d'honoraires d'avocat exposés par l'IGESA dans le cadre des instances prud'homales :
13. L'IGESA demande le remboursement des frais d'honoraires d'avocat qu'elle a exposés devant le conseil de prud'hommes de Mulhouse et le juge départiteur de cette juridiction pour un montant total de 13 260 euros, dont elle justifie la réalité en produisant les factures correspondantes. Le préjudice résultant pour l'IGESA du versement de ces frais est en lien direct avec l'illégalité fautive dont sont entachées les autorisations de licenciement annulées. Toutefois, compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il sera fait une exacte appréciation des responsabilités encourues en condamnant l'Etat à verser à l'IGESA une somme de 2 652 euros, correspondant à 20 % du montant total des frais d'honoraires d'avocat qu'elle a exposés devant le conseil de prud'hommes de Mulhouse. Il y a lieu de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020.
En ce qui concerne les frais mis à la charge de l'IGESA au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre des instances prudhommales :
14. Il résulte de l'instruction que le conseil de prud'hommes de Mulhouse a, par six jugements du 15 juin 2017, mis à la charge de l'IGESA la somme cumulée de 7 500 euros, au titre des frais engagés devant la juridiction judiciaire et supportés par les salariés protégés qu'elle avait licenciés, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Le préjudice résultant pour l'IGESA du paiement de cette somme, due au titre des frais de justice exposés par ces salariés dans le cadre des procédures qu'ils ont engagées devant le juge judiciaire aux fins d'indemnisation de l'illégalité et du défaut de cause réelle et sérieuse de leurs licenciements, présente un lien direct et certain avec l'illégalité fautive ayant entaché les décisions autorisant leur licenciement. Par suite, l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à condamner l'Etat à lui verser une somme en réparation de ce préjudice. Compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 8, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à l'IGESA, à ce titre, la somme de 1 500 euros.
En ce qui concerne les frais qui auraient été mis à la charge de l'IGESA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le tribunal administratif de Bastia :
15. Les frais de justice exposés devant le juge administratif en conséquence directe d'une faute de l'administration sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à celle-ci, dans les conditions suivantes. Lorsqu'une partie avait la qualité de demanderesse à une instance à l'issue de laquelle le juge annule pour excès de pouvoir une décision administrative illégale, la part de son préjudice correspondant à des frais exposés et non compris dans les dépens est réputée intégralement réparée par la décision que prend le juge dans l'instance en cause sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Lorsqu'en revanche une partie autre que l'administration ayant pris la décision illégale avait la qualité de défenderesse à une telle instance ou relève appel du jugement rendu à l'issue de l'instance ayant annulé cette décision, les frais de justice utilement exposés par elle, ainsi que, le cas échéant, les frais mis à sa charge par le juge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à l'administration.
16. Si l'IGESA avait la qualité de défenderesse à l'instance à l'issue de laquelle le tribunal administratif de Bastia a, par un jugement du 15 janvier 2015, annulé pour excès de pouvoir les décisions autorisant le licenciement de six de ses salariés protégés, il ressort des termes mêmes de ce jugement qu'aucune somme n'a été mise à la charge de l'IGESA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il en résulte que l'IGESA n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice allégué à ce titre.
17. Il résulte de tout ce qui précède que l'IGESA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné l'Etat à ne lui allouer que la somme de 25 050,69 euros. L'IGESA est seulement fondée à demander que cette somme soit portée à la somme de 34 084,18 euros, qui portera intérêts à compter du 26 décembre 2017, date de réception de la demande indemnitaire préalable de l'IGESA. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts au 26 décembre 2018 et à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'IGESA, tant en cassation qu'en appel, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 octobre 2022 est annulé.
Article 2 : La somme de 25 050,69 euros que l'Etat a été condamné à verser à l'IGESA par le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia est portée à 34 084,18 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à la date du 26 décembre 2018, puis à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 mars 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par l'IGESA devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par l'IGESA, en appel et en cassation, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à l'Institution de gestion sociale des armées et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Copie en sera adressée pour information au ministre des armées.