Conseil d'État
N° 500233
ECLI:FR:CECHR:2025:500233.20251107
Mentionné aux tables du recueil Lebon
1ère - 4ème chambres réunies
Mme Claire Legras, rapporteure
SCP POUPET & KACENELENBOGEN, avocats
Lecture du vendredi 7 novembre 2025
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée Financière Stratégie et Développement a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision n° 90/2024 du 24 juin 2024 du maire de Cergy (Val-d'Oise) d'exercer le droit de préemption de la commune sur bien cadastré section AS nos 61 et 62, situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise et le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57, ainsi que de la décision implicite par laquelle ce maire a rejeté son recours gracieux. Par une ordonnance n° 2417398 du 20 décembre 2024, le juge des référés de ce tribunal a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 et 15 janvier, le 7 mars et le 10 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Financière Stratégie et Développement demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Cergy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Claire Legras, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Poupet, Kacenelenbogen, avocat de la société Financière Stratégie et Développement et à la SCP Buk Lament, Robillot, avocat de la commune de Cergy ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise que, par une décision du 24 juin 2024, le maire de Cergy a exercé le droit de préemption de la commune sur le bien cadastré section AS nos 61 et 62 situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise, ainsi que le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57. La société Financière Stratégie et Développement, titulaire d'une promesse de vente de ce même bien, se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 20 décembre 2024 par laquelle le juge des référés de ce tribunal a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cette décision, ainsi que du rejet de son recours gracieux.
Sur le pourvoi :
3. L'article L. 213-2 du code de l'urbanisme prévoit que toute aliénation d'un immeuble soumis au droit de préemption urbain " est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le propriétaire à la mairie de la commune où se trouve situé le bien. Cette déclaration comporte obligatoirement l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée (...). Le titulaire du droit de préemption peut, dans le délai de deux mois prévu au troisième alinéa du présent article, adresser au propriétaire une demande unique de communication des documents permettant d'apprécier la consistance et l'état de l'immeuble, ainsi que, le cas échéant, la situation sociale, financière et patrimoniale de la société civile immobilière. (...) / Le silence du titulaire du droit de préemption pendant deux mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / Le délai est suspendu à compter de la réception de la demande mentionnée au premier alinéa ou de la demande de visite du bien. Il reprend à compter de la réception des documents par le titulaire du droit de préemption, du refus par le propriétaire de la visite du bien ou de la visite du bien par le titulaire du droit de préemption. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire dispose d'un mois pour prendre sa décision. Passés ces délais, son silence vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / Lorsqu'il envisage d'acquérir le bien, le titulaire du droit de préemption transmet sans délai copie de la déclaration d'intention d'aliéner au responsable départemental des services fiscaux. La décision du titulaire fait l'objet d'une publication. Elle est notifiée au vendeur, au notaire et, le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner qui avait l'intention d'acquérir le bien (...) ". Aux termes de l'article R. 2145 du même code : " Dans un délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration préalable, le titulaire du droit de préemption notifie au cédant soit sa décision d'acquérir aux prix et conditions indiqués dans la déclaration préalable, soit son offre d'acquérir aux prix et conditions fixés par l'autorité judiciaire saisie dans les conditions prévues à l'article R. 214-6, soit sa décision de renoncer à l'exercice du droit de préemption. / Il notifie sa décision au cédant par pli recommandé avec demande d'avis de réception (...). / Le silence gardé par le titulaire du droit de préemption au terme du délai fixé au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice de son droit. "
4. Il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption urbain dispose pour exercer ce droit d'un délai de deux mois qui court à compter de la réception de la déclaration préalable. Ces dispositions visent notamment à ce que les propriétaires qui ont décidé de vendre un bien susceptible de faire l'objet d'une décision de préemption sachent de façon certaine et dans de brefs délais s'ils peuvent ou non poursuivre l'aliénation envisagée. Elles constituent donc pour eux une garantie.
5. Toutefois, d'une part, dans le cas où la déclaration initiale est entachée d'une erreur substantielle portant sur la consistance du bien objet de la vente, son prix ou les conditions de son aliénation, le délai de deux mois ne court qu'à compter de la réception par l'administration d'une déclaration rectifiée.
6. D'autre part, ce délai est suspendu à compter de la réception par le propriétaire de la demande unique de communication des documents permettant d'apprécier la consistance et l'état de l'immeuble, ainsi que, le cas échéant, la situation sociale, financière et patrimoniale de la société civile immobilière ou de la demande de visite du bien effectuée par le titulaire du droit de préemption. Il reprend alors à compter de la réception des documents par le titulaire du droit de préemption, du refus par le propriétaire de la visite du bien ou de la visite du bien par le titulaire du droit de préemption. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire dispose d'un mois pour prendre sa décision.
7. Lorsqu'il a décidé de renoncer à exercer le droit de préemption, que ce soit par l'effet de l'expiration du délai de deux mois, le cas échéant suspendu ou prorogé dans les conditions rappelées aux points 5 et 6, ou par une décision explicite prise avant l'expiration de ce délai, le titulaire du droit de préemption se trouve dessaisi et ne peut, par la suite, retirer cette décision ni, par voie de conséquence, légalement exercer son droit de préemption. Si la cession est intervenue et s'il estime que la déclaration préalable sur la base de laquelle il a pris sa décision était entachée de lacunes substantielles de nature à entraîner la nullité de la cession, il lui est loisible de saisir le juge judiciaire d'une action à cette fin.
8. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif que la commune de Cergy a reçu le 27 mars 2024 une déclaration d'intention d'aliéner portant sur un immeuble " bâti sur terrain propre " constitué d'un bâtiment endommagé par un incendie à l'été 2023 que la société Buffalo Grill, propriétaire, s'était engagée, aux termes de la promesse de vente qu'elle avait conclue avec la société Financière Stratégie et Développement, acquéreuse, et qui était annexée à la déclaration, à démolir à ses frais avant le transfert de propriété pour rendre le terrain nu. Par un courrier du 19 avril 2024, la commune a indiqué à la société propriétaire du bien qu'elle ne pouvait instruire le dossier au motif que cette déclaration mentionnait " un bien bâti alors que la promesse de vente annexée fait référence à la vente d'un terrain nu " et lui a demandé de lui faire parvenir une nouvelle déclaration. Une déclaration d'intention d'aliéner rectifiée a en conséquence été adressée à la commune, qui l'a reçue le 29 avril 2024, l'immeuble en cause étant désormais désigné comme " non bâti " sur le formulaire prévu à l'article A. 213-1 du code de l'urbanisme.
9. En jugeant, dans ces circonstances, que le moyen tiré par la société requérante de la tardiveté la décision de préemption prise le 24 juin 2024 n'était pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, alors que la déclaration d'intention d'aliéner initiale, conforme à l'état du bien à la date de sa réception par la commune et assortie de la promesse de vente annexée précisant, au titre des conditions de l'aliénation projetée, que le bâtiment en cause était endommagé mais que le vendeur s'engageait à le démolir à ses frais et à livrer pour le prix convenu un terrain nu de toute construction, n'était entachée d'aucune erreur substantielle quant à la consistance du bien objet de la vente, ce dont il résultait que le délai de deux mois ouvert à la commune n'avait pu être prorogé par son courrier du 19 avril 2024 et expirait le 27 mai 2024, le juge des référés du tribunal administratif a entaché son ordonnance de dénaturation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, la société Financière Stratégie et Développement est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur l'urgence :
12. Eu égard à l'objet d'une décision de préemption et à ses effets vis-à-vis de l'acquéreur évincé, la condition d'urgence doit en principe être regardée comme remplie lorsque celui-ci demande la suspension d'une telle décision. Il peut toutefois en aller autrement dans le cas où le titulaire du droit de préemption justifie de circonstances particulières, tenant par exemple à l'intérêt s'attachant à la réalisation rapide du projet qui a donné lieu à l'exercice du droit de préemption. Il appartient au juge des référés de procéder à une appréciation globale de l'ensemble des circonstances de l'espèce qui lui est soumise.
13. En premier lieu, la mesure de suspension que le juge des référés peut prononcer sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative à l'égard d'une décision de préemption a pour effet, selon les cas, non seulement de faire obstacle à la prise de possession du bien par la collectivité publique titulaire du droit de préemption, mais également, si le transfert de propriété a été opéré à la date à laquelle il statue, d'empêcher cette collectivité de faire usage de certaines des prérogatives qui s'attachent au droit de propriété de nature à éviter que l'usage ou la disposition qu'elle fera de ce bien jusqu'à ce qu'il soit statué sur le litige au fond rendent irréversible la décision de préemption, sous réserve cependant qu'à cette date la collectivité n'en ait pas déjà disposé. Par suite, la circonstance que le transfert de propriété soit intervenu à la suite de la signature de l'acte authentique de vente le 7 novembre 2024 demeure, par elle-même, sans incidence sur l'urgence qui s'attache à cette suspension dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Cergy ne serait plus propriétaire de l'ensemble immobilier litigieux.
14. Il en va de même, en deuxième lieu, de la circonstance que la société requérante a fait le choix d'exercer un recours gracieux avant de demander la suspension de l'exécution de la décision de préemption.
15. En troisième lieu, l'absence de réalisation du projet ayant donné lieu à l'exercice du droit de préemption ne fait pas obstacle à ce que soient prises les mesures conservatoires qui pourraient s'avérer nécessaires pour garantir la sécurité du site. Par suite, la commune de Cergy ne justifie pas, en faisant état du besoin de sécurisation rapide de l'accès au terrain préempté, de circonstances particulières de nature à permettre que la condition d'urgence ne soit pas, en l'espèce, regardée comme satisfaite à l'égard de la société Financière Stratégie et Développement, acquéreur évincé.
Sur l'existence d'un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :
16. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 9 que le moyen tiré de la tardiveté de la décision de préemption est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
17. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser la mutation, le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le recyclage foncier ou le renouvellement urbain, de sauvegarder, de restaurer ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels, de renaturer ou de désartificialiser des sols, notamment en recherchant l'optimisation de l'utilisation des espaces urbanisés et à urbaniser. " Il résulte de ces dispositions que, pour exercer légalement ce droit, les collectivités titulaires du droit de préemption urbain doivent, d'une part, justifier, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, faire apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.
18. En l'espèce, la décision attaquée ne fait état d'aucun projet existant, mais se borne à mentionner le " caractère stratégique du secteur à un km du Grand Centre pour lequel des enjeux sociaux et de développement urbain sont en cours ", le fait que le quartier où est situé le bien est un quartier prioritaire de la politique de la ville afin de " restaurer l'égalité républicaine " et d'améliorer les conditions de vie et l'accès aux services et aux soins, l'objectif de développement du logement privé, la situation du bien à l'intersection de grands axes de passage où se développent des commerces et sa volonté de garantir la " mixité fonctionnelle ". En l'état de l'instruction, le moyen tiré de l'absence de justification, à la date de la décision de préemption en litige et dans cette décision, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme apparaît ainsi également propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.
19. En troisième lieu, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les moyens tirés de ce que la commune de Cergy n'était " possiblement " plus compétente pour exercer le droit de préemption, de l'incompétence " possible " du maire de Cergy pour prendre la décision litigieuse faute qu'il soit établi que le conseil municipal lui avait donné délégation à cet effet, de ce qu'il ne serait " pas possible de s'assurer " que l'avis du service des domaines visé par la décision a été reçu par la commune avant l'intervention de cette décision, de ce qu'il serait " impossible de s'assurer " que le droit de préemption a été préalablement institué sur le territoire de la commune ou que la décision de préemption serait " potentiellement tardive " en raison de sa " possible absence de transmission " au contrôle de légalité ne sont en revanche pas, en l'état de l'instruction, propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Financière Stratégie et Développement est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision de préemption du 24 juin 2024 du maire de Cergy, ainsi que du rejet de son recours gracieux, en tant qu'elle permet à la commune l'exercice des prérogatives s'attachant au droit de propriété et peut la conduire à user de ce bien dans des conditions qui rendraient irréversible cette décision de préemption et sans que cette suspension fasse obstacle à ce que la commune prenne les mesures conservatoires qui s'avéreraient nécessaires.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Financière Stratégie et Développement, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Cergy, au titre des mêmes dispositions, le versement à la société Financière Stratégie et Développement d'une somme de 6 000 euros au titre des frais exposés par elle en première instance et en cassation et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du 20 décembre 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.
Article 2 : L'exécution de la décision du 24 juin 2024 par laquelle le maire de Cergy a fait usage du droit de préemption sur le bien cadastré section AS nos 61 et 62 situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise à Cergy, ainsi que sur le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57 est suspendue en tant que cette décision permet à la commune l'exercice des prérogatives s'attachant au droit de propriété et peut la conduire à user de ce bien dans des conditions qui rendraient irréversible cette décision, ainsi que, dans la même mesure, l'exécution de la décision rejetant le recours gracieux de la société Financière Stratégie et Développement.
Article 3 : La commune de Cergy versera à la société Financière Stratégie et Développement une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Cergy présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Financière Stratégie et Développement et à la commune de Cergy.
Délibéré à l'issue de la séance du 13 octobre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Gaëlle Dumortier, Mme Anne Courrèges présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, M. Raphaël Chambon, M. Vincent Mahé, conseillers d'Etat, M. Cyril Noël, maître des requêtes et Mme Claire Legras, conseillère d'Etat-rapporteure
Rendu le 7 novembre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Claire Legras
La secrétaire :
Signé : Mme Paule Troly
N° 500233
ECLI:FR:CECHR:2025:500233.20251107
Mentionné aux tables du recueil Lebon
1ère - 4ème chambres réunies
Mme Claire Legras, rapporteure
SCP POUPET & KACENELENBOGEN, avocats
Lecture du vendredi 7 novembre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée Financière Stratégie et Développement a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision n° 90/2024 du 24 juin 2024 du maire de Cergy (Val-d'Oise) d'exercer le droit de préemption de la commune sur bien cadastré section AS nos 61 et 62, situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise et le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57, ainsi que de la décision implicite par laquelle ce maire a rejeté son recours gracieux. Par une ordonnance n° 2417398 du 20 décembre 2024, le juge des référés de ce tribunal a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 et 15 janvier, le 7 mars et le 10 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Financière Stratégie et Développement demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Cergy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Claire Legras, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Poupet, Kacenelenbogen, avocat de la société Financière Stratégie et Développement et à la SCP Buk Lament, Robillot, avocat de la commune de Cergy ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise que, par une décision du 24 juin 2024, le maire de Cergy a exercé le droit de préemption de la commune sur le bien cadastré section AS nos 61 et 62 situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise, ainsi que le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57. La société Financière Stratégie et Développement, titulaire d'une promesse de vente de ce même bien, se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 20 décembre 2024 par laquelle le juge des référés de ce tribunal a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cette décision, ainsi que du rejet de son recours gracieux.
Sur le pourvoi :
3. L'article L. 213-2 du code de l'urbanisme prévoit que toute aliénation d'un immeuble soumis au droit de préemption urbain " est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le propriétaire à la mairie de la commune où se trouve situé le bien. Cette déclaration comporte obligatoirement l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée (...). Le titulaire du droit de préemption peut, dans le délai de deux mois prévu au troisième alinéa du présent article, adresser au propriétaire une demande unique de communication des documents permettant d'apprécier la consistance et l'état de l'immeuble, ainsi que, le cas échéant, la situation sociale, financière et patrimoniale de la société civile immobilière. (...) / Le silence du titulaire du droit de préemption pendant deux mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / Le délai est suspendu à compter de la réception de la demande mentionnée au premier alinéa ou de la demande de visite du bien. Il reprend à compter de la réception des documents par le titulaire du droit de préemption, du refus par le propriétaire de la visite du bien ou de la visite du bien par le titulaire du droit de préemption. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire dispose d'un mois pour prendre sa décision. Passés ces délais, son silence vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / Lorsqu'il envisage d'acquérir le bien, le titulaire du droit de préemption transmet sans délai copie de la déclaration d'intention d'aliéner au responsable départemental des services fiscaux. La décision du titulaire fait l'objet d'une publication. Elle est notifiée au vendeur, au notaire et, le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner qui avait l'intention d'acquérir le bien (...) ". Aux termes de l'article R. 2145 du même code : " Dans un délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration préalable, le titulaire du droit de préemption notifie au cédant soit sa décision d'acquérir aux prix et conditions indiqués dans la déclaration préalable, soit son offre d'acquérir aux prix et conditions fixés par l'autorité judiciaire saisie dans les conditions prévues à l'article R. 214-6, soit sa décision de renoncer à l'exercice du droit de préemption. / Il notifie sa décision au cédant par pli recommandé avec demande d'avis de réception (...). / Le silence gardé par le titulaire du droit de préemption au terme du délai fixé au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice de son droit. "
4. Il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption urbain dispose pour exercer ce droit d'un délai de deux mois qui court à compter de la réception de la déclaration préalable. Ces dispositions visent notamment à ce que les propriétaires qui ont décidé de vendre un bien susceptible de faire l'objet d'une décision de préemption sachent de façon certaine et dans de brefs délais s'ils peuvent ou non poursuivre l'aliénation envisagée. Elles constituent donc pour eux une garantie.
5. Toutefois, d'une part, dans le cas où la déclaration initiale est entachée d'une erreur substantielle portant sur la consistance du bien objet de la vente, son prix ou les conditions de son aliénation, le délai de deux mois ne court qu'à compter de la réception par l'administration d'une déclaration rectifiée.
6. D'autre part, ce délai est suspendu à compter de la réception par le propriétaire de la demande unique de communication des documents permettant d'apprécier la consistance et l'état de l'immeuble, ainsi que, le cas échéant, la situation sociale, financière et patrimoniale de la société civile immobilière ou de la demande de visite du bien effectuée par le titulaire du droit de préemption. Il reprend alors à compter de la réception des documents par le titulaire du droit de préemption, du refus par le propriétaire de la visite du bien ou de la visite du bien par le titulaire du droit de préemption. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire dispose d'un mois pour prendre sa décision.
7. Lorsqu'il a décidé de renoncer à exercer le droit de préemption, que ce soit par l'effet de l'expiration du délai de deux mois, le cas échéant suspendu ou prorogé dans les conditions rappelées aux points 5 et 6, ou par une décision explicite prise avant l'expiration de ce délai, le titulaire du droit de préemption se trouve dessaisi et ne peut, par la suite, retirer cette décision ni, par voie de conséquence, légalement exercer son droit de préemption. Si la cession est intervenue et s'il estime que la déclaration préalable sur la base de laquelle il a pris sa décision était entachée de lacunes substantielles de nature à entraîner la nullité de la cession, il lui est loisible de saisir le juge judiciaire d'une action à cette fin.
8. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif que la commune de Cergy a reçu le 27 mars 2024 une déclaration d'intention d'aliéner portant sur un immeuble " bâti sur terrain propre " constitué d'un bâtiment endommagé par un incendie à l'été 2023 que la société Buffalo Grill, propriétaire, s'était engagée, aux termes de la promesse de vente qu'elle avait conclue avec la société Financière Stratégie et Développement, acquéreuse, et qui était annexée à la déclaration, à démolir à ses frais avant le transfert de propriété pour rendre le terrain nu. Par un courrier du 19 avril 2024, la commune a indiqué à la société propriétaire du bien qu'elle ne pouvait instruire le dossier au motif que cette déclaration mentionnait " un bien bâti alors que la promesse de vente annexée fait référence à la vente d'un terrain nu " et lui a demandé de lui faire parvenir une nouvelle déclaration. Une déclaration d'intention d'aliéner rectifiée a en conséquence été adressée à la commune, qui l'a reçue le 29 avril 2024, l'immeuble en cause étant désormais désigné comme " non bâti " sur le formulaire prévu à l'article A. 213-1 du code de l'urbanisme.
9. En jugeant, dans ces circonstances, que le moyen tiré par la société requérante de la tardiveté la décision de préemption prise le 24 juin 2024 n'était pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, alors que la déclaration d'intention d'aliéner initiale, conforme à l'état du bien à la date de sa réception par la commune et assortie de la promesse de vente annexée précisant, au titre des conditions de l'aliénation projetée, que le bâtiment en cause était endommagé mais que le vendeur s'engageait à le démolir à ses frais et à livrer pour le prix convenu un terrain nu de toute construction, n'était entachée d'aucune erreur substantielle quant à la consistance du bien objet de la vente, ce dont il résultait que le délai de deux mois ouvert à la commune n'avait pu être prorogé par son courrier du 19 avril 2024 et expirait le 27 mai 2024, le juge des référés du tribunal administratif a entaché son ordonnance de dénaturation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, la société Financière Stratégie et Développement est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur l'urgence :
12. Eu égard à l'objet d'une décision de préemption et à ses effets vis-à-vis de l'acquéreur évincé, la condition d'urgence doit en principe être regardée comme remplie lorsque celui-ci demande la suspension d'une telle décision. Il peut toutefois en aller autrement dans le cas où le titulaire du droit de préemption justifie de circonstances particulières, tenant par exemple à l'intérêt s'attachant à la réalisation rapide du projet qui a donné lieu à l'exercice du droit de préemption. Il appartient au juge des référés de procéder à une appréciation globale de l'ensemble des circonstances de l'espèce qui lui est soumise.
13. En premier lieu, la mesure de suspension que le juge des référés peut prononcer sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative à l'égard d'une décision de préemption a pour effet, selon les cas, non seulement de faire obstacle à la prise de possession du bien par la collectivité publique titulaire du droit de préemption, mais également, si le transfert de propriété a été opéré à la date à laquelle il statue, d'empêcher cette collectivité de faire usage de certaines des prérogatives qui s'attachent au droit de propriété de nature à éviter que l'usage ou la disposition qu'elle fera de ce bien jusqu'à ce qu'il soit statué sur le litige au fond rendent irréversible la décision de préemption, sous réserve cependant qu'à cette date la collectivité n'en ait pas déjà disposé. Par suite, la circonstance que le transfert de propriété soit intervenu à la suite de la signature de l'acte authentique de vente le 7 novembre 2024 demeure, par elle-même, sans incidence sur l'urgence qui s'attache à cette suspension dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Cergy ne serait plus propriétaire de l'ensemble immobilier litigieux.
14. Il en va de même, en deuxième lieu, de la circonstance que la société requérante a fait le choix d'exercer un recours gracieux avant de demander la suspension de l'exécution de la décision de préemption.
15. En troisième lieu, l'absence de réalisation du projet ayant donné lieu à l'exercice du droit de préemption ne fait pas obstacle à ce que soient prises les mesures conservatoires qui pourraient s'avérer nécessaires pour garantir la sécurité du site. Par suite, la commune de Cergy ne justifie pas, en faisant état du besoin de sécurisation rapide de l'accès au terrain préempté, de circonstances particulières de nature à permettre que la condition d'urgence ne soit pas, en l'espèce, regardée comme satisfaite à l'égard de la société Financière Stratégie et Développement, acquéreur évincé.
Sur l'existence d'un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :
16. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 9 que le moyen tiré de la tardiveté de la décision de préemption est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
17. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser la mutation, le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le recyclage foncier ou le renouvellement urbain, de sauvegarder, de restaurer ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels, de renaturer ou de désartificialiser des sols, notamment en recherchant l'optimisation de l'utilisation des espaces urbanisés et à urbaniser. " Il résulte de ces dispositions que, pour exercer légalement ce droit, les collectivités titulaires du droit de préemption urbain doivent, d'une part, justifier, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, faire apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.
18. En l'espèce, la décision attaquée ne fait état d'aucun projet existant, mais se borne à mentionner le " caractère stratégique du secteur à un km du Grand Centre pour lequel des enjeux sociaux et de développement urbain sont en cours ", le fait que le quartier où est situé le bien est un quartier prioritaire de la politique de la ville afin de " restaurer l'égalité républicaine " et d'améliorer les conditions de vie et l'accès aux services et aux soins, l'objectif de développement du logement privé, la situation du bien à l'intersection de grands axes de passage où se développent des commerces et sa volonté de garantir la " mixité fonctionnelle ". En l'état de l'instruction, le moyen tiré de l'absence de justification, à la date de la décision de préemption en litige et dans cette décision, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme apparaît ainsi également propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.
19. En troisième lieu, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les moyens tirés de ce que la commune de Cergy n'était " possiblement " plus compétente pour exercer le droit de préemption, de l'incompétence " possible " du maire de Cergy pour prendre la décision litigieuse faute qu'il soit établi que le conseil municipal lui avait donné délégation à cet effet, de ce qu'il ne serait " pas possible de s'assurer " que l'avis du service des domaines visé par la décision a été reçu par la commune avant l'intervention de cette décision, de ce qu'il serait " impossible de s'assurer " que le droit de préemption a été préalablement institué sur le territoire de la commune ou que la décision de préemption serait " potentiellement tardive " en raison de sa " possible absence de transmission " au contrôle de légalité ne sont en revanche pas, en l'état de l'instruction, propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Financière Stratégie et Développement est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision de préemption du 24 juin 2024 du maire de Cergy, ainsi que du rejet de son recours gracieux, en tant qu'elle permet à la commune l'exercice des prérogatives s'attachant au droit de propriété et peut la conduire à user de ce bien dans des conditions qui rendraient irréversible cette décision de préemption et sans que cette suspension fasse obstacle à ce que la commune prenne les mesures conservatoires qui s'avéreraient nécessaires.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Financière Stratégie et Développement, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Cergy, au titre des mêmes dispositions, le versement à la société Financière Stratégie et Développement d'une somme de 6 000 euros au titre des frais exposés par elle en première instance et en cassation et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 20 décembre 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.
Article 2 : L'exécution de la décision du 24 juin 2024 par laquelle le maire de Cergy a fait usage du droit de préemption sur le bien cadastré section AS nos 61 et 62 situé 7, rue des Linandes pourpres et 23, boulevard de l'Oise à Cergy, ainsi que sur le lot n° 10 issu de la parcelle cadastrée section AS n° 57 est suspendue en tant que cette décision permet à la commune l'exercice des prérogatives s'attachant au droit de propriété et peut la conduire à user de ce bien dans des conditions qui rendraient irréversible cette décision, ainsi que, dans la même mesure, l'exécution de la décision rejetant le recours gracieux de la société Financière Stratégie et Développement.
Article 3 : La commune de Cergy versera à la société Financière Stratégie et Développement une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Cergy présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Financière Stratégie et Développement et à la commune de Cergy.
Délibéré à l'issue de la séance du 13 octobre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Gaëlle Dumortier, Mme Anne Courrèges présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, M. Raphaël Chambon, M. Vincent Mahé, conseillers d'Etat, M. Cyril Noël, maître des requêtes et Mme Claire Legras, conseillère d'Etat-rapporteure
Rendu le 7 novembre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Claire Legras
La secrétaire :
Signé : Mme Paule Troly