CAA de PARIS
N° 20PA02076
4ème chambre
Mme HEERS, président
M. Pascal MANTZ, rapporteur
M. BARONNET, rapporteur public
CABINET ORIER RISSER AVOCATS, avocats
Lecture du vendredi 11 mars 2022
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 16 juillet 2018 par laquelle le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a refusé de valider sa candidature au poste de consul honoraire au Guyana.
Par un jugement n° 1820946/5-3 du 3 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 août 2020 et le 11 février 2021, M. B..., représenté par Me Orier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus d'accès au poste de consul honoraire n'est pas motivée, en méconnaissance du 6° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; en effet, ayant été nominé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères avant l'édiction de la décision attaquée, cette dernière lui est donc défavorable ; en outre, sa nomination en qualité de consul honoraire représentait pour lui un aboutissement professionnel et personnel important, constitutif d'un avantage certain qui lui a été refusé, alors qu'il remplissait les conditions légales pour l'obtenir ;
- il a exercé ses fonctions de consul honoraire avec l'accord des autorités françaises et l'autorisation verbale des autorités guyaniennes, valant exequatur au sens de l'article 12.1 de la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, qui n'exige à cet égard aucune condition de forme ;
- l'exercice des fonctions de consul honoraire " de facto " n'est pas caractérisé, alors qu'il remplit ses missions avec sérieux et loyauté, et ne pouvait constituer un motif valable de rupture du lien de confiance ;
- les motifs de fait sur lesquels s'est fondé le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire pour lui opposer la rupture du lien de confiance sont entachés d'inexactitude matérielle ;
- le motif invoqué par les premiers juges et repris en défense par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, tiré d'un " positionnement non maîtrisé au regard de la fonction et de ses exigences ", est erroné ;
- dès lors que les premiers juges ont écarté les événements ayant trait à sa candidature aux élections législatives ainsi que sa volonté de reprendre ses fonctions consulaires à l'issue de ceux-ci comme motifs de la rupture du lien de confiance, cette dernière est dépourvue de fondements et n'est dès lors pas caractérisée ;
- le juge administratif est compétent pour connaître du présent litige dès lors que le refus qui lui a été opposé concerne uniquement la délivrance du brevet, qui ne vaut ni nomination ni admission aux fonctions de consul honoraire, et est donc détachable de la conduite des relations internationales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, la décision attaquée n'est pas détachable de la conduite des relations internationales et la juridiction administrative n'est, en conséquence, pas compétente pour en connaître ;
- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Un mémoire a été enregistré le 25 février 2021 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères qui n'a pas été communiqué.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 15 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963 ;
- le décret n° 76-548 du 16 juin 1976 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mantz,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- et les observations de Maître Martin représentant M. B...,
Considérant ce qui suit :
1. Par décision du 20 avril 2018 adressée aux services diplomatiques et consulaires du Guyana, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rejeté la candidature de M. B... à la fonction de consul honoraire à l'agence consulaire de Georgetown, capitale de ce pays. Cette décision ayant été notifiée verbalement le 8 mai 2018 par l'ambassadeur de France au Guyana à M. B..., ce dernier a formé à son encontre, par lettre du 12 juin 2018, un recours hiérarchique auprès du ministre. Par décision du 16 juillet 2018, le directeur des Français à l'étranger et de l'administration consulaire a rejeté ce recours et confirmé à M. B... le refus de validation de sa candidature. M. B... relève appel du jugement du 3 juin 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juillet 2018.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
2. Aux termes de l'article 4 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires : " 1. Un poste consulaire ne peut être établi sur le territoire de l'Etat de résidence qu'avec le consentement de cet Etat... ". Aux termes de l'article 10 de cette convention : " 1. Les chefs de poste consulaire sont nommés par l'Etat d'envoi et sont admis à l'exercice de leurs fonctions par l'Etat de résidence (...) ". Selon l'article 12 de la même convention : " 1. Le chef de poste consulaire est admis à l'exercice de ses fonctions par une autorisation de l'Etat de résidence dénommée "exequatur" quelle que soit la forme de cette autorisation - 2. L'Etat qui refuse de délivrer un exequatur n'est pas tenu de communiquer à l'Etat d'envoi les raisons de son refus (...) ". L'article 19 de cette convention stipule : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 20, 22 et 23, l'Etat d'envoi nomme à son gré les membres du personnel consulaire (...) ". Selon l'article 22 de la même convention : " (...) 2. Les fonctionnaires consulaires ne peuvent être choisis parmi les ressortissants de l'Etat de résidence qu'avec le consentement exprès de cet Etat, qui peut en tout temps le retirer (...) ". Enfin, l'article 68 de cette convention stipule : " Chaque Etat est libre de décider s'il nommera ou recevra des fonctionnaires consulaires honoraires. ".
3. La décision du 16 juillet 2018 par laquelle le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire a, en application des stipulations précitées de la convention de Vienne, confirmé à M. B... le rejet de sa candidature en qualité de consul honoraire du Guyana, ne saurait être regardée comme se rattachant directement aux relations de l'Etat français avec l'Etat du Guyana. Elle ne présente dès lors pas le caractère d'acte de gouvernement dont la juridiction administrative serait incompétente pour connaître. Par suite, l'exception d'incompétence invoquée par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères doit être écartée.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 1 du décret du 16 juin 1976 relatif aux consuls généraux, consuls et vice-consuls honoraires et aux agents consulaires : " Les chefs de circonscription consulaire peuvent nommer, dans les localités de leur circonscription où l'intérêt du service leur paraîtra l'exiger, des délégués qui reçoivent, selon l'importance de leurs fonctions, le titre soit de consul général honoraire, de consul honoraire, de vice-consul honoraire ou d'agent consulaire. Ces délégués sont choisis parmi les Français notables établis dans la localité ou parmi les personnalités étrangères de ladite localité, âgés de vingt-cinq ans au moins ". L'article 2 du même décret dispose que : " Les chefs de circonscription consulaire ne peuvent, toutefois, procéder à aucune nomination, ni délivrer ou renouveler de brevet correspondant, sans l'autorisation préalable du ministre des affaires étrangères, accordée sur proposition du chef de la mission diplomatique dont ils relèvent ". L'article 3 de ce décret dispose que : " Les brevets de consul général, consul ou vice-consul honoraires et d'agent consulaire sont délivrés par les chefs de circonscription consulaire pour une période maximale de cinq ans. Ils sont renouvelables dans les mêmes conditions après autorisation du ministre des affaires étrangères sur proposition du chef de la mission diplomatique, mais en tout état de cause les intéressés ne pourront exercer leurs fonctions au-delà de l'âge limite de soixante-dix ans ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
6. Il résulte des dispositions qui précèdent de l'article 1 du décret du 16 juin 1976 que la nomination au poste de consul honoraire ne constitue pas un droit pour les personnes qui en sollicitent le bénéfice, alors même qu'elles remplissent les conditions d'intégration, d'âge et de résidence prévues au même article. En outre, si M. B... soutient qu'il avait déjà été nommé en 2015 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, il ressort des pièces du dossier que cette nomination n'a pas pu prendre effet du fait de l'absence d'autorisation de l'Etat de résidence. Au surplus, par lettre du 6 janvier 2017 adressée à l'ambassadeur de France au Guyana, M. B... a retiré sa candidature de chef de poste de l'agence consulaire de Georgetown. Par suite, la décision attaquée ne saurait être regardée comme refusant à M. B... un avantage dont l'attribution constituerait pour lui un droit, alors même qu'il aurait reçu le consentement du chef du poste et l'exequatur des autorités du Guyana. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
7. En second lieu, si M. B... soutient que le ministre de l'Europe et des affaires étrangères ne pouvait lui opposer un exercice " de facto " des fonctions de consul honoraire, il ressort des pièces du dossier que l'autorisation donnée le 10 novembre 2015 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères à la nomination de M. B... en qualité de consul honoraire du Guyana n'a jamais fait l'objet avant 2017 d'une autorisation formelle des autorités du Guyana, condition exigée par l'article 12 de la convention de Vienne. Dès lors, si M. B... soutient que sa candidature a fait l'objet d'une autorisation verbale de la part de ces autorités, une telle autorisation, à la supposer même établie, n'était en tout état de cause pas de nature à lui permettre d'exercer des fonctions de consul honoraire. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
8. En troisième lieu, en opposant à M. B... la circonstance qu'il a prétendu n'avoir jamais exercé de fonctions de consul honoraire afin de se porter candidat aux élections législatives de 2017, qu'il a introduit un recours auprès du Conseil constitutionnel motif pris du refus de l'enregistrement de sa candidature à ces élections et qu'il a tenté, après le rejet de ce recours, de reprendre ses fonctions de consul honoraire, le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts et pouvait en outre légalement invoquer ceux-ci au soutien de la caractérisation de la rupture du lien de confiance.
9. Enfin, M. B... soutient qu'il a agi dans l'intérêt du service et au mieux des intérêts de la France, aux dépens de sa situation personnelle, professionnelle et financière, que ses actions se sont avérées nécessaires, que ses relations avec les ambassadeurs ont été loyales et empreintes de confiance et que le " positionnement non maîtrisé au regard de la fonction et de ses exigences " qui lui est opposé en défense est erroné. Toutefois, en refusant de valider la candidature du requérant en qualité de consul honoraire au motif de la rupture du lien de confiance et de loyauté, le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Délibéré après l'audience du 18 février 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2022.
Le rapporteur,
P. MANTZ
La présidente,
M. HEERS Le greffier,
V. BREME
La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No
N° 20PA02076
4ème chambre
Mme HEERS, président
M. Pascal MANTZ, rapporteur
M. BARONNET, rapporteur public
CABINET ORIER RISSER AVOCATS, avocats
Lecture du vendredi 11 mars 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 16 juillet 2018 par laquelle le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a refusé de valider sa candidature au poste de consul honoraire au Guyana.
Par un jugement n° 1820946/5-3 du 3 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 août 2020 et le 11 février 2021, M. B..., représenté par Me Orier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus d'accès au poste de consul honoraire n'est pas motivée, en méconnaissance du 6° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; en effet, ayant été nominé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères avant l'édiction de la décision attaquée, cette dernière lui est donc défavorable ; en outre, sa nomination en qualité de consul honoraire représentait pour lui un aboutissement professionnel et personnel important, constitutif d'un avantage certain qui lui a été refusé, alors qu'il remplissait les conditions légales pour l'obtenir ;
- il a exercé ses fonctions de consul honoraire avec l'accord des autorités françaises et l'autorisation verbale des autorités guyaniennes, valant exequatur au sens de l'article 12.1 de la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, qui n'exige à cet égard aucune condition de forme ;
- l'exercice des fonctions de consul honoraire " de facto " n'est pas caractérisé, alors qu'il remplit ses missions avec sérieux et loyauté, et ne pouvait constituer un motif valable de rupture du lien de confiance ;
- les motifs de fait sur lesquels s'est fondé le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire pour lui opposer la rupture du lien de confiance sont entachés d'inexactitude matérielle ;
- le motif invoqué par les premiers juges et repris en défense par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, tiré d'un " positionnement non maîtrisé au regard de la fonction et de ses exigences ", est erroné ;
- dès lors que les premiers juges ont écarté les événements ayant trait à sa candidature aux élections législatives ainsi que sa volonté de reprendre ses fonctions consulaires à l'issue de ceux-ci comme motifs de la rupture du lien de confiance, cette dernière est dépourvue de fondements et n'est dès lors pas caractérisée ;
- le juge administratif est compétent pour connaître du présent litige dès lors que le refus qui lui a été opposé concerne uniquement la délivrance du brevet, qui ne vaut ni nomination ni admission aux fonctions de consul honoraire, et est donc détachable de la conduite des relations internationales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, la décision attaquée n'est pas détachable de la conduite des relations internationales et la juridiction administrative n'est, en conséquence, pas compétente pour en connaître ;
- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Un mémoire a été enregistré le 25 février 2021 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères qui n'a pas été communiqué.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 15 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963 ;
- le décret n° 76-548 du 16 juin 1976 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mantz,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- et les observations de Maître Martin représentant M. B...,
Considérant ce qui suit :
1. Par décision du 20 avril 2018 adressée aux services diplomatiques et consulaires du Guyana, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rejeté la candidature de M. B... à la fonction de consul honoraire à l'agence consulaire de Georgetown, capitale de ce pays. Cette décision ayant été notifiée verbalement le 8 mai 2018 par l'ambassadeur de France au Guyana à M. B..., ce dernier a formé à son encontre, par lettre du 12 juin 2018, un recours hiérarchique auprès du ministre. Par décision du 16 juillet 2018, le directeur des Français à l'étranger et de l'administration consulaire a rejeté ce recours et confirmé à M. B... le refus de validation de sa candidature. M. B... relève appel du jugement du 3 juin 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juillet 2018.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
2. Aux termes de l'article 4 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires : " 1. Un poste consulaire ne peut être établi sur le territoire de l'Etat de résidence qu'avec le consentement de cet Etat... ". Aux termes de l'article 10 de cette convention : " 1. Les chefs de poste consulaire sont nommés par l'Etat d'envoi et sont admis à l'exercice de leurs fonctions par l'Etat de résidence (...) ". Selon l'article 12 de la même convention : " 1. Le chef de poste consulaire est admis à l'exercice de ses fonctions par une autorisation de l'Etat de résidence dénommée "exequatur" quelle que soit la forme de cette autorisation - 2. L'Etat qui refuse de délivrer un exequatur n'est pas tenu de communiquer à l'Etat d'envoi les raisons de son refus (...) ". L'article 19 de cette convention stipule : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 20, 22 et 23, l'Etat d'envoi nomme à son gré les membres du personnel consulaire (...) ". Selon l'article 22 de la même convention : " (...) 2. Les fonctionnaires consulaires ne peuvent être choisis parmi les ressortissants de l'Etat de résidence qu'avec le consentement exprès de cet Etat, qui peut en tout temps le retirer (...) ". Enfin, l'article 68 de cette convention stipule : " Chaque Etat est libre de décider s'il nommera ou recevra des fonctionnaires consulaires honoraires. ".
3. La décision du 16 juillet 2018 par laquelle le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire a, en application des stipulations précitées de la convention de Vienne, confirmé à M. B... le rejet de sa candidature en qualité de consul honoraire du Guyana, ne saurait être regardée comme se rattachant directement aux relations de l'Etat français avec l'Etat du Guyana. Elle ne présente dès lors pas le caractère d'acte de gouvernement dont la juridiction administrative serait incompétente pour connaître. Par suite, l'exception d'incompétence invoquée par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères doit être écartée.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 1 du décret du 16 juin 1976 relatif aux consuls généraux, consuls et vice-consuls honoraires et aux agents consulaires : " Les chefs de circonscription consulaire peuvent nommer, dans les localités de leur circonscription où l'intérêt du service leur paraîtra l'exiger, des délégués qui reçoivent, selon l'importance de leurs fonctions, le titre soit de consul général honoraire, de consul honoraire, de vice-consul honoraire ou d'agent consulaire. Ces délégués sont choisis parmi les Français notables établis dans la localité ou parmi les personnalités étrangères de ladite localité, âgés de vingt-cinq ans au moins ". L'article 2 du même décret dispose que : " Les chefs de circonscription consulaire ne peuvent, toutefois, procéder à aucune nomination, ni délivrer ou renouveler de brevet correspondant, sans l'autorisation préalable du ministre des affaires étrangères, accordée sur proposition du chef de la mission diplomatique dont ils relèvent ". L'article 3 de ce décret dispose que : " Les brevets de consul général, consul ou vice-consul honoraires et d'agent consulaire sont délivrés par les chefs de circonscription consulaire pour une période maximale de cinq ans. Ils sont renouvelables dans les mêmes conditions après autorisation du ministre des affaires étrangères sur proposition du chef de la mission diplomatique, mais en tout état de cause les intéressés ne pourront exercer leurs fonctions au-delà de l'âge limite de soixante-dix ans ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
6. Il résulte des dispositions qui précèdent de l'article 1 du décret du 16 juin 1976 que la nomination au poste de consul honoraire ne constitue pas un droit pour les personnes qui en sollicitent le bénéfice, alors même qu'elles remplissent les conditions d'intégration, d'âge et de résidence prévues au même article. En outre, si M. B... soutient qu'il avait déjà été nommé en 2015 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, il ressort des pièces du dossier que cette nomination n'a pas pu prendre effet du fait de l'absence d'autorisation de l'Etat de résidence. Au surplus, par lettre du 6 janvier 2017 adressée à l'ambassadeur de France au Guyana, M. B... a retiré sa candidature de chef de poste de l'agence consulaire de Georgetown. Par suite, la décision attaquée ne saurait être regardée comme refusant à M. B... un avantage dont l'attribution constituerait pour lui un droit, alors même qu'il aurait reçu le consentement du chef du poste et l'exequatur des autorités du Guyana. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
7. En second lieu, si M. B... soutient que le ministre de l'Europe et des affaires étrangères ne pouvait lui opposer un exercice " de facto " des fonctions de consul honoraire, il ressort des pièces du dossier que l'autorisation donnée le 10 novembre 2015 par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères à la nomination de M. B... en qualité de consul honoraire du Guyana n'a jamais fait l'objet avant 2017 d'une autorisation formelle des autorités du Guyana, condition exigée par l'article 12 de la convention de Vienne. Dès lors, si M. B... soutient que sa candidature a fait l'objet d'une autorisation verbale de la part de ces autorités, une telle autorisation, à la supposer même établie, n'était en tout état de cause pas de nature à lui permettre d'exercer des fonctions de consul honoraire. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
8. En troisième lieu, en opposant à M. B... la circonstance qu'il a prétendu n'avoir jamais exercé de fonctions de consul honoraire afin de se porter candidat aux élections législatives de 2017, qu'il a introduit un recours auprès du Conseil constitutionnel motif pris du refus de l'enregistrement de sa candidature à ces élections et qu'il a tenté, après le rejet de ce recours, de reprendre ses fonctions de consul honoraire, le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts et pouvait en outre légalement invoquer ceux-ci au soutien de la caractérisation de la rupture du lien de confiance.
9. Enfin, M. B... soutient qu'il a agi dans l'intérêt du service et au mieux des intérêts de la France, aux dépens de sa situation personnelle, professionnelle et financière, que ses actions se sont avérées nécessaires, que ses relations avec les ambassadeurs ont été loyales et empreintes de confiance et que le " positionnement non maîtrisé au regard de la fonction et de ses exigences " qui lui est opposé en défense est erroné. Toutefois, en refusant de valider la candidature du requérant en qualité de consul honoraire au motif de la rupture du lien de confiance et de loyauté, le directeur des français à l'étranger et de l'administration consulaire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Délibéré après l'audience du 18 février 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2022.
Le rapporteur,
P. MANTZ
La présidente,
M. HEERS Le greffier,
V. BREME
La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No