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Ariane Web: Conseil d'État 371453, lecture du 17 février 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:371453.20160217

Décision n° 371453
17 février 2016
Conseil d'État

N° 371453
ECLI:FR:CESSR:2016:371453.20160217
Publié au recueil Lebon
10ème - 9ème SSR
Mme Anne Iljic, rapporteur
M. Edouard Crépey, rapporteur public
RICARD, avocats


Lecture du mercredi 17 février 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris :
- d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 6 février 2012 par laquelle le président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) a refusé de lui communiquer la copie des indications de correction des épreuves du concours d'accès au grade d'administrateur territorial pour les sessions 2009 et 2010 ;
- d'enjoindre au CNFPT de lui communiquer ces documents dans un délai de 8 jours à compter de la notification de son jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1207821 du 25 juin 2013, le tribunal administratif de Paris, faisant partiellement droit à sa demande, a annulé cette décision du 6 février 2012 du président du CNFPT et a enjoint au CNFPT de communiquer à M. A...les documents demandés dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 août et 26 septembre 2013 et le 5 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le CNFPT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Paris ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par M. A...devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
- la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Iljic, auditeur,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Ricard, avocat du Centre national de la fonction publique territoriale ;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...A...a demandé au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) de lui communiquer les arrêtés de nomination du jury, des correcteurs et examinateurs des concours d'administrateur territorial relatifs aux sessions 2010 et 2011, ainsi que les éléments de correction des sujets des épreuves d'admissibilité du concours interne élaborés par le CNFPT ; qu'à la suite du refus opposé à sa demande par le CNFPT en tant qu'elle concernait les éléments de corrections des épreuves d'admissibilité du concours interne, M. A...a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, qui s'est prononcée en faveur de la communication de ces documents par un avis du 12 janvier 2012 ; qu'à la suite du nouveau refus opposé à sa demande par une décision du président du CNFPT du 6 février 2012, M. A...a saisi le tribunal administratif de Paris d'un recours pour excès de pouvoir contre cette décision ; que le CNFPT se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision du 6 février 2012 et lui a enjoint de communiquer les éléments de correction en litige dans le délai d'un mois à compter de la notification de son jugement ;

2. Considérant qu'il n'est pas contesté par les parties qu'à la suite du jugement du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Paris, le CNFPT a communiqué à M. A... les éléments de correction demandés ; que la communication de ces documents par le requérant en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris ne rend pas sans objet son pourvoi ; qu'il y a donc lieu d'y statuer ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des visas ainsi que des termes mêmes du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal administratif de Paris a analysé le moyen soulevé en défense devant lui par le CNFPT tiré de ce que les éléments de correction demandés ne revêtaient pas le caractère de documents administratifs communicables au motif qu'ils seraient indétachables de la décision finale rendue par le jury ; que, d'autre part, le tribunal a répondu à ce moyen dans les motifs de sa décision ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, fiscal et social : " Sont considérés comme documents administratifs au sens des chapitre Ier, III et IV du présent titre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, compte rendus, procès verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions. " (...) ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre. / Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. " ; qu'en prévoyant ainsi la communication des documents administratifs le législateur n'a pas entendu porter atteinte au principe d'indépendance des jurys d'où découle le secret de leurs délibérations et, par suite, permettre la communication tant des documents de leurs délibérations que de ceux élaborés préalablement par les jurys en vue de leurs délibérés ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les éléments de correction des sujets des épreuves d'admissibilité du concours interne d'administrateur territorial, de valeur purement indicative et qui ne pouvaient avoir pour objet ni pour effet de déterminer les critères de l'appréciation par le jury de la performance individuelle des candidats, sont des documents administratifs élaborés par le CNFPT dans le cadre de la mission de service public de définition des programmes et de préparation aux concours d'accès et examens professionnels de la fonction publique territoriale qui lui a été confiée par l'article 11 de la loi du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale ; que le secret des délibérations des jurys ne pas fait obstacle à la communication de ces éléments de correction qui n'ont pas été élaborés par le jury en vue de ses délibérations ; qu'ainsi les éléments de correction dont la communication est demandée, qui revêtaient le caractère de documents préparatoires jusqu'à la proclamation des résultats du concours interne d'administrateur territorial pour les sessions 2010 et 2011, sont devenus communicables de plein droit depuis cette date, sans qu'y fasse obstacle aucune disposition de la loi du 17 juillet 1978 ; qu'il suit de là que, contrairement à ce qui est soutenu, c'est sans erreur de droit que le tribunal administratif a jugé que les éléments de correction des sujets des épreuves d'admissibilité des sessions 2010 et 2011 du concours interne d'administrateur territorial constituaient des documents administratifs communicables au sens de la loi du 17 juillet 1978 ;

6. Considérant qu'il résulte de tout de qui précède que le pourvoi du CNFPT doit être rejeté ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du CNFPT est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au Centre national de la fonction publique territoriale et à M. B...A....


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