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Ariane Web: Conseil d'État 390052, lecture du 21 octobre 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:390052.20161021

Décision n° 390052
21 octobre 2016
Conseil d'État

N° 390052
ECLI:FR:CECHR:2016:390052.20161021
Mentionné aux tables du recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
M. Pierre Lombard, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
SCP GASCHIGNARD ; SCP OHL, VEXLIARD, avocats


Lecture du vendredi 21 octobre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La communauté de communes du Val-de-Drôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 14 septembre 2012 par lequel le préfet de la Drôme a fixé le périmètre de la consultation pour l'extension de la communauté de communes du pays de Dieulefit et, d'autre part, l'arrêté du 4 avril 2013 par lequel le préfet de la Drôme a étendu le périmètre de la communauté de communes du pays de Dieulefit aux communes de Bézaudun-sur-Bîne, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, Les Tonils et Truinas. Par un jugement n° 1205902-1302801 du 3 octobre 2013, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13LY03092 du 10 mars 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel que la communauté de communes du Val-de-Drôme a formé contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 10 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la communauté de communes du Val-de-Drôme demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de la communauté de communes du Val-de-Drôme et à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de la commune de Crupies, de la commune de Truinas, de la commune de Bouvières, de la commune de Tonils, de la commune Bezaudun-sur-Bîne et de la commune de Bourdeaux ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 14 décembre 2011, le préfet de la Drôme a arrêté le schéma départemental de coopération intercommunale de la Drôme. Ce schéma prévoyait notamment une modification des périmètres respectifs de deux communautés de communes adjacentes, la communauté de communes du Val-de-Drôme et la communauté de communes du pays de Dieulefit. Six communes, situées à l'extrémité sud-est du territoire de la première, soit les communes de Bézaudun-sur-Bîne, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, Les Tonils et Truinas, devaient rejoindre la seconde. Conformément aux prescriptions du schéma départemental de coopération intercommunale, le préfet de la Drôme a, le 14 septembre 2012, arrêté un projet de périmètre portant extension du périmètre de la communauté de communes du pays de Dieulefit aux six communes mentionnées ci-dessus. Puis, le 4 avril 2013, le préfet de la Drôme a pris un arrêté définitif d'extension de périmètre de cette communauté de communes. La communauté de communes du Val-de-Drôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 14 septembre 2012 et 4 avril 2013 du préfet de la Drôme. Par un jugement du 3 octobre 2013, le tribunal administratif a rejeté ses demandes. La communauté de communes du Val-de-Drôme se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 mars 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.

2. L'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose : " I.-Dans chaque département, il est établi, au vu d'une évaluation de la cohérence des périmètres et de l'exercice des compétences des groupements existants, un schéma départemental de coopération intercommunale prévoyant une couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales. / II.-Ce schéma prévoit également les modalités de rationalisation des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes existants. / Il peut proposer la création, la transformation ou la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi que la modification de leurs périmètres. / Il peut également proposer la suppression, la transformation, ainsi que la fusion de syndicats de communes ou de syndicats mixtes (...) ".

3. Les actes relatifs à l'institution des structures des organismes de coopération entre collectivités territoriales et à la répartition des compétences entre ces organismes et les collectivités qui en sont membres ne revêtent pas le caractère d'actes réglementaires. Il en résulte que l'arrêté du 14 décembre 2011 par lequel le préfet de la Drôme a adopté le schéma départemental de coopération intercommunale ne revêt pas un tel caractère.

4 La légalité des actes qui ne revêtent pas un caractère réglementaire n'est plus susceptible d'être contestée par voie d'exception au-delà du délai de recours contentieux ouvert à leur encontre. Dès lors, l'arrêté du 14 décembre 2011 par lequel le préfet de la Drôme, dont il ressortait des pièces non contestées du dossier soumis à la cour qu'il était devenu définitif à la date de l'introduction de sa requête devant le tribunal administratif de Grenoble, la communauté de communes du Val-de-Drôme ne pouvait plus contester sa légalité par voie d'exception. Ce motif, qui n'appelle l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie, sur ce point, le dispositif. Par suite, le moyen soulevé par la communauté de communes du Val-de-Drôme contre l'arrêt attaqué, en tant qu'il est insuffisamment motivé et qu'il méconnaît les dispositions du IV de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales en jugeant que les syndicats mixtes dont les communes de Bézaudun-sur-Bîne, de Bourdeaux, de Bouvières, de Crupies, des Tonils et de Truinas étaient membres n'étaient pas concernés par le rattachement de ces communes à la communauté de communes du pays de Dieulefit et n'avaient donc pas à être consultés sur le projet de schéma départemental de coopération intercommunale arrêté par le préfet de la Drôme le 14 décembre 2011, ne peut qu'être écarté.

5. Par ailleurs, c'est sans entacher son arrêt d'insuffisance de motivation que la cour a jugé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la réduction du périmètre de la communauté de communes du pays du Val de Drôme aurait pour effet de créer un déséquilibre financier pour cet établissement, dès lors qu'au surplus il n'était pas établi que le retrait des six communes concernées ne serait assorti d'aucune condition financière et patrimoniale.

6. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, la cour n'a pas omis de répondre à son moyen tiré de ce qu'en ne rattachant pas la communauté de communes du pays de Dieulefit à la communauté d'agglomération de Montélimar-Sésame, le préfet de la Drôme aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des objectifs poursuivis par le législateur et des orientations mentionnées au III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. Elle a en effet jugé que si la communauté de communes du Val-de-Drôme faisait valoir que l'amélioration de la cohérence spatiale de la communauté de communes de Dieulefit impliquait son rattachement à la communauté d'agglomération Montélimar Sésame, elle n'apportait aucun élément à l'appui de ses allégations.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes du Val-de-Drôme, une somme totale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge des communes de Bézaudun-sur-Bîne, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, Les Tonils et Truinas qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la communauté de communes du Val-de-Drôme est rejeté.
Article 2 : La communauté de communes du Val-de-Drôme versera à chacune des communes de Bézaudun-sur-Bîne, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, Les Tonils et Truinas la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la communauté de communes du Val-de-Drôme, aux communes de Bézaudun-sur-Bîne, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, Les Tonils et Truinas, et au préfet de la Drôme.


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