Conseil d'État
N° 471035
ECLI:FR:CECHR:2023:471035.20230525
Publié au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
Mme Christine Maugüé , président
M. Jérôme Goldenberg, rapporteur
M. Philippe Ranquet, rapporteur public
SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES, avocats
Lecture du jeudi 25 mai 2023
Vu la procédure suivante :
Par un arrêt n° 22VE00869 du 2 février 2023, enregistré le 2 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur l'appel formé par la société anonyme (SA) La Poste contre le jugement n° 2007637 du 17 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé la décision du 6 juillet 2020 par laquelle le directeur de la plateforme industrielle courrier de la Poste de Paris-Sud-Wissous a indiqué à Mme K... H... qu'il allait opérer des retenues sur ses traitements pour absence de service fait à la suite de l'exercice de son droit de retrait et la décision rejetant le recours gracieux formée par Mme H... contre cette décision et, d'autre part, lui a enjoint de rembourser à Mme H... les sommes qui avaient été retenues, a décidé, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) Un recours en annulation contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève-t-il par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue-t-il, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève-t-il à la fois de l'excès de pouvoir et du plein contentieux '
2°) Dans l'hypothèse où le tribunal a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, cette question doit-elle être soulevée d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée et communiquée aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative '
Des observations, enregistrées le 9 mars 2023, ont été présentées par la société La Poste.
Des observations, enregistrées le 13 mars 2023, ont été présentées par Mme H....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de Mme H... et à la SCP Foussard-Froger, avocat de la société La Poste ;
REND L'AVIS SUIVANT :
1. La nature d'un recours exercé contre une décision à objet pécuniaire est fonction, hormis les cas où il revêt par nature le caractère d'un recours de plein contentieux, tant des conclusions de la demande soumise à la juridiction que de la nature des moyens présentés à l'appui de ces conclusions.
2. Si le recours dirigé contre un titre de perception relève par nature du plein contentieux, la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement ne peut à cet égard être assimilée à une telle décision lorsqu'elle ne comporte pas l'indication du montant de la créance ou qu'elle émane d'un organisme employeur qui n'est pas doté d'un comptable public. Des conclusions tendant à l'annulation de cette décision et du rejet du recours gracieux formé contre celle-ci doivent être regardées comme présentées en excès de pouvoir.
3. La circonstance que ce recours en annulation soit assorti de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de rembourser la somme prélevée, qui relèvent du plein contentieux, n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux.
4. Dans l'hypothèse où le juge a méconnu tout ou partie de son office en raison d'une erreur quant à la nature du recours concernant la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement, le moyen tiré de la méconnaissance de son office est d'ordre public.
Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Versailles, à la société anonyme La Poste et à Mme K... H.... Il sera publié au Journal officiel de la République française.
Délibéré à l'issue de la séance du 10 mai 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Géraud Sajust de Bergues, conseillers d'Etat et M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 25 mai 2023.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Jérôme Goldenberg
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard
N° 471035
ECLI:FR:CECHR:2023:471035.20230525
Publié au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
Mme Christine Maugüé , président
M. Jérôme Goldenberg, rapporteur
M. Philippe Ranquet, rapporteur public
SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES, avocats
Lecture du jeudi 25 mai 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
Vu la procédure suivante :
Par un arrêt n° 22VE00869 du 2 février 2023, enregistré le 2 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur l'appel formé par la société anonyme (SA) La Poste contre le jugement n° 2007637 du 17 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé la décision du 6 juillet 2020 par laquelle le directeur de la plateforme industrielle courrier de la Poste de Paris-Sud-Wissous a indiqué à Mme K... H... qu'il allait opérer des retenues sur ses traitements pour absence de service fait à la suite de l'exercice de son droit de retrait et la décision rejetant le recours gracieux formée par Mme H... contre cette décision et, d'autre part, lui a enjoint de rembourser à Mme H... les sommes qui avaient été retenues, a décidé, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) Un recours en annulation contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève-t-il par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue-t-il, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève-t-il à la fois de l'excès de pouvoir et du plein contentieux '
2°) Dans l'hypothèse où le tribunal a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, cette question doit-elle être soulevée d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée et communiquée aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative '
Des observations, enregistrées le 9 mars 2023, ont été présentées par la société La Poste.
Des observations, enregistrées le 13 mars 2023, ont été présentées par Mme H....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de Mme H... et à la SCP Foussard-Froger, avocat de la société La Poste ;
REND L'AVIS SUIVANT :
1. La nature d'un recours exercé contre une décision à objet pécuniaire est fonction, hormis les cas où il revêt par nature le caractère d'un recours de plein contentieux, tant des conclusions de la demande soumise à la juridiction que de la nature des moyens présentés à l'appui de ces conclusions.
2. Si le recours dirigé contre un titre de perception relève par nature du plein contentieux, la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement ne peut à cet égard être assimilée à une telle décision lorsqu'elle ne comporte pas l'indication du montant de la créance ou qu'elle émane d'un organisme employeur qui n'est pas doté d'un comptable public. Des conclusions tendant à l'annulation de cette décision et du rejet du recours gracieux formé contre celle-ci doivent être regardées comme présentées en excès de pouvoir.
3. La circonstance que ce recours en annulation soit assorti de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de rembourser la somme prélevée, qui relèvent du plein contentieux, n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux.
4. Dans l'hypothèse où le juge a méconnu tout ou partie de son office en raison d'une erreur quant à la nature du recours concernant la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement, le moyen tiré de la méconnaissance de son office est d'ordre public.
Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Versailles, à la société anonyme La Poste et à Mme K... H.... Il sera publié au Journal officiel de la République française.
Délibéré à l'issue de la séance du 10 mai 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Géraud Sajust de Bergues, conseillers d'Etat et M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 25 mai 2023.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Jérôme Goldenberg
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard